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Le Pape François et le patriarche Tawadros II lors de leur rencontre en Égypte, le 28 avril 2017. Le Pape François et le patriarche Tawadros II lors de leur rencontre en Égypte, le 28 avril 2017.  Les dossiers de Radio Vatican

Le patriarche copte orthodoxe Tawadros II attendu au Vatican

Le patriarche copte orthodoxe d'Alexandrie Tawadros II se rend à Rome du 9 au 14 mai, dix ans après sa rencontre avec le Pape François et cinquante ans après la première rencontre entre un Pape et un patriarche copte orthodoxe depuis le concile de Chalcédoine.

Entretien réalisé par Jean-Charles Putzolu - Cité du Vatican

Du 9 au 14 mai, le patriarche copte orthodoxe d'Alexandrie Tawadros II sera à Rome et au Vatican pour célébrer la journée de l'amitié entre coptes et catholiques. Cette journée est célébrée chaque année le 10 mai en souvenir de la rencontre historique entre le Pape Paul VI et le patriarche Chenouda III, le 10 mai 1973.

François et Tawadros II se rencontreront eux pour la troisième fois, après une première visite à Rome du patriarche orthodoxe le 10 mai 2013, et la visite que l’évêque de Rome lui avait rendue le 28 avril 2017, à l’occasion de son voyage apostolique en Égypte; rencontre au cours de laquelle les deux responsables religieux avaient signé une déclaration commune.

Dans un entretien accordé à Radio-Vatican Vatican News, le père Hyacinthe Destivelle, official du dicastère pour la promotion de l'Unité des chrétiens, souligne l'importance de cette visite pour les relations entre les deux Églises.

Quelle importance revêt cette visite?

C'est une visite très importante puisque nous célébrons les cinquante ans de la première rencontre entre un patriarche d'Alexandrie, donc un patriarche de l'Église orthodoxe copte et un évêque de Rome. Cette première a eu lieu le 10 mai 1973 et elle a constitué un tournant dans les relations entre l'Église orthodoxe et l'Église catholique. Nous célébrons aussi les dix ans de la première visite du patriarche Tawadros II le 10 mai 2013, quelques mois après l'élection du Pape François et du patriarche. Cette visite de 2013 commémorait déjà la première rencontre entre Chenouda III et Paul VI. C'était la première visite à l'étranger du patriarche Chenouda III, et la première fois aussi qu'il rencontrait un chef d'Église à l'étranger. C'était une visite importante.

Cette visite marquera-t-elle un pas de plus en direction de l'unité?

L’unité se fait en chemin, comme le dit souvent le Pape François. Et cette visite va certainement marquer une étape importante sur ce chemin commun que nous avons entamé avec l'Église copte depuis le Concile Vatican II, puisque c'est à l'occasion du Concile Vatican II qu'on a repris les contacts avec l'envoi d'observateurs de la part du patriarche. À l'époque, c'était le patriarche Cyrille VI, qui avait répondu positivement à l'invitation du Pape Jean XXIII, d'envoyer des observateurs à toutes les sessions du Concile. Et ensuite il y a eu en 1968 la restitution des reliques de saint Marc qui avaient été volées par des marchands vénitiens au IXe siècle et finalement restituées à l'initiative du Pape Paul VI, pour être placé dans l'autel majeur de la nouvelle cathédrale orthodoxe copte du Caire. Ensuite, il y a eu en 1973, cette fameuse visite que j'ai déjà mentionnée, la première rencontre à Rome entre un patriarche de l'Église copte et un évêque de Rome depuis la rupture de 451, c'est à dire la rupture du concile de Chalcédoine, après lequel nos Églises sont restées pratiquement sans contact pendant 1 500 ans. L’année 1973, année de la reprise des relations, a permis de lancer une commission mixte qui a travaillé jusqu'à la fin des années 1980 et qui ensuite a été intégrée à une commission plus large avec les Églises orthodoxes orientales, qui font maintenant partie d'une commission mixte de dialogue entre l'Église catholique et l'ensemble de ces Églises qui reconnaissent les trois premiers conciles œcuméniques.

Au cours des cinq jours de visite, plusieurs rendez-vous sont programmés, quels détails pouvez-vous donner?

Le patriarche Tawadros II vient en pèlerinage et sa première visite sera à la tombe de saint Pierre, puisqu'il vient aussi pour faire mémoire des relations privilégiées qui existent entre le siège de saint Pierre et le siège de saint Marc, qui est celui d'Alexandrie. Pierre et Marc étant deux apôtres avec un lien très fort puisque Marc était le disciple de saint Pierre. Ensuite, le 10 mai qui est un mercredi, à la fois jour de l'audience générale et jour de l'amitié copte catholique, le patriarche sera non seulement présent à côté du Pape, mais il prendra aussi la parole. Et puis, le lendemain, il y aura une audience privée avec un temps de prière commun pour la paix dans la chapelle Redemptoris Mater.

