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Prédication du cardinal Raniero Cantalamessa le 31 mars 2023. Prédication du cardinal Raniero Cantalamessa le 31 mars 2023.   (Vatican Media)

Cardinal Cantalamessa: ce qui unit est plus important que ce qui divise

Quelques jours avant la Semaine sainte, le prédicateur de la Maison pontificale, le cardinal Raniero Cantalamessa dans sa cinquième prédication de Carême faite ce vendredi 31 mars, est revenu sur la présence de Jésus dans les moments de tempête, soulignant également «qu'une partie de la faiblesse de notre évangélisation et de notre action» dans le monde, est due à la «division et à la lutte mutuelle entre chrétiens».

Myriam Sandouno - Cité du Vatican  

«Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage! Moi, je suis vainqueur du monde», ainsi Jésus s’adressa à ses disciples, avant de les quitter. En effet, il ajouta: «Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous». Que signifie «je reviens vers vous» s'il est sur le point de les quitter? De quelle manière et à quel titre viendra-t-il demeurer auprès d'eux?, s’interroge le cardinal Raniero Cantalamessa, soulignant que si «l’on ne comprend pas la réponse à cette question, on ne comprendra jamais la vraie nature de l'Église».

Poursuivant, il met l’accent sur quelques versets bibliques de saint Jean qui évoquent la venue de l’Esprit Saint, notamment: «J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l'instant vous ne pouvez pas les porter. Quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. En effet, ce qu'il dira ne viendra pas de lui-même: mais ce qu'il aura entendu, il le dira; et ce qui va venir, il vous le fera connaître. Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître».

Est-ce lui-même, Jésus, ou un autre?

Dans sa réflexion le cardinal Cantalamessa met en lumière «le mystère de la relation entre le Ressuscité et son Esprit». Une relation si étroite et si mystérieuse, affirme le prédicateur de la Maison pontificale, que saint Paul semble parfois les identifier: «Or, le Seigneur, c'est l'Esprit, et là où l'Esprit du Seigneur est présent, là est la liberté».

Selon l'Écriture, note le cardinal capucin, l'Esprit Saint par la rédemption, est devenu «l'Esprit du Christ »; c'est, dit-il, la manière dont le Ressuscité agit désormais dans l'Église et dans le monde, ayant «été, selon l'Esprit de sainteté, établi dans sa puissance de Fils de Dieu par sa résurrection d'entre les morts». C'est pourquoi, explique le cardinal, il peut dire aux disciples: «Il vaut mieux pour vous que je m'en aille» et ajouter: «Je ne vous laisserai pas orphelins».

Jésus, jamais absent

Le cardinal invite à accorder une importance particulière à ces dernières paroles de Jésus dans le livre de Matthieu: «Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde», rassurant que dans les moments de tempête, aujourd'hui encore, il répète ce qu'il a dit à ses apôtres dans l'épisode de la tempête apaisée: «Pourquoi êtes-vous si craintifs, hommes de peu de foi? Ne suis-je pas avec vous? Puis-je sombrer? Celui qui a créé la mer peut-il sombrer dans la mer?».

Parlant de l'annuaire pontifical, il explique que sous le nom du Pape, il n'y a qu’un seul titre «Évêque de Rome»; tous les autres titres - Vicaire du Christ, Souverain pontife de l'Eglise universelle, Primat d'Italie, etc. - sont repris comme «titres historiques» à la page suivante. «Cela me semble juste, lance-t-il, surtout en ce qui concerne Vicaire du Christ». Le vicaire est celui qui supplée en l'absence du chef, mais, précise-t-il «Jésus-Christ ne s'est jamais absenté et ne s'absentera jamais de son Église». Lorsque «nous disons de Jésus qu'il est présent «spirituellement», cette présence spirituelle n'est pas une forme inférieure à la présence physique, mais elle est infiniment plus réelle et efficace», relève le cardinal Cantalamessa, soulignant qu’il est par sa mort et sa résurrection, devenu «la tête du corps, la tête de l'Église» et il le restera jusqu'à la fin du monde: le vrai et unique Seigneur de l'Église, renchérit-il.


