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Une photo d'Asia Bibi avant ses années de prison au Pakistan. Une photo d'Asia Bibi avant ses années de prison au Pakistan. 

Asia Bibi demande au Pakistan de protéger les victimes de la loi anti-blasphème

Dans sa première interview vidéo donnée depuis qu’elle a été acquittée par la Cour Suprême du Pakistan en 2018 , Asia Bibi qui vit désormais en exil au Canada interpelle les agences gouvernementales pakistanaises à enquêter «rigoureusement» sur les affaires liées au blasphème.

Avec Eglises d'Asie

«Protégez les innocents plutôt que de les battre dans les commissariats. Les innocents doivent être libérés. De longues peines pour des accusations sans preuves, c’est une grande injustice dans notre pays», peut-on lire dans cette interview, publiée en ligne le 1er décembre. 

«Ils ne comprennent ni la bible ni le coran même après les avoir étudiés. Au nom de Dieu, ouvrez vos cœurs à la pitié. Le Pakistan n’est pas que pour les musulmans. Je me sens en colère quand de bons musulmans sont visés pour avoir sympathisé avec des minorités religieuses démunies», ajoute-t-elle.

La jeune femme évoque plusieurs affaires d’assassinats liées à des accusations de blasphème, dont celui de l’ancien gouverneur du Pendjab Salman Taseer, tué en 2011 pour avoir dénoncé la loi sur le blasphème comme une «loi mauvaise», et celui de l’ancien ministre des Minorités Shahbaz Bhatti, assassiné la même année pour avoir appelé à réformer la législation sur le blasphème.


Une situation toujours incertaine

Dans cet entretien Asia Bibi revient sur sa nouvelle vie d’exil, confiant occuper un travail modeste en raison de son faible niveau d’éducation et évoque parmi les problèmes d’intégration dans son pays adoptif la barrière de la langue. Aujourd’hui, elle vit dans une maison louée. «Il y a des gens qui ont profité de mon nom mais je n’ai rien eu. Notre communauté aurait dû nous aider. Les gens pensent que nous gagnons beaucoup d’argent depuis qu’on nous a accordé le droit d’asile. Le gouvernement nous a seulement soutenus durant un an», précise-t-elle.

«Même mes filles n’ont pas pu étudier à cause de ma situation, et aujourd’hui elles font face à un avenir incertain. Mes années de souffrances nous ont affaiblis. Mon mari a été opéré de la vésicule biliaire au Pakistan, et il a cherché du travail durant quatre ans» souligne la jeune femme catholique. Trois de ses enfants vivent toujours au Pakistan

Une organisation chrétienne appelle à abroger les lois sur le blasphème

De son côté, le 29 novembre, l’organisation britannique CSW (Christian Solidarity Worldwide) a appelé à réviser les lois draconiennes sur le blasphème lors d’un événement virtuel sur la situation de la liberté de religion et de croyance au Pakistan. Selon CSW, le pays «doit assurer que des amendements sont appliqués afin de minimiser le détournement de ces lois à court terme, et tendre vers une abrogation totale à long terme».

Le blasphème reste une question très sensible au Pakistan. Le Centre pour la justice sociale (CSJ), basé à Lahore, estime qu’au moins 1 949 personnes ont été accusées dans le cadre des lois sur le blasphème entre 1987 et 2021. Un grand nombre de ces affaires doivent encore être jugées. 

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03 décembre 2022, 15:20