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Procès au Vatican: de nouveaux éléments éclairent les débats

L’interrogatoire de Mgr Perlasca, ancien chef du Bureau administratif de la Secrétairerie d'État et témoin clé du procès de l’immeuble de Sloane Avenue, s’est poursuivi ce mercredi. L’audience a été marquée par le dépôt de nouveaux éléments qui pourraient éclairer les conditions dans lesquelles il a rédigé le mémorandum accusant le cardinal Becciu.

Salvatore Cernuzio - Cité du Vatican

«Un élément nouveau» a été présenté à la cour lors de l’audience de ce mercredi, la trente-neuvième du procès pour la gestion des fonds du Saint-Siège. Le promoteur de justice, Alessandro Diddi, a fourni au président du tribunal, Giuseppe Pignatone, un échange de chat Whatsapp entre Francesca Immacolata Chaouqui et Genoveffa Ciferri, déjà mentionnée dans le procès comme une «amie» de Mgr Alberto Perlasca. Elle s’était présentée au cardinal Becciu comme un ancien membre des services secrets et l’aurait même menacé. Cet élément nouveau a provoqué l’ouverture d’une nouvelle enquête et Genoveffa Ciferri sera entendue lors de l’audience du 2 décembre.

Le promoteur de justice a reçu ce matériel dans la nuit de samedi à dimanche sur son «compte d’utilisateur privé». Il s’agit de 126 messages à partir desquels Alessandro Diddi a extrapolé certains messages entre les deux femmes et qui l’ont convaincu d’ouvrir une nouvelle enquête. Le magistrat a en outre précisé avoir été contacté personnellement à plusieurs reprises par Genoveffa Ciferri au cours des deux dernières années, qui lui a «relaté certains événements rapportés dans une note de service».

Qui est derrière le mémorandum de Mgr Perlasca?

Ces messages permettraient de comprendre qui a aidé Mgr Perlasca à rédiger sous forme de questions-réponses son mémorandum du 31 août 2020 dans lequel il accuse, entre autres, le cardinal Becciu, une question laissée sans réponse lors de la dernière audience. Mgr Perlasca s’était en effet borné à répondre «je ne me souviens pas», risquant de se voir accusé de «faux témoignage». Or, dans ces échanges, «il y a une série de message de Ciferri qui affirme avoir suggéré la rédaction du mémorandum de Perlasca et que les thèmes lui ont été suggérés par Chaouqui», a précisé le président du tribunal.

Mgr Perlasca a alors expliqué que les réponses rédigées dans son document étaient les siennes, mais que «les thèmes ont été formulées par Ciferri», qu’il avait présenté en d’autres occasions comme «une amie de la famille». «Elle m’avait dit que son interlocuteur était un conseiller juridique, un magistrat âgé qui s’était rendu disponible. Vendredi soir, en partant d’ici, la première chose que j’ai faite a été de lui téléphoner et de lui dire: vous devez bien m’expliquer les choses. Et elle m’a dit que c’était Chaouqui». Mgr Perlasca a assuré n’avoir jamais eu de contacts directs avec cette dernière.

Pendant environ trois heures encore, l'ancien chef du Bureau administratif de la Secrétairerie d'État a été interrogé par la défense, notamment sur la série d'événements qui ont conduit à la vente de l’immeuble de Londres, sur les accords passés, sur son insistance à dénoncer Torzi, sur les médailles d'or et de bronze, sur ses échanges avec les différentes personnes qui, marginalement ou directement, tournaient autour de l'affaire.

Des lettres blanches signées

Deux autres témoins ont été interrogés: Antonio Di Iorio, notaire de la Chambre apostolique, et Fabio Perugia, ancien porte-parole de la Communauté juive de Rome, consultant financier et promoteur du fonds Valeur Group. Antonio Di Iorio devait rendre compte de l’existence d’un document d'authentification totalement vierge portant la signature du substitut de la Secrétairerie d'État, Mgr Edgar Peña Parra, que l'ancien fonctionnaire Fabrizio Tirabassi et Mgr Mauro Carlino (tous deux accusés) lui auraient demandé de signer «d'urgence» pendant l'été, en tant que notaire. Di Iorio a signé sans vérifier, certain que l'adjoint en avait besoin. Il a dû aussi expliquer pourquoi il avait signé, toujours sur demande urgente de Mgr Perlasca, une lettre au courtier Gianluigi Torzi qui semble être liée aux mille actions avec droit de vote sur l’immeuble londonien, actions qui auraient ensuite été vendues par Torzi au Saint-Siège pour 15 millions, en guise, selon l'accusation, d'extorsion.

Le deuxième témoin entendu ce mercredi, Fabio Perugia, fut pendant un court moment partenaire de Gianluigi Torzi dans une société de cash-back qu’il a quitté précisément à cause du comportement du courtier: «Il n'était pas fiable, il gérait les choses de manière confuse». Fabio Perugia a déclaré que le groupe Valeur avait proposé de résoudre la situation à Londres qui mettait le Saint-Siège «en danger». Et il a réitéré les informations rapportées à l'époque par certaines de ses connaissances professionnelles sur un prétendu «axe» entre Tirabassi et Enrico Crasso, conseiller financier de la Secrétairerie d'État, par lequel Tirabassi aurait détourné les investissements du Saint-Siège vers le Crédit Suisse, dont Crasso était un dirigeant. En contrepartie, Tirabassi a obtenu des honoraires. Le témoin a rappelé qu'on lui avait dit que certains de ces frais «étaient gérés à Saint-Domingue». Il a toutefois déclaré ne pas se souvenir à qui il faisait référence lorsqu'interrogé en 2020 par le promoteur de Justice, il a parlé d'une «bande Bassotti» dans les murs du Vatican.

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01 décembre 2022, 11:39