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Des patients présentant des symptômes du choléra reçoivent un traitement dans une clinique gérée par Médecins sans frontières à Soleil, une commune densément peuplée de Port-au-Prince, en Haïti, le 7 octobre 2022. Des patients présentant des symptômes du choléra reçoivent un traitement dans une clinique gérée par Médecins sans frontières à Soleil, une commune densément peuplée de Port-au-Prince, en Haïti, le 7 octobre 2022.  

En Haïti, 1,2 million d'enfants menacés par le choléra

Les mauvaises conditions sanitaires et la crise du carburant ont provoqué une recrudescence des contagions au choléra en Haïti. La Fondation Rava, qui soutient deux hôpitaux, lance un appel aux États du monde entier pour un plus grand engagement en faveur de l'île, «qui est à genoux».

Marco Guerra - Cité du Vatican

Haïti est au bord d'une catastrophe humanitaire, manquant de biens et de services essentiels, connaissant une spirale de violence sans précédent. À cela s’ajoute aussi une nouvelle épidémie de choléra qui, selon l'Unicef, met 1,2 million d'enfants en danger.

Les premières victimes du choléra

Des informations de l'ONU expliquent qu'à ce jour seulement 20,2% des fonds nécessaires ont été reçus pour garantir l'accès à l'eau potable, à 2 millions de personnes, l'une des principales conditions pour protéger les enfants contre les maladies mortelles et prévenir la malnutrition. Le gouvernement haïtien a reconnu qu'au moins huit personnes sont déjà mortes du choléra, les premiers décès causés par cette maladie depuis trois ans. Ce qui suscite des inquiétudes quant à une éventuelle propagation rapide de l'épidémie.

Appel du Père Richard

En première ligne de cette urgence, la Fondation Francesca Rava NPH Italia Onlus, qui travaille en Haïti depuis environ 20 ans et soutient l'hôpital Saint-Damien, le seul hôpital pédiatrique du pays, et l'hôpital Saint-Luc. Des structures qui ont servi de centres de référence tant pour la lutte contre le Covid-19 que pour l'aide au tremblement de terre de 2021. Depuis des semaines, la fondation reçoit quotidiennement des demandes d'aide du père Richard Frechette, prêtre et médecin dans les établissements de santé soutenus par l'organisation à but non lucratif.

Dans l'un de ses rapports les plus récents, le religieux évoque la grande difficulté que traverse le pays dénonçant l’inaction et l’absence des autorités. La succession de coups d'État et le contrôle du territoire par des bandes criminelles et violentes ont progressivement mis le «pays à genoux». À ce scénario s'ajoutent, les catastrophes naturelles, les tremblements de terre et les ouragans dévastateurs. En Haïti, en outre, tout manque, «l'eau et la nourriture sont dramatiquement rares et, chaque jour, des centaines de corps d'adultes et d'enfants sont enterrés». Enfin, le prêtre médecin parlant du choléra, demande «des médicaments, de l'eau potable et des lits, car l'urgence s'étend de minute en minute». 

Des enfants déshydratés

Interviewée par Radio Vatican-Vatican News, Mariavittoria Rava, présidente de la Fondation Francesca Rava, revient sur l'appel lancé par le père Richard et confirme le caractère dramatique de la situation. Haïti, dit-elle, connaît l'une des plus graves urgences humanitaires au monde. La violence, l'instabilité politique et les prix élevés du carburant ont provoqué une situation qu'en vingt ans d'activité, «nous n'avons jamais vue aussi désastreuse».

Rava explique que la recrudescence des cas de choléra est due au fait que les bidonvilles «sont des latrines ouvertes», car avec la crise du carburant, les camions ne ramassent plus les ordures dans les décharges. Dans le même temps, les camions qui apportent l'eau potable rencontrent également des difficultés à assurer le service, si bien que les personnes atteintes du choléra meurent de déshydratation: «On ne meurt pas du choléra dans un pays où l'on est soigné, mais l'on meurt de déshydratation s'il n'y a même pas d'eau».

L'échec des programmes d'aide

La présidente de la fondation estime qu'Haïti assiste à l'échec de tous les objectifs de l'agenda 2030 de l'ONU: «Ici, les enfants et la jeune génération souffrent des mécanismes déformés de la gestion politique et aussi du manque d'attention de la communauté internationale», dit-elle. «Notre hôpital Saint-Damien, ajoute-t-elle, accueille et traite 80 000 enfants par an, mais cela ne suffit pas, nous avons les seuls services de chirurgie et d'oncologie pédiatriques du pays et nous employons du personnel haïtien qui risque sa vie pour en sauver d'autres».

Soutenir la population locale 

Depuis le tremblement de terre de 2010, presque rien n'a changé, malgré l'aide internationale promise. Selon Mariavittoria Rava, de nombreux fonds ne sont jamais arrivés et l'instabilité politique n'a pas permis d'utiliser l'aide reçue à bon escient. L'urgence humanitaire attire l'attention, mais ensuite, il faut rester, explique-t-elle, appelant à la continuité de l'engagement de la communauté internationale, et à davantage de financement pour l'éducation, car «ce n'est qu'en soutenant la population locale et son émancipation qu'Haïti peut se développer, qu'en marchant sur ses propres pieds». À cet égard, Rava rappelle que la fondation dispose de 32 «écoles de rue» qui scolarisent 16 000 enfants qui, «sans ces structures, auraient rejoint un gang pour survivre». Dans ce contexte, la violence augmente, les quelques Occidentaux qui y vivent sont mis à prix, des personnes sont enlevées pour quelques dollars, et il est de plus en plus difficile pour les organisations humanitaires de travailler.

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09 octobre 2022, 15:29