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Le président sortant Felix Tshisekedi se représente pour un nouveau mandat de cinq ans. Le président sortant Felix Tshisekedi se représente pour un nouveau mandat de cinq ans.   Les dossiers de Radio Vatican

Élections en RDC: entre insécurité et défis logistiques

A moins d'une semaine de l'élection à un tour du futur président de la RDC, la campagne électorale est confrontée à de nombreux défis: routes impraticables, insécurité importante dans l'Est du pays, impossibilité d'obtenir les cartes d'électeurs. Le professeur en politologie africaine Bob Kabamba nous partage ses doutes quant à la tenue du scrutin le 20 décembre.

Alexandra Sirgant - Cité du Vatican 

Le 20 décembre, 44 millions de congolais seront appelés aux urnes pour élire leur président, ainsi que leurs députés nationaux, provinciaux et leurs conseillers municipaux. Parmi les 26 candidats actuellement en lice pour la présidentielle, outre le Prix Nobel de la paix Denis Mukwege et l'opposant Martin Fayulu, deux se détachent: le président sortant Felix Tshisekedi, candidat à sa réélection, et Moise Katumbi, puissant homme d’affaires, également surnommé le “Silvio Berlusconi” de la République démocratique du Congo.  

Les deux candidats sont les seuls à véritablement faire campagne, avantagés par leurs ressources financières et logistiques, dans un pays manquant cruellement d’infrastructures routières. «Le contexte géographique du Congo est difficile car les voies de communications entre les différentes régions sont impraticables», explique Bob Kabamba, professeur en politologie africaine à l’université de Liège en Belgique. «Pour pouvoir faire campagne il faut disposer de ses propres moyens de communication,  c’est-à-dire des avions, des hélicoptères ou des véhicules, et ensuite parcourir le pays dans une espace-temps limité de trente jours». La campagne électorale ayant commencé officiellement le 19 novembre, «très peu de candidats seront en mesure de faire campagne sur l’ensemble de l’étendue de la RDC».

Deux territoires du Nord-Kivu ne pourront pas voter

S’ajoute à cela le problème de l’insécurité, qui continue de gangréner la province du Nord-Kivu, à l’est de la RDC. Depuis une trentaine d’années, le groupe de rebelles du M23, appuyée par l’armée rwandaise est en conflit avec l’armée congolaise. Les soldats ougandais, sud-soudanais, kenyans et burundais de la force de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Est (EAC) ont, par ailleurs, quitté la région ces derniers jours, quelques semaines après que Kinshasa a décidé de ne pas renouveler le mandat de cette opération régionale qu'elle juge inefficace.

La Commission électorale nationale indépendante (CENI), a déjà annoncé que les personnes déplacées par le conflit dans les territoires de Rutshuru et Masisi ne pourront pas voter aux élections générales. Après deux ans d'affrontement armé, plus d'un million de personnes, selon les données de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) publiées fin novembre, sont déplacées, dont une grande partie a trouvé refuge dans des camps autour de Goma, la capitale provinciale. Rétablir la sécurité dans cette province du pays était pourtant l’une des priorités du mandat de Felix Tshisekedi. «Lui-même a déclaré plusieurs fois que si il n’arrivait pas à résoudre la question sécuritaire, il considèrerait son mandat comme un échec» souligne Bob Kabamba, «or la situation sécuritaire s’est dégradée sous son mandat».

Entretien avec Bob Kabamba, professeur en politologie africaine à l’université de Liège.

Scrutin encore incertain

Il est donc difficile pour les candidats de faire campagne, mais il sera également compliqué pour tous les électeurs de voter en temps et en heure. «Nous sommes à quelques jours de l’élection et le matériel (les urnes, les isoloirs…) n’est pas encore disponible, même la liste des électeurs n’est pas encore disponible !» s’inquiète le chercheur congolais. De plus, la CENI n’a «pas les moyens d’acheminer tout ce matériel de Kinshasa vers les différentes provinces». Ainsi, Bob Katamba émet de sérieux doutes sur le respect du calendrier électoral et craint, en cas de report de l'élection, une déstabilisation de la situation notamment, «car de nombreux candidats ont mis leurs propres moyens pour faire campagne» et risquent donc «d’être dans une situation de revendication auprès de l’administration électorale, mais aussi vis-à-vis du pouvoir qui n’aura pas été capable d’organiser des élections dans les délais constitutionnels».

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14 décembre 2023, 18:05