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Mémorial en hommage aux vicitmes des attentats du 11 septembre 2001 à News York Mémorial en hommage aux vicitmes des attentats du 11 septembre 2001 à News York  (2021 Getty Images) Les dossiers de Radio Vatican

Le terrorisme évolue, la lutte s'adapte

Dans un entretien accordé à Radio Vatican - Vatican News à l’occasion de la sixième journée internationale du souvenir en hommage aux victimes du terrorisme, lundi 21 août, décrétée par les Nations-unis, Cédric Mas, président de l’Institut Action résilience, nous apporte son éclairage sur l’évolution du terrorisme depuis le début du siècle.

Jean Charles Putzolu – Cité du Vatican

Depuis 2017, à l’initiative des Nations unies, le 21 aout est dédié aux victimes du terrorisme. Dans le monde, les attentats terroristes continuent de faire des dizaines de milliers de morts innocentes chaque année. Pourtant la lutte s’est accrue et s’est adaptée à l’évolution du phénomène, et de nombreux mouvements terroristes ont considérablement perdu de leur capacité de nuire. C’est le cas notamment d’Al Qaeda et l’État islamique, qui, au début du 21e siècle ont inauguré une nouvelle forme de terrorisme aux ramifications globales.

Cependant les organismes de lutte antiterroriste restent vigilants, plusieurs cellules dormantes représentent aujourd’hui encore un réel danger, de par leur capacité à utiliser internet et les réseaux sociaux comme aucun groupe avant eux. C’est d’ailleurs la principale différence, ou nouveauté, constatée au cours des 20 ou 30 dernières années, selon Cédric Mas, président de l’Institut Action Résilience. Ces mouvements terroristes ont fait usage des nouvelles technologies de l'information et de la communication, «à la fois pour médiatiser les actions, et donc augmenter l'effet de résonance d'un assassinat ou d'un attentat, mais aussi pour recruter, voire même générer des actions terroristes». À travers internet et des actions de communication, «des personnes qui se sentaient sympathisantes de la cause ou qui avaient envie de rallier tel groupe se sont mises à mener des attaques beaucoup plus individuelles».
La France a payé, parmi d’autres, le prix fort de cette capacité technologique lors de la l'offensive de l'État islamique entre 2014 et 2019.

Des “sanctuaires“ du mal

Outre leur capacité d’utiliser les réseaux sociaux à des fins violentes, Al-Qaïda et l'État islamique avaient besoin de “sanctuaires“ territoriaux pour pouvoir préparer des actions terroristes, former des jihadistes, et organiser des frappes, souvent kamikazes, partout dans le monde. «C'était un terrorisme projeté ou glocal, c'est à dire qui s'appuyait sur des réseaux locaux qui faisaient allégeance par exemple, mais aussi avec des projections soit de fond, soit de mode opératoire, soit même de moyens humains et matériels, avec toute une chaîne logistique», explique Cédric Mas. «Aujourd'hui, on a pris conscience qu'il ne fallait pas laisser prospérer ces “sanctuaires“», ajoute-t-il. Privée de repaire, cette typologie de terrorisme et un peu moins menaçante, et «ces organisations se replient sur des objectifs plus prioritaires qui sont de survivre ou de retrouver un “sanctuaire“».

Mais avec le basculement observé dans le Sahel, notamment au Mali et au Niger, ainsi que dans l'Afrique subsaharienne, où la situation et les territoires ne sont pas entièrement sous contrôle, d’autres “sanctuaires“ peuvent réapparaitre. «Il y a des sanctuaires de l'État islamique dans différents endroits, mais qui pour l'instant ne sont pas liés avec l'Occident ou ne sont pas suffisamment pérennes et importants pour pouvoir générer des attentats vers l'Occident», observe le président de l’Institut Action Résilience.

Adaptation de la lutte antiterroriste

Le moteur du phénomène étant aussi politique, la réponse ne peut pas être simplement technique, policière, sécuritaire, ou construite sur les moyens de surveillance et technologie de contrôle. Cédric Mas abonde en ce sens: «Une fois que vous avez identifié une menace avec un réseau, il faut appréhender les auteurs, identifier toutes les ramifications et leur enlever la capacité de mettre en œuvre et de passer à l'acte», mais il précise qu’un travail minutieux complémentaire est nécessaire pour éviter de futurs attentats. «Il faut travailler sur tout un aspect préventif qui est malheureusement aujourd'hui beaucoup passé sous silence, alors qu'il a été décisif en France après 2015, en mobilisant toutes les sphères de la société pour que les gens se parlent, pour que cette colère, qui peut être un des leviers sur lequel organisations terroristes s'appuient pour recruter, puisse se matérialiser autrement que par le basculement vers la violence».
Au niveau européen, plusieurs organismes travaillent sur le «désengagement», terme que Cédric mas préfère à «déradicalisation».

Sauvegarde des valeurs fondamentales de la démocratie

Toutes ces organisations terroristes ont fait, et malheureusement continuent de faire, des dizaines de milliers de victimes, «essentiellement d'ailleurs, au sein des populations dont elles prétendent être les défenseurs». Mais le sang versé ne leur a pas permis d’obtenir grand-chose. En revanche, un des effets des vagues successives d’attentats depuis le 11 septembre 2001 contre le World Trade Center à New York, «c'est de nous avoir amenés à accepter des atteintes à nos libertés que nous n'aurions pas acceptées dans un autre cas», commente Cédric Mas, qui invite à garder les yeux ouverts afin de ne pas perdre les valeurs véhiculées par les systèmes démocratiques, «qui sont les valeurs les plus détestées des organisations djihadistes en général».

Entretien avec Cédric Mas

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20 août 2023, 14:11