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Vie consacrée: avec la pandémie, un autre rapport à l'autre et à la terre

Avec la pandémie et les mesures de confinement qu’elle implique, les bénédictines de Sainte Bathilde ont appris à vivre dans l’instant présent «ce qui permet à la Parole de Dieu d’être au présent». À l’occasion de la 25e Journée de la Vie consacrée, nous vous proposons le témoignage de Sœur Marie-Madeleine Caseau, présidente de la congrégation et prieure de la communauté de Vanves.

Entretien réalisé par Marie Duhamel - Cité du Vatican

Au Vatican, le Pape François célèbrera à partir de 17h30 dans la basilique Saint-Pierre une messe pour la 25e Journée de la Vie consacrée, mardi 2 février.

À l’approche de cette célébration, les responsables du Dicastère pour les Instituts de vie consacrée et Sociétés de vie apostolique publiaient une lettre ouverte pour encourager les personnes consacrées, engagées dans la vie apostolique comme dans la vie contemplative, à «ne pas se replier sur eux-mêmes», mais au contraire à être les «Samaritains de ce temps» de pandémie, qualifié «d’heure de vérité» par le Pape. À la suite de François, le Préfet et secrétaire du dicastère, les encourageaient à être «des artisans de fraternité universelle et des gardiens de la maison commune». C’est précisément ce qu’ont tâché de faire, jour après jour, les bénédictines de sainte Bathilde du monastère de Vanves, implanté en région parisienne.

Vivre autrement l'hospitalité

Lors des périodes de confinement, les religieuses ont tenté, avant toute chose, de «vivre dans la paix et la solidarité». Privées d’aide extérieure, elles se sont «serrées les coudes» pour réorganiser le quotidien, partagé entre la prière, une marche dans le jardin et l’attention portée aux autres.

Une caractéristique essentielle de leur charisme est l’hospitalité. Aussi, empêchées d’accueillir des visiteurs le temps d’un office ou pour une retraite lors des périodes de restriction les plus drastiques, elles ont engagé une réflexion sur l’accueil et le rapport à l’autre. Elles ont ainsi décidé d’offrir un toit et de la compagnie aux plus de 75 ans de leur entourage pendant le premier confinement, de recueillir les intentions de prière de ceux qu’elles ne pouvaient plus accueillir, d’imprimer leurs photos dans l’église où elles se trouvent toujours, et se sont mises surtout aux réseaux sociaux pour les accompagner.

La liturgie a été repensée et les caméras branchées pour proposer à tout un chacun de suivre les offices à midi 14h30 et 21h00, «les heures un peu creuses», explique Sœur Marie-Madeleine, pour «rejoindre les gens et leur dire qu’à ce moment-là on est en lien avec vous et on vous accueille dans notre prière». Actuellement, les religieuses réfléchissent à les accompagner sur internet, par Zoom, pendant le Carême, «avec l’aide de gens de l’extérieur» pour savoir ce dont le monde a besoin, car «l’hospitalité, ce n’est pas donner ce que l’on vit, mais entendre ce dont on a besoin et ce dont l’autre a besoin pour se sentir accueilli».

«Interpellées»? les religieuses cherchent de nouvelles manières de faire «qui changeront leur manière d’être». Avec l’assouplissement des mesures sanitaires, elles ont ainsi commencé par aller directement à la porte pour ouvrir à leurs visiteurs, et cela semble déjà avoir changé la qualité de l’accueil et du rapport à l’autre, estime sœur Marie-Madeleine.

Trier ses déchets pour respecter la Création

Dans une lettre adressée à leurs amis à la fin de l’année dernière, les religieuses qualifiaient 2020 d’«Année verte» où après l’hivernage, un temps pour faire silence, elles avaient semé pour pouvoir récolter. S’associant au courant monastique souhaitant créer un Label «monastère vert» sur le modèle de celui existant pour les Églises en France, une équipe «écolo» a été mise sur pied pour commencer par le début, bien trier ses déchets.

Des recherches ont été lancées, des contacts établis et des documentaires visionnés en communauté. «Voir des gens travailler avec des gants des masques dans des usines à trier les ordures toute la journée, ça nous a touché de voir ces visages, on a été émues aux entrailles». Finalement, une formation a été proposée et des poubelles de toutes les couleurs achetées. Aujourd’hui, plus d’erreurs, la quantité de leurs déchets en a d’ailleurs été modifiée. «Je pense qu’il faut être convaincu que si on change un point concret, ça change le visage de la communauté, la relation aux autres ou à la Terre, explique la prieure de Vanves. Il faut rendre à la terre sa beauté, son intégrité mais aussi sa dignité aux personnes qui travaillent pour nous». 

Une grande réflexion théologique, sociologique et philosophique a été lancée au sein du monastère sur la manière dont le monde s’est mis à accélérer, «comment on a mis la main sur le monde et donc sur la relation aux autres, et comment au lieu d’assimiler ce dont on a besoin, on consomme». L’idée étant de ne pas uniquement d’adopter des comportements vertueux mais «à la lumière de la Règle» de changer «notre être profond» souligne sœur Marie-Madeleine.

En cette période de confinement, une réflexion sur le rapport à l’autre et à la Création s’est amorcée, mais pas uniquement. La présidente de la Congrégation se demande ainsi comment guider neuf prieurés sur trois continents, sans pouvoir se déplacer. Elle n’a pas encore trouvé de réponse définitive à cette question de gouvernance mais se réjouit d’avoir appris avec ses sœurs à vivre le temps présent, «ce qui permet de vivre la Parole de Dieu au présent».

En novembre prochain, la Congrégation des bénédictines de Sainte Bathilde fêtera son centenaire, dans un mouvement d’ouverture. Un dixième prieuré naît en ce moment en Ethiopie et des bénédictines de la congrégation de Jésus Crucifié qui se trouvent en France, au Japon et aux Etats-Unis, pourraient les rejoindre à la faveur de l’Instruction “Cor Orans” publiée en 2018 pour l’application de la Constitution apostolique “Vultum Dei quærere” sur la vie contemplative féminine.

Entretien avec sœur Marie-Madeleine

 

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02 février 2021, 11:36