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Au moins 300 personnes sont mortes dans les inondations à Baghlan, en Afghanistan. Au moins 300 personnes sont mortes dans les inondations à Baghlan, en Afghanistan.  (ANSA)

Père Scalese: l'appel du Pape pour l'Afghanistan aide un peuple «oublié»

Dans une interview accordée aux médias du Vatican, l'ancien supérieur de la Mission sui juris en Afghanistan, le dernier prêtre à avoir séjourné dans le pays, le père Giovanni Scalese, évoque l'appel du Pape en faveur des victimes des inondations massives, et souhaite qu'il contribue à briser le «mur du silence “qui a jusqu'à présent laissé le pays ”abandonné “ et ”oublié».

Deborah Castellano Lubov – Cité du Vatican

Le Pape a lancé mercredi 15 mai lors de l’audience générale, un appel à la communauté internationale pour qu'elle apporte l'aide et le soutien nécessaires aux plus vulnérables en Afghanistan, où au moins 300 personnes ont été tuées lors des inondations qui ont touché 18 districts dans au moins trois provinces du nord du pays, au cours des derniers jours.

Suite aux déclarations du Pape, le père Giovanni Scalese, dernier supérieur de la Mission sui juris en Afghanistan, qui était le seul prêtre catholique présent dans le pays, a accordé une interview aux médias du Vatican. Il a fait cas des conséquences que les récentes inondations auront sur le peuple afghan, confronté à une pénurie quotidienne de biens essentiels à la survie. Après avoir passé près de sept ans en Afghanistan en tant que seul prêtre catholique actif à Kaboul, le barnabite se souvient des conditions difficiles dans lesquelles il a travaillé en tant que missionnaire. Aujourd'hui, le père Scalese se trouve en Italie, rapatrié comme des milliers d'autres étrangers contraints de fuir précipitamment après l'arrivée au pouvoir des talibans.

Selon le Programme alimentaire mondial des Nations unies, des centaines d'autres personnes ont été blessées dans les récentes inondations, et de nombreuses personnes seraient encore ensevelies dans la boue. La plupart des victimes ont été signalées dans la province de Baghlan, où les fortes pluies ont détruit environ 3 000 maisons, inondé les terres agricoles, emporté le bétail, fermé les écoles et endommagé les centres de santé.

Lors de l'audience générale, le Pape a lancé un appel important pour l'Afghanistan, frappé par des inondations dévastatrices. Quelles nouvelles avez-vous de cette catastrophe? Comment accueillez-vous cet appel du Pape?

Malheureusement, je n'ai que très peu de nouvelles. J'ai appris cette tragédie ces derniers jours par un confrère, le père Moretti, qui fut mon prédécesseur à Kaboul, car sinon personne n'en parle dans les médias. Au contraire, d'autres événements moins importants dominent les médias et on en parle quotidiennement pendant des semaines. Quand il s'agit de l'Afghanistan, personne n'en parle. Je pense donc qu'il est important que le Saint-Père ait lancé cet appel mercredi matin. En effet, nous lui sommes vraiment très reconnaissants d'avoir brisé ce mur de silence. Nous espérons qu'au moins maintenant, après en avoir parlé, certains médias rapporteront la nouvelle, car sinon, personne ne saura rien.


L'Afghanistan est déjà un pays très pauvre. Quel effet ces inondations pourraient-elles avoir sur la vie quotidienne de la population?

Oui, exactement, l'Afghanistan est un pays très pauvre, et les Afghans ont très peu à perdre, donc malheureusement, ils sont habitués à ces événements désastreux et à y faire face du mieux qu'ils peuvent. Il est clair que les victimes, ceux qui perdent la vie, ne peuvent rien faire. Les autres essaieront d'avancer du mieux qu'ils peuvent, comme ils l'ont toujours fait au cours de l'histoire de l'Afghanistan, en serrant les dents et en recommençant à chaque fois. Certes, il y a encore un espoir d'intervention de la part de ceux qui peuvent intervenir. Le Pape lui-même, mercredi matin, a lancé un appel à la communauté internationale, aux organisations non gouvernementales, aux organismes internationaux. Nous espérons donc qu'il y aura des interventions pour aider ces populations.

Comme vous l'avez dit, le Pape a spécifiquement appelé à l'aide la communauté internationale, et vous avez également souligné qu'il y a une sorte de mur du silence, qu'après la prise de pouvoir des Talibans à Kaboul, presque plus personne ne parle de ce pays. Mais que peut-on faire pour donner une voix à l'Afghanistan au milieu de ce silence?

Je ne sais pas car malheureusement c'est exactement ce qu'il s'est passé après le 15 août 2021. Plus personne ne parle de l'Afghanistan. Parce que ce n'est pas intéressant! Ce n'est pas intéressant, malheureusement! Le monde de l'information n'est pas objectif, il ne rapporte pas toutes les nouvelles, il est très sélectif. Il ne retient que certaines nouvelles, celles qui peuvent intéresser le grand public ou celles qui peuvent être importantes pour une raison idéologique ou politique. Et donc, dans ce cas, l'Afghanistan a été complètement oublié. J'espère cependant que, petit à petit, les gens se rendront compte que, quel que soit le gouvernement, quel que soit le pouvoir dans un pays, les organisations internationales et les organisations non gouvernementales devraient faire un effort pour que les populations dans le besoin puissent recevoir de l'aide, quel que soit le régime politique au pouvoir dans un pays donné.

Quels sont vos souvenirs les plus marquants des années de service en tant que missionnaire? Vous étiez le seul prêtre présent et vous êtes donc la seule personne à pouvoir raconter une telle expérience...

Malheureusement, je n'ai pas de bons souvenirs de l'Afghanistan. J'y ai passé sept ans, de 2015 à 2021. Ce furent des années très difficiles. Je n'ai pas eu l'occasion de visiter le pays; c'était trop risqué, ne serait-ce que d'être à Kaboul, à l'intérieur de l'ambassade d'Italie, où la mission catholique était basée, on ne pouvait même pas se déplacer dans la ville parce que c'était dangereux. Il y avait des attentats quotidiennement. C'était donc un pays en état de guerre, et je n'ai pas de bonnes expériences à raconter.

S'il y a un bon souvenir, c'est celui du 13 octobre 2017, lorsqu'à la fin du centenaire des apparitions de Fatima, nous avons consacré l'Afghanistan au Cœur Immaculé de Marie, et cela me donne tellement d'espoir. Parce que l'Afghanistan, même s'il est ignoré, oublié, abandonné par tous, ne peut certainement pas être abandonné par Dieu et par Marie. L'Afghanistan, aussi, est dans le Cœur Immaculé de Marie, qui protégera certainement ce pays et protégera son peuple et ne permettra pas à ce peuple de périr, malgré toutes les épreuves qu'il subit. Merci au Saint-Père qui s'est souvenu de l'Afghanistan, en espérant que ces interventions puissent avoir un effet en faveur du peuple afghan.

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16 mai 2024, 15:06