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Le Pape émérite Benoît XVI  et le père Paul Béré S.J. Le Pape émérite Benoît XVI et le père Paul Béré S.J.  

Benoît XVI: l’exemple d'un authentique intellectuel au service de l’Église

Le père Paul Béré, prêtre jésuite burkinabé a été lauréat du prix Joseph Ratzinger-Benoit XVI en 2019. Il garde du défunt Pape émérite le témoignage d’un homme toujours en quête de la vérité et qui a mis ses dons intellectuels et de foi au service de Jésus-Christ.

Entretien réalisé par Françoise Niamien - Cité du Vatican

En 2019 la Fondation Joseph Ratzinger-Benoît XVI récompensait deux lauréats du prix Ratzinger, dont le père jésuite Paul Béré, originaire du Burkina Faso. Spécialiste reconnu de l'Ancien Testament, enseignant à l'Institut biblique Pontifical de Rome, par ailleurs membre de la Commission biblique pontificale, le père Béré est le premier Africain à recevoir cette récompense. 

Que gardez-vous de Benoît XVI en tant que théologien ?

Le Pape Benoît XVI comme figure théologique représente pour moi et je suppose pour les théologiens africains l'exemple d'un authentique intellectuel, c'est-à-dire un chercheur de la vérité à travers l'objet de sa foi, Jésus-Christ qui est le chemin, la vérité et la vie (Jean 14,6). Son testament l'atteste: Jésus-Christ a été au centre de toute sa vie de croyant et de théologien.

S'il a exploré à fond la dimension "vérité" du Christ, je crois qu'il trace pour le théologien africain une voie non pas à imiter mais à émuler sur la dimension de Jésus Sauveur comme "vie". L'être disciple du Christ en Afrique a besoin d'un approfondissement théologique de cet aspect de Jésus qui est venu pour que nous ayons la vie en abondance (cf. Jean 10,10). Imiter le théologien, Benoît XVI, n'est pas refaire sa théologie en la "tropicalisant", mais élaborer une christologie à partir de la vie à hauteur de la proposition de ce grand théologien.

Entant que premier africain lauréat du Prix Ratzinger 2019, quel est votre regard sur ce prix qui vise à encourager la recherche théologique dans la lignée de l'enseignement du théologien Ratzinger ?

Je suis convaincu que le Pape Benoît XVI est resté professeur dans l'âme et toujours en quête de la vérité. Le prix Ratzinger rend ainsi visibles celles et ceux qui explorent les différentes zones du savoir, au-delà de la théologie, cherchent la vérité. Je souligne au-delà de la théologie parce que Benoît XVI insistait pour qu'on élargisse l'espace de la raison. On ne doit pas la réduire à la raison mathématique et technique.

Le fait que je sois le premier africain est sans mérite de ma part. Ce qui me semble toutefois important, c'est la présence d'un africain dans ce cercle des lauréats. Je l'ai montré par ma contribution au livre publié en hommage au Pape émérite à l'occasion de ses 95 ans en avril 2022. En proposant de partager une étude sur "l'Auralité des Saintes Ecritures" j'invitais à porter un regard autre sur le texte biblique. Toute différence appelle précisément la complémentarité.

Que dire du prix Ratzinger et de l'enseignement de Benoît XVI?

La Fondation Ratzinger travaille à pérenniser son œuvre. Personnellement, je crois que le prix offert à d'autres chercheurs signale et invite au dialogue dans la recherche théologique avec d'autres disciplines. En fait, c'est, me semble-t-il, l'esprit de Benoît XVI: maintenir dans la recherche un dialogue profond et authentique avec l'autre qui cherche la vérité à travers d'autres formes du savoir: philosophe, exégète, architecte, musicien, etc. Ce dialogue rigoureux n'est ni réducteur, ni complaisant. Quand je vous dis que je suis sensible à Jésus-Christ comme "vie", j'engage un dialogue profond avec la parole théologique de Benoît XVI qui m'enseigne constamment que Jésus-Christ est "vérité". Un autre Lui sera sensible comme "chemin". C'est donc à ce type de dialogue multiforme qu'invite la posture théologique de Benoît XVI.

Quel est selon vous l'héritage du Pape Benoît XVI à la théologie africaine?

Il a mis ses dons intellectuels et de foi au service du Christ qu'il a aimé et servi de tout son cœur et de toutes ses forces. C'est, à mon sens, l'héritage qu'il laisse à tout théologien africain. Il m'a semblé un théologien heureux de l'être, sans complexe. On court le risque, en théologie africaine, de prêter l'oreille aux sirènes du monde et d'être divertis par la fascination du monde. On a besoin de cette persévérance ou de cette hardiesse dans le labeur théologique qui requiert un souffle de longue haleine. Se confronter à sa pensée comme à celle d'autres théologies d'Asie, d'Amérique latine, etc., élargit l'espace de la raison si celle-ci garde Jésus-Christ comme son horizon.


 

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04 janvier 2023, 14:16