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Manifestation d'étudiants irakiens contre le nouveau Premier ministre, le 6 février 2020, à Bagdad. Manifestation d'étudiants irakiens contre le nouveau Premier ministre, le 6 février 2020, à Bagdad.  

En Irak, une radicalisation des rapports de force fait craindre une guerre civile

La nomination du Premier ministre Mohammed Allawi et le soutien que lui a accordé dans la foulée le dirigeant chiite Moqtada Sadr fait craindre un basculement du mouvement révolutionnaire irakien dans la guerre civile.

Entretien réalisé par Marine Henriot - Cité du Vatican

Cela fait maintenant cinq mois que des manifestations enflamment l’Irak, et la situation semble avoir atteint aujourd’hui un point de non-retour. «L’hypothèse la plus envisageable, selon ma grille de lecture, est hélas celle de la guerre civile», alerte Adel Bakawan, directeur du Centre de sociologie de l’Irak et chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (IRIS). Le sociologue redoute une radicalisation des rapports conflictuels entre les principaux acteurs des manifestations.

Le dirigeant chiite Moqtada Sadr, qui jusqu’ici encourageait la contestation contre le pouvoir, a annoncé son soutien au nouveau Premier ministre Mohammed Allawi à la suite de sa nomination le 1er février,  appelant également à appuyer les forces de l'ordre qui tentent de faire rouvrir les écoles et les administrations fermées durant des semaines en raison d'un mouvement de désobéissance civile, «pacifiquement». Ce soutien a provoqué une fracture au sein de la base contestataire. 

Depuis, des manifestations dégénèrent et les deux camps en viennent aux mains. Mercredi 4 février au soir, dans la ville sainte chiite de Najaf dans le centre du pays, sept manifestants ont été tués par balles, à la tête et au torse selon des sources médicales. Des tentes où dormaient depuis des mois des contestataires ont été incendiées. 

 Plus de 600 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations, et 17 000 blessées.

Qui est Mohammed Allawi ? 

Pour remplacer Adel Abdel-Mehdi, Premier ministre démissionnaire fin novembre 2019, le Parlement irakien, après d’intenses tractations, s’est mis d'accord sur le nom de Mohammed Allawi. Celui-ci a été ministre des Télécommunications à deux reprises sous le gouvernement de Nouri al-Maliki (2006-2007 et 2010-2012), mais avait démissionné dans les deux cas après avoir cherché à mettre en oeuvre des mesures anticorruption, accusant Nouri al-Maliki de fermer les yeux sur ce fléau.

Dès sa nomination, le Premier ministre a tenu à s’adresser aux manifestants: «Je vous demande de poursuivre les manifestations, car si vous n’êtes pas avec moi, je serai seul et je ne pourrai rien faire», a-t-il déclaré, promettant de «proposer un ou deux ministres issus de la contestation» et de «laisser les représentants du mouvement populaire avoir un droit de regard sur trois à cinq nominations au futur cabinet». Mais Mohammed Allawi est un visage majeur du système post Saddam Hussein, explique Adel Bakawan, le nouveau Premier ministre représente aux yeux des manifestants un système marqué par la corruption et la milicisation.

Mohammed Allawi a-t-il une chance de d’apaiser les manifestants ? La réponse d’Adel Bakawan, directeur du Centre de sociologie de l’Irak et chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (IRIS).  

Entretien avec Adel Bakawan

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07 février 2020, 08:16