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2020.04.28 Le cardinal Maurice Piat 2020.04.28 Le cardinal Maurice Piat  

Le cri d’alarme du cardinal Piat face aux plaies de l'île Maurice

Dans un message diffusé dimanche 2 avril sur la chaine mauricienne MBC Senn Kreol, le cardinal Maurice Piat a fait part de son inquiétude face aux maux qui dégradent la beauté et la dignité du pays. En ce début de Semaine Sainte, l’évêque de Port-Louis appelle les mauriciens à être des artisans de paix et de justice.

Christian Kombe, SJ – Cité du Vatican

Alors que commence la Semaine Sainte, le cardinal Maurice Piat a exprimé sa tristesse face au visage défiguré de l’île Maurice. Dans un message diffusé en créole le dimanche des Rameaux et de la Passion, l’évêque de Port-Louis a comparé sa tristesse à celle de Jésus devant Jérusalem, dont les habitants «n’ont pas compris son message de paix». Comme Jésus, le prélat est triste et pleure en regardant son pays, affirme-t-il, en voyant l’indépendance des institutions menacée et les fondations de la démocratie ébranlée. Si «tout le monde désire et recherche la paix dans notre pays», celle-ci est compromise par divers maux qui gangrènent l’île de l’océan Indien.

Trafic de drogue et corruption

«Je suis triste et inquiet pour mon pays lorsque je vois que l’injustice et la corruption sont tolérées», a confié le cardinal Piat, s’arrêtant particulièrement sur le dossier qui secoue l’actualité mauricienne, du trafic de drogue dans l’axe entre l’île française de la Réunion et Maurice. L’évêque de Port-Louis déplore l’inaction des autorités mauriciennes à réagir avec célérité et à collaborer avec la Réunion, faisant traîner le dossier transmis par la Réunion pendant un an et demi. «Pendant ce temps, imaginons la quantité de drogue qui est rentrée à Maurice, le nombre de jeunes qui ont vu leur vie détruite à cause de ça, combien de papas et de mamans pleurent et souffrent?»

Pour le prélat mauricien, «la confiance est la clé pour la stabilité sociale dans un pays». Or, la corruption qui sévit dans l’île «menace sérieusement l’indépendance de la police et malheureusement – même s’il y a de bons éléments intègres dans la police – la confiance de la population envers les forces de l’ordre est ébranlée», regrette-t-il.

Ne pas rester au balcon

Cependant, si Jésus contemple et pleure sur Jérusalem du haut de la montagne, «il ne reste pas en haut», souligne le cardinal Piat. «Il descend dans la ville pour rejoindre son peuple». En ce début de Semaine Sainte, c’est une invitation à imiter le grand sens de responsabilité et l’amour de Jésus que lance l’ordinaire de Port-Louis: ne pas rester à regarder ce qui se passe du haut de notre balcon, ou se contenter de partager des commentaires sur les réseaux sociaux. Les fidèles mauriciens doivent cesser d’être spectateurs pour devenir des acteurs et apporter leur contribution pour la paix dans le pays, a exhorté le cardinal Maurice Piat. «Nous devons le faire par amour pour notre patrie, pas pour notre intérêt personnel. Sans l’amour de notre pays, sans engagement de notre part, notre pays sombrera», a-t-il insisté.

Contre le racisme, valoriser la diversité

Dans son message, l’évêque de Port-Louis n’a pas manqué de mettre en garde contre le racisme. Il a aussi exhorté à préserver et à valoriser la diversité mauricienne. «Comment pouvons-nous avoir la paix lorsqu’une communauté est insultée par un chant méprisant à leur encontre?» a-t-il interrogé, faisant allusion à une vidéo qui montrait des élèves d’une école entonner une chanson raciste. Le cardinal Piat invite ainsi les mauriciens à être acteurs d’un changement positif, en développant «un sentiment d’appartenance au peuple mauricien», en aimant «ce peuple et toutes ses composantes, avec ses différences, ses faiblesses, ses valeurs». La diversité humaine de l’île est sa richesse, a-t-il souligné.

«Même si nous avons des origines ethniques différentes, même si nos ancêtres ont débarqué à Maurice dans des conditions différentes – certains dans la souffrance et d’autres dans de meilleures conditions -, chaque groupe a contribué, à sa manière, à la construction du pays».

Il revient aux chrétiens de préserver cette diversité, de montrer «qu’une autre île Maurice est possible, lorsqu’un accueil mutuel entre communautés, une solidarité, un travail en commun sont possibles et existent».

Porter la croix avec espérance

Par ailleurs, comme pour Jésus, l’engagement pour la paix est aussi un chemin de croix, a rappelé le cardinal mauricien. «Si aujourd’hui, nous aussi désirons que notre pays retrouve sa dignité et si nous décidons de descendre sur le terrain, de travailler pour la paix et la justice, il y aura des personnes qui ne seront pas contentes; nous aurons besoin de porter notre croix nous aussi», a-t-il souligné, invitant à s’engager sur le chemin de la paix et de la justice avec confiance, à l’instar de Jésus.

«À l’approche de Pâques, demandons à Jésus de réveiller en nous ce sens du service pour notre peuple et ce désir de marcher ensemble», a-t-il conclu.

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03 avril 2023, 17:18