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Mgr Henri Teissier devant la cathédrale Notre-Dame-d'Alger, en 2004. Mgr Henri Teissier devant la cathédrale Notre-Dame-d'Alger, en 2004. 

Décès de Mgr Henri Teissier, archevêque émérite d’Alger

Mgr Henri Teissier est mort ce mardi 1er décembre 2020 au petit matin. Il avait été archevêque d’Alger de 1988 à 2008. La recherche de la fraternité a marqué la vie de cette figure centrale de l'Église en Algérie. Il a notamment accompagné les moines de Tibhirine et les autres religieux assassinés durant la guerre civile algérienne, puis promu leur cause de béatification.

Adélaïde Patrignani - Cité du Vatican 

Signe d’une espérance qui s’accomplit, le décès de Mgr Teissier est survenu le jour de la mémoire liturgique du bienheureux Charles de Foucauld, le «frère universel» en passe d’être canonisé, dont le témoignage a certainement nourri l’archevêque émérite d’Alger pour sa propre mission.

Une vie au service de l’Église d’Algérie

Mgr Henri Teissier, né à Lyon en 1929, fut ordonné prêtre à Alger en 1955 après des études au séminaire des Carmes à Paris. Il apprend l'arabe à l'Institut dominicain du Caire, où il assiste à la montée des nationalismes arabes, avant de revenir à Alger en 1958. Il fait partie de la vingtaine de prêtres (dont le cardinal Duval) qui obtiennent la nationalité algérienne en 1965. Nommé évêque d’Oran en 1973, puis coadjuteur à Alger du cardinal Duval à partir de 1981, c’est en 1988 qu’il succède à ce dernier à l’archevêché d’Alger, où il reste jusqu’en 2008. Depuis sa démission, présentée au Pape en raison de son âge, il partageait sa vie entre la France et Alger. Il est mort à Lyon, entouré de ses proches à l'hôpital Édouard-Herriot, après avoir fait un AVC la veille à son domicile. 

Mgr Teissier consacra donc 65 ans de son existence à l'Algérie. Une mission mêlant évangélisation, dialogue interreligieux, prière et accompagnement, menée dans un contexte politique et social souvent tourmenté, en particulier dans les éprouvantes “années noires” de la décennie 1990. Des dizaines de milliers d’algériens furent alors tués, dont plus de cent imams, et entre 1994 à 1996, dix-neuf martyrs chrétiens furent assassinés, parmi lesquels son confrère Mgr Pierre Claverie, évêque d’Oran, et les sept moines trappistes de Tibhirine.

La proximité et la fidélité dans l’épreuve

Proche de tous les chrétiens du diocèse, en particulier des communautés religieuses, il chemina avec eux dans le discernement - «rester ou partir ?» - tout en laissant à chacun sa liberté de choix.

Ainsi, en 1993, dans les jours qui suivirent le passage de maquisards du GIA à Tibhirine et le refus de leurs demandes par le père Christian de Chergé, Mgr Teissier vint plusieurs fois au monastère pour prier et partager avec les frères, en communauté et individuellement. La communauté décida de rester, et l’archevêque continua de lui être très proche. Cette amitié fut vécue jusque dans l’épreuve suprême. Après l’assassinat des moines - et celle, à des dates différentes, d’autres religieux -, Mgr Teissier organise les obsèques et le rapatriement des dépouilles. Il promeut ensuite leur cause de béatification, jusqu’à pouvoir enfin, le 8 décembre 2018, voir les 19 martyrs proclamés bienheureux à Oran, au sanctuaire Notre-Dame de Santa Cruz.  

Lui-même menacé à plusieurs reprises, Mgr Teissier choisit de demeurer en terre algérienne, poursuivant le ministère qui lui est confié. Les mots du père Jean Fisset, père Blanc missionnaire en Algérie, semblent traduire ce qui animait l’archevêque d’Alger: «Dieu est plus grand que notre cœur. Il nous invite à découvrir et susciter des frères».

«L'existence en Algérie d'une communauté chrétienne est la preuve que nous vivons dans une atmosphère de tolérance et que nous partageons les mêmes joies et les mêmes épreuves que les autres peuples de la planète», déclarait Mgr Teissier en 2005, témoignant par là son souci de construire la fraternité et la paix à l’école du Christ.

Un séjour à Rome en 2019

«Nous imaginons la belle rencontre avec Frère Charles, le bienheureux et futur saint dont c’est la fête au Ciel aujourd’hui», écrit ce 1er décembre Mgr Paul Desfarges, l’actuel archevêque d’Alger, dont les mots sont rapportés par La Croix«Clin d’œil du Ciel à notre Église d’Algérie qui doit tant au père Teissier dans son histoire, depuis la guerre de libération, l’indépendance du pays, la traversée des années noires, jusqu’aujourd’hui.»

En mai 2019, Mgr Henri Teissier, de passage à Rome, était venu dans nos studios. Interrogé par Olivier Bonnel, il nous avait parlé de la fécondité de la vie des martyrs d’Algérie, et confiait ses espoirs pour les chrétiens et les musulmans d'aujourd'hui, dans une Algérie en pleine mutation:

Entretien avec Mgr Henri Teissier, en mai 2019

(avec moines-tibhirine.org, eglise-catholique-algerie.org)

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01 décembre 2020, 12:25