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Quel avenir pour la monarchie britannique?

Les funérailles de la reine Elizabeth II se déroulent ce lundi à Londres. Les Britanniques saluent une dernière fois celle qui régna sur leur pays pendant plus de soixante-dix ans. À leurs côtés, des représentants de la plupart des États du monde, rendent un hommage unanime. Pour la monarchie britannique, plus qu’un changement de règne, il s’agit d’un changement d’ère.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

C’est le dernier salut de tout un peuple et bien plus qui a été rendu à Elizabeth II, reine de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ce lundi midi en l’abbaye de Westminster au cours d’une cérémonie solennelle, empreinte de la pompe et du faste que la monarchie britannique a toujours su déployer lors des événements qui rythment la vie de la famille royale. L’hommage est planétaire comme le prouvent la présence des principaux chefs d’État venus du monde entier et à la mesure d’une souveraine qui a marqué son époque et les esprits dans et en dehors de son royaume.


Au cours de la dernière semaine, le grand public a témoigné de son attachement à la souveraine en défilant devant son cercueil à Westminster Hall. Le Royaume-Uni, malgré les dissensions politiques, les problèmes économiques et sociaux, communie autour de la figure de celle qui a incarné une certaine stabilité à une époque de grands changements.

Un monarque sans pouvoir mais avec autorité

Quasiment tout au long de son règne, Elizabeth II a suscité un grand respect de la part de ses sujets. Monarque sans pouvoir politique effectif, c’est peut-être là la clé de sa popularité et de sa force, estime Philippe Chassaigne, professeur d’histoire contemporaine à l’université Bordeaux-Montaigne, et spécialiste du Royaume-Uni. «La grande ingéniosité des monarques britanniques depuis Victoria est d’avoir compris qu’être au-dessus du combat des partis était la clé de la survie de la monarchie», explique-t-il.

Entretien avec Philippe Chassaigne, spécialiste de la monarchie britannique

C’est toujours la condition pour que la monarchie se maintienne estime d’ailleurs l’historien qui en veut pour preuve la résolution du nouveau roi Charles III de respecter sa charge et donc un devoir de réserve auquel il n’était pas tenu quand il était prince de Galles. «Il a dit clairement que le moment venu, il se plierait à ses devoirs de monarque constitutionnel». Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des droits qu’un théoricien de l’époque victorienne, Walter Bagehot, décrivit dans «La Constitution anglaise» en 1867: le droit d’être informé, ce qu’il est tous les jours en recevant une liasse de documents officiels ; le droit d’encourager, ce qu’il peut faire au cours de sa rencontre hebdomadaire avec le Premier ministre ; et le droit de mettre en garde s’il estime que la politique menée ou les projets de loi peuvent nuire à l’unité du royaume ou au bien du peuple. «Le monarque s’exprime mais le Premier ministre est libre d’en faire ce qu’il veut» précise Philippe Chassaigne.

Un symbole d'unité et de stabilité

Ce soutien des Britanniques à leur monarque se vérifie jusqu’à présent à chaque changement de règne. «C’est un trait commun à toutes les monarchies européennes, que l’existence du monarque assure une stabilité qui permet de contrebalancer le rythme et l’agitation politique. Il y a la vie politique au jour le jour et il y a au-dessus la figure tutélaire du monarque qui ne prend pas position et qui est là pour incarner le sentiment national» explique l’universitaire.

Mais après un si long règne, la question du maintien de l’allégeance monarchique pourrait être posée dans certains territoires. Tout d’abord en Écosse, traversée depuis des années, et encore plus depuis le Brexit, par des velléités d’indépendance, mais aussi en Irlande du Nord où le Sinn Fein, parti républicain, est maintenant majoritaire au sein des institutions régionales, reconnait Philippe Chassaigne. La question pourrait se présenter également dans les États dont le monarque britannique est formellement le souverain comme la Jamaïque qui pourrait décider d’emboiter le pas à la Barbade, récemment devenue une république, ou dans les anciens dominions comme le Canada, et davantage encore en Australie, où la question a déjà été posée, ou en Nouvelle-Zélande, où la Première ministre est ouvertement républicaine.

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19 septembre 2022, 12:30