Mais le patriarche vient aussi rendre visite à ses fidèles, et il y a un très grand nombre de fidèles orthodoxes en Italie; ils sont environ de 100 000, pour lesquels il a fallu trouver une église qui puisse accueillir ceux qui viendront pour cette liturgie dominicale du 14 mai. Le patriarche copte célébrera dans la basilique Saint Jean du Latran, et il recevra aussi la veille les fidèles coptes pour avoir une sorte de catéchèse avec eux.

Ce n'est pas commun une liturgie orthodoxe à saint-Jean de Latran... 

Ce n'est pas commun, mais ce n'est pas nouveau qu'un patriarche célèbre dans une basilique papale, puisque le même patriarche Tawadros avait célébré en 2018 dans la basilique saint Paul-hors-les murs. Et puis, il y a une tradition très ancienne, lorsque les patriarches d'Orient venaient à Rome, on leur attribuait des basiliques pour qu'ils puissent célébrer. La basilique Saint-Pierre de Rome était attribuée au patriarche de Constantinople, Sainte-Marie-Majeure au patriarche d'Antioche, Saint-Paul hors les murs, au patriarche d'Alexandrie. Il y a donc une tradition ancienne, et on parle même de basilique patriarcale. Pas seulement parce que le Pape était, selon son titre, patriarche d'Occident, mais aussi parce que les patriarches d'Orient venaient célébrer. Le prêt d'Église, est une chose qui est non seulement autorisée par le Directoire œcuménique, mais qui est recommandée, qui peut permettre un certain rapprochement des chrétiens. Le Directoire œcuménique indique d’ailleurs au paragraphe 137 que «si des prêtres, des ministres ou des communautés qui ne sont pas en pleine communion avec l'Église catholique n'ont pas d'endroit, ni les objets liturgiques nécessaires pour célébrer dignement leurs cérémonies religieuses, l'Évêque du diocèse peut leur permettre d'utiliser une église ou un édifice catholique, et aussi leur prêter ces objets nécessaires pour leurs services». Ceci est également expliqué au point 33 du vadémécum œcuménique. Par ailleurs, l'Église copte orthodoxe est une Église apostolique dont les sacrements sont reconnus par l'Église catholique et qui partage la même conception de l'Eucharistie et du sacerdoce.

Il a donc été décidé de prêter la cathédrale Saint-Jean-de-Latran pour accueillir une célébration et les fidèles coptes orthodoxes. Évidemment, le patriarche ne célèbrera pas à l'autel papal, il célébrera sur un autel spécial qui sera aménagé spécialement, comme cela avait été le cas en 2018, lorsqu'il avait célébré à saint-Paul hors les murs.

La basilique Saint-Jean-de-Latran est-elle ouverte à toutes les confessions chrétiennes?

La basilique, traditionnellement œcuménique, est Saint-Paul-hors les murs. Très clairement, c'est là qu'a été annoncé le Concile Vatican II, dont l'un des objectifs était le rétablissement de l'unité des chrétiens. C'est là que sont célébrées tous les ans, le 25 janvier, les deuxièmes vêpres de la fête de la conversion de saint Paul. En ce qui concerne Saint-Jean-de-Latran, il peut y avoir, comme ces derniers jours, un malentendu de temps en temps sur des célébrations des groupes qui se présentent. Mais en principe, la célébration d'autres chrétiens doit être dûment approuvée. Dans le cas du patriarche Tawadros, la célébration de la Divine Liturgie a été tout à fait autorisée parce qu'il s'agit d'un événement historique. Encore une fois, on fête les 50 ans de la première rencontre entre un évêque de Rome et un patriarche d'Alexandrie, rencontre qui a mis fin à 1500 ans de séparation. Et surtout, il s'agit d'une célébration qui va rassembler plusieurs milliers de fidèles.


Peut-on penser que le Pape François et le patriarche puissent prier ensemble pour les martyrs des églises d'Orient, qui ont payé un prix élevé au cours de l'histoire pour le témoignage de la foi?

Je pense que l’œcuménisme du sang, comme l'appelle le Saint-Père, sera certainement au cœur des discussions et des discours, puisqu'on appelle l'Église copte, l'Église des martyrs. Tout le monde a en tête ces fameux 21 martyrs décapités sur une plage de Libye, près de Syrte. Et le Pape François, dans un message vidéo, il y a deux ans, a dit à l'occasion de l'anniversaire de la commémoration liturgique puisqu'ils sont commémorés dans le martyrologe copte le 15 février, qu’ils étaient nos martyrs, les saints de toutes les confessions. L'œcuménisme des martyrs et l’œcuménisme des saints sera au cœur de cette rencontre.

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22 avril 2023, 12:50