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Saint Oscar Romero, martyr

Un choix « sûr »

Au Salvador, un pays où une riche oligarchie gouverne une population majoritairement de pauvres sans terre, caractérisé par l'instabilité économique et les troubles politiques, Oscar Arnulfo Romero y Galdamez (né en 1917) a reçu une formation de charpentier. À l'âge de 13 ans, le jeune homme - calme et studieux - a déclaré qu'il voulait devenir prêtre. Oscar entre au séminaire et part quelques années plus tard pour Rome, où il termine ses études et est ordonné prêtre en 1942.

De retour chez lui, le père Romero devient curé de paroisse, puis recteur de séminaire et enfin évêque auxiliaire, tandis que sur l'horizon politique salvadorien, les nuages s'alourdissent de plus en plus. Les forces gouvernementales, les groupes paramilitaires et la guérilla deviennent de plus en plus violents. De nombreux groupes de pauvres opprimés commencent à s'organiser, dénonçant la misère dans laquelle ils vivent. Dans ce climat, Oscar Romero est nommé archevêque de San Salvador en 1977 : un choix considéré comme « sûr ». Comment un intellectuel conservateur qui parle de sainteté pourrait-il déranger qui que ce soit ?

L'heure difficile

Trois semaines après son installation, l'ami de Mgr Romero, le père Rutilio Grande, qui aide les agriculteurs pauvres, est assassiné avec un agriculteur âgé et un jeune garçon. Les corps sont exposés dans la cathédrale. Plus tard, Oscar Romero dira : « En regardant Rutilio étendu là, mort, j'ai pensé que je suivrais moi aussi le même chemin ». Une étincelle s’allume alors pour le nouvel évêque qui commence à comprendre ce qu'implique cette sainteté à laquelle il aspirait étant jeune homme.

Le père Rutilio n'était pas la seule personne assassinée en toute impunité au Salvador au cours de ces années. Des personnes disparaissent chaque jour ; les paysans sont terrorisés ; les prêtres et les agents pastoraux qui veulent aider les pauvres sont torturés ou tués. L'archevêque silencieux élève sa voix. Il dénonce le gouvernement de droite et les guérillas de gauche. Il dénonce même le gouvernement américain qui fournit les armes avec lesquelles son peuple est tué. Ses homélies, dans lesquelles il fournit une liste hebdomadaire de personnes disparues, torturées ou tuées, ont une audience supérieure à celle de tout autre programme radiophonique du pays.

C'est une heure difficile et, comme le dit l'archevêque, « l'authenticité d'un chrétien se voit à l'heure de la difficulté... Bénis soit le Seigneur pour cette heure difficile dans notre archidiocèse. Demandons à en être dignes ! ».

Le courage

Mgr Romero prend ses propres mots au pied de la lettre, et peut-être que Dieu en fait de même. Dans l'Évangile, cet évêque trouve un courage plus grand que le courage humain et des mots plus éloquents que toute parole inspirée par l'homme. Ses homélies parlent de « l'unique Église », des riches et des pauvres sans distinction, « de cette Église que Jésus a prêchée... à laquelle nous devons donner tout notre cœur ». Il prône une « réforme intérieure surnaturelle » qui ne se traduit pas par une lutte armée et qui, cependant, comme l'Évangile, a sans aucun doute des répercussions concrètes sur l'homme.

L'archevêque est conscient que ces mêmes soldats qui torturent et tuent son peuple sont pour la plupart des chrétiens. Il est aussi leur pasteur et peut donc s'adresser à eux avec l'autorité qui lui vient du Seigneur. Le 23 mars 1980, il prononce à la radio un sermon par lequel il s'adresse directement à eux : « Aucun soldat n'est obligé d'obéir à un ordre contraire à la loi de Dieu... Le moment est venu pour vous de retrouver votre conscience... C'est pourquoi, au nom de Dieu et au nom de ce peuple qui souffre depuis trop longtemps, et dont le cri monte au ciel chaque jour plus fort, je vous implore, je vous supplie, je vous ordonne : au nom de Dieu, arrêtez la répression ! ».

Il sait qu'il ne peut pas prononcer ces mots et continuer à vivre...

Le grain de blé

Le 24 mars, l'archevêque participe à une retraite spirituelle pour les prêtres. Lors de la messe célébrée le soir, il dit : « Ceux qui se livrent au service des pauvres à travers l'amour du Christ vivront comme le grain de blé qui meurt... ». Après l'homélie, il s'approche de l'autel. Un homme armé entre dans l'église et tire.

Oscar Romero devient ce grain de blé, offrant son sang pour la « rédemption et la résurrection » de son peuple. En 2018, portant la ceinture tachée de sang que Mgr Romero portait lors de cette dernière messe, le Pape François déclare Saint cet évêque martyr.