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Val d'Aoste, Italie. Val d'Aoste, Italie.  

Le Pape exhorte à mettre fin à la guerre insensée contre la Création

Dans son message en vue de la Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, le 1er septembre prochain, le Pape François plaide pour une transformation des cœurs, des modes de vie et des politiques publiques. Le Temps œcuménique de la Création a cette année pour thème «Que la justice et la paix jaillissent». Le message a été rendu public jeudi 25 mai en cette semaine Laudato si’.

Delphine Allaire – Cité du Vatican

Filant la métaphore du fleuve, nourri par l’un de ses récents voyages apostoliques au Canada à l’été 2022, le Pape François a évoqué le thème de cette «saison de la Création» 2023, l’alliance de la justice et de la paix comme «un courant inépuisable d’eau pure», nécessaire à l’humanité et à ses créatures.

«En ce Temps de la Création, attardons-nous sur ces battements de cœur: les nôtres, ceux de nos mères et de nos grands-mères, les battements de cœur de la création et du cœur de Dieu», a souhaité le Pape, en référence au lac Sainte-Anne dans l’Alberta (Canada), lieu de pèlerinage et de guérison pour les peuples autochtones. 

Selon François, ces battements ne sont pas en harmonie aujourd’hui, ils ne battent pas ensemble dans la justice et la paix.«Trop de gens sont empêchés de s’abreuver à ce fleuve puissant», a-t-il déploré, invitant à écouter l’appel «à être aux côtés des victimes de l’injustice environnementale et climatique, et à mettre fin à cette guerre insensée à la création».

Consumérisme rapace, industries prédatrices

Les effets de cette guerre se perçoivent «en beaucoup de fleuves qui s’assèchent», a observé François convoquant les enseignements du Pape vert qu’était Benoît XVI: «Les déserts extérieurs se multiplient dans notre monde, parce que les déserts intérieurs sont devenus très grands». Et le Pape argentin de dénoncer clairement «le consumérisme rapace, alimentée par des cœurs égoïstes», qui bouleverse le cycle d’eau de la planète; «l’utilisation effrénée des combustibles fossiles et l’abattage des forêts entraînant une hausse des températures et de graves sécheresses»; le Saint-Père regrette aussi les pénuries d’eau, les industries prédatrices «épuisant et polluant» les sources d’eau potable «par des pratiques extrêmes telles que la fracturation hydraulique pour l’extraction du pétrole et du gaz, les projets de méga-extraction incontrôlée et l’élevage intensif d’animaux». «Sœur eau», comme l’appelle François d’Assise, se trouve pillée et transformée en «marchandise sujette aux lois du marché».

Transformer les cœurs, les modes de vies, les politiques

Faisant allusion nommément dans son discours aux travaux du GIEC, le Pape interroge: «Que pouvons-nous faire, en particulier en tant qu’Églises chrétiennes, pour restaurer notre maison commune afin qu’elle grouille à nouveau de vie?»

La réponse se situe selon lui dans la transformation des cœurs, des modes de vie et des politiques publiques. Le Pape s’appuie là sur Jean-Paul II et son exhortation à la conversion écologique: «Le renouvellement de notre relation avec la création, de sorte que nous ne la considérions plus comme un objet à exploiter, mais que nous la chérissions comme un don sacré du Créateur». François plaide pour une approche d’ensemble exigeant le respect écologique dans quatre directions: envers Dieu, envers nos semblables d’aujourd'hui et de demain, envers l’ensemble de la nature et envers nous-mêmes.

Création et Rédemption inséparables

En ce qui concerne la première de ces dimensions, Benoît XVI a identifié un besoin urgent de comprendre que la Création et la Rédemption sont inséparables, rappelle le Pape.

En effet, la création fait référence «au mystérieux et magnifique acte de Dieu qui consiste à créer cette majestueuse et belle planète et cet univers à partir de rien», ainsi qu’au résultat de cet acte, toujours en cours, «que nous expérimentons comme un don inépuisable». En d’autre termes, dans la «grande cathédrale de la création», «nous nous souvenons du Grand Artiste qui crée tant de beauté et nous réfléchissons au mystère du choix amoureux de créer le cosmos».

Une sobriété joyeuse

Deuxièmement, les modes de vie. «Partant de l’admiration reconnaissante du Créateur et de la création, repentons-nous de nos “péchés écologiques”, comme le dit mon frère, le patriarche œcuménique Bartholomée», exhorte François, recommandant «avec l’aide de la grâce de Dieu», d’adopter des modes de vie «avec moins de gaspillage et moins de consommation inutile, en particulier là où les processus de production ne sont pas durables et toxiques».

Le Pape invite aussi chacun à être attentifs le plus possible à ses habitudes et choix économiques, «en faisant un usage le plus modéré possible des ressources, en pratiquant une sobriété joyeuse, en éliminant et en recyclant les déchets, et en utilisant les produits et services, de plus en plus disponibles, qui sont écologiquement et socialement responsables».

Par ailleurs, afin que le fleuve puissant continue de couler, nous devons transformer les politiques publiques, plaide-t-il, précisant: «Des politiques économiques qui favorisent l’enrichissement scandaleux de quelques-uns et la dégradation des conditions de vie du plus grand nombre signifient la fin de la paix et de la justice». François estime ainsi crucial de mettre fin à l’ère des combustibles fossiles. Il espère que la prochaine COP28 de Dubaï agira en ce sens.

Protéger la Création est synodal 

Concluant, le Pape a largement développé les liens entre protection de la Création et la synodalité. Cette année, la clôture du Temps de la Création, le 4 octobre, fête de saint François, coïncidera avec l’ouverture du Synode sur la Synodalité. «Comme les fleuves alimentés par mille petits ruisseaux et de plus grands torrents, le processus synodal qui a commencé en octobre 2021 invite toutes les composantes, au niveau personnel et communautaire, à converger en un fleuve majestueux de réflexion et de renouveau», a relevé le Pape.  

De même, comme un bassin fluvial avec ses nombreux affluents, grands et petits, l’Église est selon lui une communion d’innombrables Églises locales, de communautés religieuses et d’associations «qui se nourrissent de la même eau». «Chaque source apporte sa contribution unique et irremplaçable. Et de même qu’un fleuve donne vie à toutes sortes d’espèces animales et végétales, de même une Église synodale doit donner vie en semant justice et paix dans tous les lieux qu’elle atteint», a-t-il fait remarquer.

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25 mai 2023, 11:30