Filippo Grandi: la voix du Pape est cruciale pour les réfugiés

La paix, la réconciliation, mais aussi l’importance de l'accueil des réfugiés, seront quelques-uns des enjeux du 40e voyage apostolique du Saint-Père en RDC et au Soudan du Sud. Ce lundi matin 30 janvier, veille du départ, le Pape François a reçu au Vatican le Haut-Commissaire des Nations-Unies aux réfugiés. Un nouvel échange avec le diplomate italien Filippo Grandi, passé dans nos studios après l’audience. De retour d’une semaine en Ukraine, le chef du HCR explique l’importance à ses yeux du déplacement du Pape.

Après six jours dans une Ukraine ravagée par les bombes, où au moins 5 millions de personnes se sont retrouvées sans abri et où 6 millions d'autres ont dû fuir de l'autre côté de la frontière, le Haut-Commissaire des Nations-Unies pour les réfugiés est arrivé en Italie pour s'attaquer au dossier complexe des flux migratoires à travers la Méditerranée. Après s'être entretenu avec le président de la République italienne, Sergio Mattarella, Filippo Grandi a aussi rencontré ce lundi les chefs du gouvernement italien, en bras de fer avec l’UE sur les questions migratoires, et en pleine controverse sur le rôle des ONG humanitaires opérant en mer.

Audience avec le Saint-Père

Le diplomate italien a de nouveau rencontré le Saint-Père en audience ce lundi matin au Palais apostolique, veille du 40e voyage apostolique en République démocratique du Congo et au Soudan du Sud. Deux pays qui traversent des crises politiques et sociales profondes et graves, avec des conséquences humanitaires dramatiques, mais aussi deux États qui comptent à l'intérieur de leurs frontières un nombre incalculable de réfugiés et déplacés, fuyant les conflits dans les pays voisins.

S'exprimant sur les ondes de Radio Vatican, le Haut-Commissaire des Nations-Unies ne doute pas que la voix du Pape François dans le contexte africain soit d'une importance fondamentale.

Les conflits qui alimentent la crise des réfugiés

«Au cours des trente dernières années, la violence contre les civils, en particulier les femmes, a été terrible, explique le Haut-Commissaire des Nations-Unies, j'espère donc que la voix du Pape pourra rappeler au monde qu'il est important de soutenir les réponses humanitaires à ces crises». Les tentatives d'initier des processus de paix ont été timides et improductives, et il est certain que la pression créée par une présence aussi massive de réfugiés venus de toute l'Afrique a été un élément supplémentaire de tension: «Ce sont des situations très complexes dans lesquelles le rôle des personnes qui fuient a parfois aussi une influence dans le conflit et les réfugiés sont en quelque sorte pris entre deux feux.»

«La forteresse Europe»

Pour comprendre l'effet des conflits et des situations de crise sur le nombre exorbitant de réfugiés dans le monde, il suffit de regarder vers l'Ukraine. En seulement un an de guerre, au moins 7 millions de personnes ont trouvé refuge à l'étranger et 5 millions sont déplacées à l'intérieur du pays. Une crise humanitaire qui a suscité la solidarité immédiate de l'Union Européenne, qui a adopté l'instrument de protection temporaire en faveur des réfugiés ukrainiens. Une mesure que Filippo Grandi considère non seulement comme très positive, mais aussi comme un modèle pour de futures interventions. «Si nous avons réussi en Europe à si bien accueillir les réfugiés ukrainiens, nous pouvons aussi faire de même avec d'autres, car même s'il peut y avoir des défis plus complexes dans l'intégration et l'accueil d'autres groupes, nous ne pouvons pas générer de traitement discriminatoire ou différentiel, alors appliquons ces pratiques à d'autres groupes également et je crois que nous ferons des progrès dans leur accueil.»

ONG et sauvetages en mer

Alors que le débat en Europe est houleux sur les questions d'accueil des immigrants, notamment en ce qui concerne la répartition du nombre de réfugiés par les États membres, la controverse fait rage sur le rôle des organisations non gouvernementales dans les opérations de recherche et de sauvetage des migrants en Méditerranée. «La société civile est un complément extrêmement important à l'action des gouvernements. Même si les garde-côtes italiens font un excellent travail de sauvetage, les ressources consacrées à ces opérations par l'Europe ne sont pas suffisantes, c'est pourquoi la société civile compense ces lacunes, sans aucun doute. Et cette action doit être défendue et soutenue», relève le haut-fonctionnaire onusien.