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Manifestation contre le racisme et l'extrême droite le 28 janvier 2024 à Hambourg. Manifestation contre le racisme et l'extrême droite le 28 janvier 2024 à Hambourg.  (AFP or licensors)

L’Église s’inquiète de la montée de la xénophobie en Allemagne

Alors que le soutien aux groupes xénophobes et antisémites gagne du terrain en Allemagne, les dirigeants catholiques du pays réaffirment que cette idéologie est incompatible avec les valeurs chrétiennes et démocratiques.

Lisa Zengarini – Cité du Vatican

L'Église d'Allemagne se joint aux préoccupations croissantes dans le pays concernant la montée en puissance de groupes d'extrême droite, antisémites et antidémocratiques, tels que III Way, Heimat et AfD (Alternative pour l'Allemagne). Le soutien à ces partis gagne du terrain dans l'électorat, à quelques mois des élections européennes de juin, mais aussi d'autres scrutins régionaux et locaux importants. Ainsi, Alternative pour l'Allemagne, parti nationaliste, eurosceptique et anti-immigration, arrive actuellement en deuxième position dans les sondages, derrière l'alliance politique chrétienne-démocrate de centre-droit CDU-CSU.

Des évêques, des religieux, des religieuses et des organisations laïques catholiques ont déclaré qu'ils ne pouvaient accepter l'idéologie de ces partis, la jugeant incompatible avec les valeurs chrétiennes et démocratiques.

Les manifestations contre les partis xénophobes prennent de l'ampleur

Les manifestations contre l'extrême droite ont pris de l'ampleur en Allemagne ces dernières semaines après la publication par le média Correctiv d’un rapport selon lequel des dirigeants néonazis s'étaient réunis à Potsdam le 20 novembre dernier pour discuter de l'expulsion de millions d'immigrés, dont certains avaient la nationalité allemande, ravivant ainsi les sombres souvenirs de la montée du national-socialisme dans les années trente.

Certains membres de l'AfD étaient présents à la réunion, mais le parti a cherché à prendre ses distances avec les participants, affirmant qu'il n'avait aucun lien organisationnel ou financier avec l'évènement, et qu'il n'était pas responsable de ce qui y avait été discuté.

De nombreuses personnes sont descendues dans les rues de plusieurs grandes villes allemandes, dont Hambourg et Aix-la-Chapelle, pour demander l'interdiction de l'AfD. Une stratégie qui pourrait, selon de nombreux opposants à l'AfD, profiter au parti en lui permettant de se présenter comme une victime.

Journée dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste

Les manifestations ont culminé le 27 janvier, Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste. Plusieurs responsables ecclésiastiques s'y sont joints. Parmi eux, des évêques de Basse-Saxe, comme Mgr Heiner Wilmer. L’évêque de Hildesheim a appelé les citoyens à défendre les valeurs démocratiques, déclarant que «notre démocratie est vivante parce que de nombreux Allemands y sont attachés».

Mgr Franz-Josef Overbeck, évêque d'Essen, a déclaré que «l'AfD s'est éloignée des principes démocratiques» et que «les catholiques ne peuvent pas voter pour ce parti». L'archevêque Stefan Heße de Hambourg a lui affirmé qu' «il n'y a pas d'intersection entre le christianisme et l'AfD».

D'autre part, l'évêque Helmut Der d'Aix-la-Chapelle, qui a également exprimé son soutien aux manifestations, a souligné qu’elles ne suffisaient pas à façonner et à orienter la politique dans la bonne direction. Mgr Der a déclaré s'opposer fermement à «toute forme de racisme, d'antisémitisme, de glorification de la violence, de démantèlement de notre culture de la liberté et de l'État de droit, et de remise en question de l'unification politique de l'Europe». Il a précisé que l'Église soutient une politique solidaire avec les plus vulnérables et ceux «qui veulent mener une vie meilleure dans la paix et la sécurité, et affirmer notre démocratie libérale».

Le plan de «remigration» est contraire à la dignité humaine

Les organisations religieuses et laïques catholiques allemandes ont exprimé une position similaire. Le bureau exécutif de la Conférence des supérieurs d'Allemagne (DOK), qui représente 14 300 religieux, a exprimé son horreur à l'annonce du plan dit de «remigration» discuté à Potsdam. Le DOK affirme que ce plan contredit ouvertement le principe de l'égale dignité de tous les êtres humains et les valeurs fondamentales d'une société libre et démocratique. 

Déplorant que «même les membres des congrégations et des communautés religieuses en Allemagne sont touchés par des slogans xénophobes et racistes», la DOK a salué «le fait que de nombreuses personnes, y compris des hommes et des femmes, descendent dans la rue pour défendre la démocratie et la diversité, contre l'extrémisme de droite».

Pour sa part, le Comité central des catholiques allemands (ZdK) s'est déclaré préoccupé par «l'émergence de croyances et de mouvements populistes, antidémocratiques et antisémites de droite, même au sein de l'Église».

 

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06 février 2024, 09:53