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Le cardinal Raï célébrant la messe commémorative de l'explosion du port de Beyrouth, le 4 août 2021. Le cardinal Raï célébrant la messe commémorative de l'explosion du port de Beyrouth, le 4 août 2021. 

Le cardinal Raï appelle les Libanais à l'unité

Lors de la messe de commémoration de l'explosion du 4 août 2020, le Patriarche maronite a délivré un message de fermeté et d'espérance pour la reconstruction de Beyrouth et du Liban.

Vatican News

«Beaucoup ont souhaité que cet anniversaire de l’explosion du port de Beyrouth soit un jour de colère, de manifestations et de condamnations», a reconnu le Patriarche maronite, tout en insistant sur la recherche de la consolation divine. «La voix de Dieu interpelle la conscience de chaque personne responsable de cette explosion, de loin ou de près, aussi longtemps qu’elle se cache ou qu’elle se barricade derrière les immunités. Toujours est-il que la voix de Dieu l’appelle et la met en peine, comme elle a inquiété Caïn toute sa vie, dans son éveil et son sommeil, et elle dit: "Qu’as-tu fait ? Ecoute le sang de ton frère crier vers moi du sol" (Genèse 4, 10)».

Évoquant les plus de 200 morts, les plus de 6000 blessés et les énormes dégâts matériels et psychologiques provoqués par la catastrophe, le cardinal libanais a dénoncé avec fermeté l'attitude de la classe politique. «Il est vraiment honteux d’échapper à la justice et de se cacher derrière de fausses immunités qui n’ont ni valeur ni poids par rapport à ce crime contre l’humanité, et la troisième plus grande explosion non nucléaire de l’histoire humaine.» Le cardinal Rai a néanmoins assuré qu'en ces circonstances dramatiques, «Jésus était en la croix avec nous, et aujourd’hui il nous appelle à la Résurrection avec tout ce que cela signifie en termes de foi, de paix intérieure et de vie nouvelle pour ceux qui sont partis.»

Un appel à éviter la violence

Le Patriarche maronite a remercié le Pape François pour son message de soutien et de compassion lors de l'audience générale, et il a appelé la population libanaise au calme. «En attitude déférente à l’égard de ce jour de commémoration, et par loyauté envers les victimes, les martyrs, les larmes de leurs familles et la douleur des blessés et autres affligés, j’appelle les frères et les sœurs en marche de protestation à éviter la violence, les paroles injurieuses, les attaques contre les institutions et les biens publics et privés, et à ne pas attaquer l’armée et les forces de sécurité.»

«Nous sommes venus prier et offrir le sacrifice de la rédemption pour les âmes de tous les martyrs, de toutes les victimes, et pour Beyrouth, joyau de la Méditerranée, et espace privilégié de rencontre des religions. Nous nous tenons avec vénération sur les décombres et parmi les ruines, allumant le flambeau de l’espoir et de l’avenir et écrivant une nouvelle histoire pour les générations à venir. La valeur de la commémoration est d’être la voie vers l’avenir et une expression de loyauté, commençant par la vérité et se terminant par la justice.»

Invitant chrétiens et musulmans à l'unité, le Patriarche maronite a demandé aux responsables politiques de «mettre tout de suite en place un gouvernement de réforme et de salut. Mais hélas ! personne des gens au pouvoir ne nous écoute. Nous sommes une voix qui crie dans le désert. Comme si personne ne mourait de faim, ni un port n’avait explosé, ni un pays ne s’était effondré», s'est-il attristé.

Au-delà du drame du 4 août 2020, le cardinal a fustigé la responsabilité de la classe politique libanaise dans la crise financière et institutionnelle qui fragilise le Pays du Cèdre depuis plusieurs années. «La société a rétrogradé, l’État s’est effondré, la démocratie a régressé, le pacte national a été mis à mal, l’Accord de Taëf a été délibérément bafoué et la culture a été laissée pour compte dans ses dimensions éducatives et créatives», a-t-il dénoncé.

Affirmation de la neutralité et de la souveraineté du Liban

«Tout en remerciant les pays amis pour leur aide, nous soulignons que la solidarité du monde avec le Liban commence par le renflouement économique et financier, puis par la convocation à une conférence internationale propre pour le Liban, laquelle proclamera officiellement sa neutralité et la mise en place d’un mécanisme efficace pour mettre en œuvre toutes les résolutions internationales», a-t-il insisté.

«Le salut du Liban ne tardera pas à venir, a-t-il assuré. Cependant, il reste à rencontrer la communauté internationale à travers une action patriotique qui met en lumière notre volonté de vivre ensemble, pour que le salut passe par l’unité de l’entité libanaise. Nous entendons l’unité dans le pluralisme assumé et compris, l’unité dans la neutralité active, l’unité dans la décentralisation étendue, l’unité dans la législation civile et l’unité dans la civilisation et la paix. Nous ne voulons plus de combats, plus de guerres. Dans les annales de notre pays, nous avons un surplus de guerres des autres sur notre propre sol, un surplus de guerres intestines, un surplus de martyrs et un surplus de résistances. Mettons le cap sur la liberté et sur la paix. Soyons vigilants et éloignons de notre territoire national et de nos communautés les cartes qui se tracent à présent pour la région du Moyen-Orient.»

«Dieu nous regarde dans sa miséricorde, embrasse nos victimes et les joint à la tendresse de son cœur et aux lumières de sa gloire. Et comme il l’a promis dans la vision de Jean: "Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus ; de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus. Car l’ancien monde s’en est allé" (Apocalypse 21 : 4). Amen!», a conclu le Patriarche Bechara Raï.

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05 août 2021, 12:13