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Un Palestinien à Rafah après une frappe israélienne, le 20 novembre. Un Palestinien à Rafah après une frappe israélienne, le 20 novembre.   (AFP or licensors) Éditorial

Non à la guerre, proximité avec toutes les victimes

Depuis Benoît XVI le magistère des évêques de Rome a clarifié et approfondi qu'il n'y a pas de "guerres justes" et que même le droit à l'autodéfense doit être proportionné, comme l'enseigne le catéchisme de l'Église catholique.

Andrea Tornielli* - Cité du Vatican

Depuis plus d'un siècle, le Saint-Siège, avec un crescendo de déclarations déterminées par l'aggravation des menaces de guerre et de l'utilisation d'armes de plus en plus sophistiquées et destructrices, déclare avec force son "non" à la guerre. Depuis l'appel prophétique de Benoît XV contre le "massacre inutile" de la Grande Guerre jusqu'aux paroles réitérées à chaque occasion par le Pape François sur la guerre comme une défaite pour l'humanité, le magistère des évêques de Rome a clarifié et approfondi l'idée qu'il n'y a pas de «guerres justes» et que même le droit à l'autodéfense doit être proportionné, comme l'enseigne le catéchisme de l'Église catholique.

Depuis le début de la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine et, ces dernières semaines, après l'attaque inhumaine du Hamas et sa brutalité contre les civils israéliens, puis la contre-offensive de l'armée israélienne qui a rasé tant de maisons à Gaza, tuant des milliers de Palestiniens innocents, l'attitude du Pape et du Saint-Siège a été critiquée. Une attitude que d'aucuns ont longtemps qualifiée de "neutre", comme si le Vatican, par excès de diplomatie, n'était pas en mesure d'évaluer les torts et les raisons des parties en conflit.

Il convient donc de rappeler - une fois de plus - que le Saint-Siège n'a jamais été "neutre" ou "équidistant" face à la guerre. Au contraire, il a toujours cherché à être impartial, c'est-à-dire à ne pas être ou paraître impliqué dans le conflit, et en même temps "équivoque", c'est-à-dire proche non pas de ceux qui provoquent les guerres mais de ceux qui souffrent, de ceux qui paient les conséquences des conflits, des civils tués, des blessés, des mères et des pères des soldats tombés au combat, des victimes innocentes du terrorisme et des représailles. 

Les médias du Vatican ne peuvent que suivre cette même ligne éditoriale, refusant la polarisation qui semble être la caractéristique non seulement des guerres actuelles, mais aussi plus généralement du monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. Maintenir des canaux de dialogue ouverts avec tous, ne jamais fermer de portes dans l'espoir de parvenir à un cessez-le-feu et de négocier ensuite une paix juste, se préoccuper des victimes innocentes de quel côté qu'elles soient, réfléchir aux causes plus ou moins lointaines d'un conflit, éviter d'utiliser le langage de la haine et de la diabolisation, ne signifie nullement ignorer qu'il y a un agresseur et un agressé, ni ignorer la légitimité de l'autodéfense. Au contraire, c'est se préoccuper du sort des innocents, ne jamais éteindre la bougie vacillante de l'espoir de paix, saisir les moindres signes d'ouverture d'où qu'ils viennent, croire en la diplomatie, et surtout se préoccuper du sort des victimes, des mutilés, des déplacés. C'est aussi sortir de la logique de la polarisation et de la pensée unique.

Est-il possible de condamner l'attaque terroriste inhumaine du Hamas contre des civils israéliens et, en même temps, de soulever des doutes et des questions sur la réponse armée de l'armée de Tel-Aviv en raison du nombre élevé de victimes civiles et de la tragédie humanitaire à Gaza ?

Il y a des conflits dans lesquels les applaudissements sont tout à fait inappropriés, et celui qui se déroule actuellement au Moyen-Orient en fait certainement partie, en raison d'une situation très complexe dans laquelle les responsabilités des uns s'ajoutent à celles des autres et ne les justifient pas.

En essayant de rendre compte des guerres en cours et d'offrir des pistes de réflexion, notre phare est la parole prophétique de l'actuel successeur de Pierre, qui continue à mettre en garde l'humanité contre le risque de guerre mondiale et d'autodestruction. Nous essayons de faire du journalisme en séparant les faits des opinions, et nos opinions de celles des autres. Rendre compte de ces dernières, donner la parole aux personnalités qui nous semblent intéressantes, ne signifie pas les partager. Il s'agit plutôt d'essayer de comprendre en valorisant les voix les plus critiques et les moins idéologiques. 

*Directeur éditorial des médias du Vatican

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20 novembre 2023, 15:00