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Le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun, en Birmanie. Le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun, en Birmanie. 

L’appel des religieux de Birmanie pour une consolidation de l’État de droit

Un appel signé notamment par le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun, met en avant la nécessité du dialogue politique dans ce pays impliqué dans un délicat processus de transition démocratique depuis une décennie.

Créer les conditions pour la paix en Birmanie, éliminer toute discrimination ethnique, démilitariser le pays, chercher des solutions politiques aux principales questions, continuer à réformer la magistrature, l'instruction, la prévoyance sociale et les systèmes sanitaires, décentraliser le processus de prise de décision, préparer ainsi les nouvelles générations à un avenir prospère et pacifique: telles sont les demandes envoyées au nouveau gouvernement, aux responsables ethniques, politiques et militaires, et à toutes les personnes de bonne volonté dans le cadre d'un appel spécial diffusé le 25 janvier et envoyé à l'agence Fides.

L'appel, qui s'articule en sept points, est promu par des responsables religieux de différentes communautés, membres de l’organisation Religions for Peace of Myanmar, qui se font «ambassadeurs de paix et de réconciliation».

Dans le texte parvenu à l'agence Fides, le cardinal Charles Maung Bo, Archevêque de Rangoun et signataire de l'appel au nom de Religions for Peace et de la Fédération des Conférences épiscopales d'Asie, remarque que «les élections de novembre dernier ont été amplement reconnues comme libres et équitables» ce qui «confère au nouveau gouvernement le mandat et l'obligation de poursuivre les objectifs économiques et sociaux inclusifs pour lesquels il a été élu».

Les responsables religieux relèvent les actuels défis lancés à la société birmane: «La pandémie lacère notre système sanitaire public. Le virus a dévasté notre fragile économie. Les enfants ont perdu une année de scolarité et les études universitaires sont abandonnées. Nombreux sont ceux qui meurent de faim et les pauvres souffrent davantage que les autres. L'ensemble de la communauté souffre. Avant la pandémie, la Birmanie avait déjà affronté une catastrophe environnementale. Au travers de vos prises de décision, par une action politique unitaire et clairvoyante, la Birmanie devra relever ces défis, soutenir la paix et promouvoir un avenir vivace et prospère. Les droits et les devoirs de tous en Birmanie sont réciproques et notre intérêt pour le bien commun est identique».

Un appel à s’engager pour la paix

Le premier point du texte demande au gouvernement de «créer les conditions pour la paix». «Le devoir de tout responsable national, tant civil que militaire, est de s'engager en faveur de l'unité, de la paix et de la réconciliation. À tous les responsables civils et militaires, nous demandons de mettre de côté la futile recherche de solutions militaires, en recherchant la justice avec courage et détermination au travers du dialogue et de la négociation. La paix arrivera si et seulement si un esprit de direction transparente, ouverte et responsable sera insufflé dans chaque secteur et à tous les niveaux de l'administration.»

Les responsables religieux signalent, dans le deuxième point, l'urgence d'éliminer toute discrimination ethnique. Dans un pays «profondément divisé sur des bases ethniques, nous pouvons et devons prendre un autre chemin, un chemin menant à la solidarité. Les conflits civils de longue date existant en Birmanie ont tous des dimensions ethniques mais leurs causes profondes en sont politiques», affirment-ils.

Dans ce but, ainsi que l'indique le troisième point, les responsables religieux considèrent nécessaire la démilitarisation de la Birmanie. «La guerre est le langage de la mort. Les guerres civiles constituent un refus de reconnaître l'humanité de nos frères et sœurs. La violence ne génère jamais la paix. La guerre nie l'harmonie nationale. Les fruits des conflits sont des amertumes, des divisions et des blessures qui emploient des années à se cicatriser. Il est nécessaire de poursuivre l'unité mais ni par peur ni sous la menace», indique le texte.

La voie principale pour relever les grands défis est indiquée au quatrième point et consiste à chercher des solutions politiques, attendu qu'il «n'existera jamais une solution militaire à un conflit politique». «Poursuivre des solutions militaires porte seulement à une guerre sans fin, à une misère sans fin. Les importants déploiements de l'armée birmane dans les zones habitées par les minorités ethniques ne peuvent porter à l'unité si le dialogue politique demeure absent.»

Développer des garanties de justice sociale

À côté de cet engagement, il est urgent de poursuivre au sein de la nation le processus de réforme de la magistrature, de l'instruction, de la prévoyance sociale et des système sanitaires, ainsi que le note le cinquième point de l'appel. «Les réformes déjà entreprises depuis le centre sont immenses. Le mandat en faveur d'une réforme plus profonde et courageux est conféré à ce gouvernement». «Nous désirons ardemment de nouveaux progrès dans ces secteurs essentiels. La justice retardée est une justice niée.»

Dans le processus de réforme, indique le sixième point, il est également nécessaire de procéder à la décentralisation de la prise de décision. «Un bon gouvernement requiert la subsidiarité, la délégation. Toutes les décisions ne devraient pas être prises dans la capitale, Nay Pyi Taw. Les activités de l'ensemble de la société doivent être coordonnées de telle manière qu'elles soutiennent la vie intérieure des communautés locales. La délégation de l'autorité doit être soutenue et accompagnée par la formation et le soin tant pour les responsables élus que pour les fonctionnaires de l'administration», affirment les responsables religieux.

Tout cet effort national de vaste ampleur, indique le septième et dernier point de l'appel, sert à «préparer la prochaine génération», pour éliminer la pauvreté, construire l'avenir, surtout en insistant sur l'instruction et le développement des jeunes. «S'engager en faveur de l'instruction pour tous en Birmanie est cent fois plus précieux pour la construction de la paix que l'achat d'armes. La Birmanie doit avoir confiance, investir et construire sa jeunesse. Les jeunes sont en effet notre présent et notre avenir» indiquent les rédacteurs du texte.

Le document signé par les responsables religieux s'achève en invitant tous les citoyens à agir en protagonistes actifs d'une «nouvelle ère d'unité et de solidarité», à être «des artisans de paix, unissant et ne divisant pas, en éteignant la haine et en ne l'accueillant ou en ne l'enflammant pas, ouvrant toujours des voies de dialogue qui réconcilieront, guériront et uniront notre très belle terre».

(avec Fides)

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26 janvier 2021, 16:20