L’Esprit Saint, une source d’énergie

«C'est la présence de Jésus ressuscité qui agit dans la puissance de l'Esprit, qui agit en tout temps et en tout lieu, et agit à l’intérieur de nous», déclare le cardinal. Pour lui, si dans la situation actuelle de crise énergétique croissante, on découvrait l'existence d'une nouvelle source d'énergie inépuisable, si l'on découvrait enfin comment utiliser l'énergie solaire à volonté et sans effets négatifs, «quel soulagement ce serait pour toute l'humanité!», dit-il. En ce qui concerne l’Église, elle possède, dans son domaine, affirme le cardinal, «une source d'énergie inépuisable de ce type, la force d'en haut qu'est l'Esprit Saint». Jésus a pu dire de lui: «Jusqu'à présent vous n'avez rien demandé en mon nom; demandez, et vous recevrez: ainsi votre joie sera parfaite».

L’oracle du prophète Aggée

Le cardinal dans son intervention met en évidence l’oracle d'Aggée dans lequel le Seigneur par l’intermédiaire du prophète Aggée, déclarait: «Et pour vous, est-ce bien le temps d'être installés dans vos maisons luxueuses, alors que ma Maison est en ruine?». Quelles sont pour nous aujourd'hui «les maisons luxueuses» dans lesquelles nous sommes tentés de demeurer tranquille?, s’interroge le cardinal, affirmant ensuite y apercevoir «trois maisons concentriques», l'une dans l'autre, «d'où nous devons sortir pour gravir la montagne et reconstruire la maison de Dieu».

Les maisons couvertes

Le «moi» selon le prélat est «la première maison» bien couverte, soignée et meublée, ce petit confort, «ma gloire, ma position» dans la société ou dans l'Église. Il reste le mur le plus difficile à abattre. «Il est si facile de confondre mon honneur avec celui de Dieu et de l'Église, l'attachement à mes idées avec l'attachement à la vérité pure et simple», souligne-t-il tout en notant que «nous sommes dans notre coquille, comme le ver à soie dans la sienne: autour, il y a toute la soie, mais si le ver à soie ne brise pas la coquille, il restera chenille et ne deviendra jamais un papillon qui vole».

La deuxième maison bien couverte reste la «maison du Seigneur»: «c'est ma paroisse, mon ordre religieux, mon mouvement ou mon association ecclésiale, mon Église locale, mon diocèse...». «Malheur si nous n'avions aucun amour ni attachement à ces réalités particulières dans lesquelles le Seigneur nous a placés et dont nous sommes peut-être responsables», lance le cardinal. Le mal ajoute-t-il est de les absolutiser, de ne voir rien d'autre en dehors d'elles, de ne s'intéresser qu'à elles, en critiquant et en méprisant ceux qui ne la partagent pas. De perdre de vue, en somme, la catholicité de l'Église. D’oublier, comme le dit souvent le Saint-Père, que «le tout est supérieur à la partie». Le prédicateur rappelle que «nous sommes un seul corps, le corps du Christ, et dans le corps, dit Paul, «si un seul membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance». Il estime que le Synode devrait également servir à cela: «nous rendre conscients et participants des problèmes et des joies de toute l'Église catholique».

La division entre chrétiens 

Et concernant la troisième maison, la confession chrétienne particulière «à laquelle nous appartenons», le cardinal Cantalamessa note «qu'une partie de la faiblesse de notre évangélisation et de notre action» dans le monde est dûe à la «division et à la lutte mutuelle entre chrétiens». L’on se souvient encore des paroles de Jésus à Pierre: «Sur cette pierre, je bâtirai mon Église». Il n'a pas dit, souligne-t-il: «Je bâtirai mes Églises». Il doit y avoir un sens dans lequel, ce que Jésus appelle «mon Église», englobe tous les croyants en lui et tous les baptisés, pense-t-il. «L'apôtre Paul a une formule qui pourrait remplir cette tâche d'englober tous ceux qui croient au Christ». Au début de la première lettre aux Corinthiens, il adresse sa salutation: «à tous ceux qui, en tout lieu, invoquent le nom de notre Seigneur Jésus Christ, leur Seigneur et le nôtre».

«Nous ne pouvons pas  mépriser et ignorer cette unité fondamentale qui consiste à invoquer le même Seigneur Jésus-Christ. Celui qui croit au Fils de Dieu croit aussi au Père et à l'Esprit Saint». Ce qui a été répété à plusieurs reprises est tout à fait vrai, reconnaît le cardinal pour conclure: «ce qui nous unit est plus important que ce qui nous divise».

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31 mars 2023, 10:40