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Martin Sessler, habitant du kibboutz de Magen, dans le Sud d'Israël. Martin Sessler, habitant du kibboutz de Magen, dans le Sud d'Israël.   Les dossiers de Radio Vatican

Engagé pour la paix, la douleur d'un survivant de kibboutz

Martin Sessler, 76 ans habite à Magen, un kibboutz situé à quelques kilomètres de la bande de Gaza. Il revient sur l'offensive meurtrière du Hamas du 7 octobre et les failles de sécurité, la confiance ébranlée aujourd'hui et la nécessité malgré tout de se projeter vers une paix qui n'est pas encore d'actualité.

Marie Duhamel et Olivier Bonnel - Cité du Vatican

Le 7 octobre, le Hamas lançait une offensive meurtrière sans précédent dans le Sud d’Israël. 1 400 personnes ont été tuées, en grande majorité des civils, et au moins 240 personnes sont toujours retenues en otage dans la bande de Gaza.

Jusqu’à cette date noire pour l’État hébreu, Martin Sessler vivait dans le kibboutz de Magen, situé à quelques kilomètres de Gaza. Âgé de 76 ans, il est le fils de rescapés de la Shoah, installés en Suisse grâce à l’aide d’un ressortissant autrichien. Il s’est installé en Israël dans un kibboutz, «car le pays était un pays sûr». L’attaque terroriste du Hamas le 7 octobre a changé la donne et montré combien l’État hébreu était devenu vulnérable. 

«C’est en sortant du kibboutz que l’on a compris ce qu’il se passait» raconte Martin Sessler. Depuis Magen, en cette journée du 7 octobre, les habitants entendent les tirs des assaillants islamistes. Mais ce jour-là, son kibboutz a été épargné, non pas grâce à l’armée israélienne, mais grâce au comité de défense de son village, qui est parvenu à repousser les combattants du Hamas. Pendant de longues heures, réfugiés dans un bunker avec son épouse, Martin Sessler a attendu l’aide d’une armée qui ne venait pas. Les premiers militaires israéliens sont arrivés après 9 heures d’attente et d'incompréhension. 

Dans le kibboutz de Nir Oz, près de celui de Magen, le 7 octobre
Dans le kibboutz de Nir Oz, près de celui de Magen, le 7 octobre

Une crise de confiance

Les failles sécuritaires ont ébranlé la confiance de Martin et de ses proches, comme nombre d'habitants du Sud d'Israël. «On a l’impression d’avoir été trahis par ceux qui devaient nous protéger» explique-t-il. «Mes enfants se posent naturellement la question de savoir comment cela a pu arriver et comment l’on peut se dire que ça n'arrivera plus?» Ces derniers mois, comme des dizaines de milliers d'IsraéliensMartin avait manifesté contre la réforme de la justice voulue par le gouvernement Netanyahou. Très critique, il souhaite qu'une commission d’enquête puisse établir la vérité sur ce qui a conduit à la catastrophe du 7 octobre, comme ce fût le cas après la guerre du Kippour en 1973. 

Ancien directeur du lycée régional, Martin Sessler connait la plupart des victimes et des otages détenus à Gaza. Engagé depuis longtemps pour la paix et le dialogue, il connait bien la bande de Gaza où il se rendait régulièrement dans les années 80 et 90 pour des échanges scolaires. C’était avant la prise de pouvoir du Hamas sur l’enclave palestinienne.

 

“On me dit toujours que ce n’est pas le moment de parler de politique, mais pour moi c'est le moment”

 

Aujourd’hui, la famille de Martin, comme tous ceux des kibboutz du sud d’Israël vit à l’hôtel, près de la Mer Morte, et à Eilat, sur la Mer Rouge. Un mois après l’offensive du Hamas, Martin explique qu'il faut penser "à l'après", malgré la guerre en cours à Gaza. «Il faut d'un côté empêcher le Hamas à continuer son régime, sa dictature islamiste comme l'Etat islamique, et dans le même temps il faut absolument établir une alternative, il faut continuer le dialogue». Même si ce dialogue est bien dificile alors que la guerre poursuit son cours, il n'a pas été interrompu pour autant. Lui-même professeur de religion et engagé dans le dialogue interreligieux avec le père Piotr Zelazko de la paroisse Saint-Abraham à Beer-Sheva et les imams du sud d'Israël, Martin Sessler témoigne du mouvement de solidarité qui se poursuit avec les bédouins musulmans de ce désert du sud israélien. «Il y a eu des jeunes qui ont été sauvés par des Bédouins qui ont entendu qu'il y a des massacres de masse qui venaient de la bande de Gaza et des bédouins israéliens sont allés sauver des jeunes Israéliens juifs» raconte-t-il. 

Rétablir les liens avec les Palestiniens, et les Gazaouis en particulier sera une tâche délicate, mais pas impossible. «Je peux pas être heureux de voir la souffrance de l'autre, souligne encore Martin, et j'espère que cela va s'arrêter» dit-il, en référence aux bombardements israéliens qui ont fait plus de 10 000 morts. «Cela s'arrêtra avec un gouvernement moins fanatique que le Hamas».

Martin Sessler, habitant du kibboutz Magen

 

 

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08 novembre 2023, 15:48