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Le quartier d'Antohomadinika dans la capitale malgache, le 24 janvier dernier. Le quartier d'Antohomadinika dans la capitale malgache, le 24 janvier dernier. 

L'Afrique australe mise à l'épreuve par le cyclone Ana

Le bilan de la tempête tropicale qui a frappé Madagascar, le Mozambique et le Malawi, a grimpé à 77 morts. Les dégâts provoqués par les pluies torrentielles mettent à dure épreuve des systèmes socio-sanitaires déjà très fragiles, notamment à Madagascar. Le père Bizimana dénonce le paradoxe climatique dans lequel se trouve le pays, où cohabitent la sécheresse et les inondations.

Antonella Palermo – Cité du Vatican

Une nouvelle tempête tropicale pour l’instant de faible intensité, Batsirai, se dirige vers les côtes de l’Afrique australe. Une zone déjà touchée cette semaine par le cyclone Ana qui a tué au moins 88 personnes à Madagascar, au Mozambique et au Malawi.

Sur place, des dizaines de milliers de maisons se sont effondrées en raison des fortes pluies de ces derniers jours. Certains habitants se sont retrouvés pris au piège dans les décombres. Des ponts ont été emportés par les fleuves en crue, tandis que les cultures se sont retrouvées sous les eaux et que du bétail est mort noyé. De nombreuses familles rurales ont ainsi perdu leurs moyens de subsistance.

Accrochés toute une nuit à des déchets pour survivre

Au Mozambique, 10 000 maisons ont été détruites, ainsi que des dizaines d’écoles et d’hopitaux. Au Malawi, le gouvernement a déclaré l’état de calamité naturelle. Parmi les victimes figure l'administrateur de la ville de Tete, dans le nord-ouest du pays, qui est décédé alors qu'il était en route pour inspecter un pont fermé par les inondations. Le fleuve Shire, qui s'écoule du lac Malawi vers le fleuve Zambèze en passant par le Mozambique, a atteint le niveau d'alerte, provoquant des inondations dans les zones de faible altitude. La principale autoroute du Malawi a été interrompue et l'on craint que de nombreuses personnes n'aient été prises au piège par les eaux de crue. On rapporte que des personnes ont réussi à se sauver en s'accrochant à des tas d'ordures le long des canaux d'eau pendant toute une nuit avant que les secours n'arrivent.

Madagascar, des vagues sur la capitale

À Madagascar, où près de 50 personnes sont décédées, on compte quelques 110 000 sinistrés. Dans la capitale, Antananarivo, les maisons traditionnelles n’ont pas tenu et les écoles et salles de sport se sont transformées en abris d’urgence.

«Ces pluies sont bien pires que celles des années précédentes. Les écoles sont toutes fermées, et ceux qui n'ont pas trouvé de logement dans les gymnases n'ont nulle part où aller. Certains essaient de donner le peu qu'ils ont : nourriture, vêtements, savon. Nous avons besoin de tout, surtout dans les jours à venir, lorsque l'eau aura disparu», lance Fenosoa, une Malgache interrogé par Vatican News.

La Grande île est frappée chaque année par deux ou trois cyclones, mais personne ne s’attendait à ce qui s’est passé en début de semaine, selon le père Innocent Bizimana, Inspecteur salésien pour la province de Madagascar et de l'île Maurice. «Ici, environ 60 000 personnes ont perdu leur maison et le gouvernement a réussi à trouver un logement pour environ la moitié d'entre elles», affirme le salésien qui parle d’un «véritable fléau».

«C'est comme si les gens, qui n'avaient déjà rien, s'enfonçaient encore plus dans la misère. Il est affligeant de voir tant d'enfants et de femmes jetés hors de chez eux par des eaux qui atteignent 4 à 5 mètres de haut». Réfugié dans les hauteurs, il décrit l’eau omniprésente à quelques kilomètres de là.

Le soutien de l'Église

L'Église locale tente de répondre aux besoins de la population, mais ce n'est pas facile, «notamment parce que depuis deux ans, avec la pandémie, nous nourrissons les gens, mais nous devons tenir compte du fait que nous n'avons pas beaucoup de ressources», ajoute le père Bizimana. «Chaque mardi et vendredi, 500 à 600 personnes viennent manger. Mais les réserves seront épuisées dans une quinzaine de jours, nous avons essayé de trouver de l'aide pour les nourrir et au lieu de cela, ces pluies sont arrivées. Chacun fait ce qu'il peut, dans l'amour, et Jésus s'occupe du reste».

Le père Bizimana souligne enfin un paradoxe: alors que dans le sud du pays, il y a une sécheresse totale parce qu'il n'a pas plu depuis cinq ans, et qu'un million de personnes sont affamées à cause de la famine, dans le centre, il y a trop d’eau à l’est. «Si on peut entrevoir des responsables ici ou là, pour le religieux, le changement climatique mondial a sa part de responsabilité», juge-t-il.

La crainte d'une épidémie

Autre source d’inquiétude, les aides humanitaires qui tardent à arriver : «un grand combat» selon le docteur Francesco Cimino, directeur de la fondation Akbaraly, actuellement bénévole dans un centre accueillant des personnes durement touchées par la Covid. Il évoque la rupture des communications via Tabata, le port principal, ce qui complique considérablement les choses. «Ici, tout voyage par camion, il n'y a pas de train» et note-t-il, des pénuries de lait et de nourriture commencent. Le médecin italien redoute que des épidémies ne se déclarent, «car les personnes déplacées vivent très proches les unes des autres là où elles ont été logées». Déjà mobilisé avec d’autres contre la Covid – notamment pour convaincre les Malgaches de ne pas craindre les vaccins, mais également contre la peste bubonique et les maladies intestinales, il assure que de leurs cotés, tout est fait pour prévenir des dommages sanitaires supplémentaires, notamment pour les plus petits. Concernant les très jeunes enfants «deux jours de diarrhée suffisent et nous les perdons».

 

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28 janvier 2022, 17:12