RDCongo: «en élisant mal, on devient complice de son malheur de demain»

Jacques Ngol,SJ – Cité du Vatican

Aux sons de la musique, dans des villes inondées de banderoles et photos, se déroulent les campagnes électorales lancées le 19 novembre dernier en République démocratique du Congo. Les populations sont appelées à choisir leur futur président de la République et à renouveler les membres de l'Assemblée nationale. 

Des campagnes sans projet de société concret

«De manière globale, la campagne électorale a toujours une portée géographique, sociale, tribale, régionale. Chacun revient dans son fief naturel, représenté par sa tribu, par sa langue ou par son appartenance religieuse», a décrit l’abbé Nkonzi. Par ailleurs, il a fait entendre que «les candidats ne se mobilisent pas encore vraiment sur un grand projet de société». Selon le prêtre, «les futurs députés sont élus pour légiférer et contrôler», mais malheureusement, sur cette démission principale, a-t-il poursuivi, «ils se taisent et ils préfèrent balancer des cadeaux, balancer des promesses». Cette manière de faire, a dénoncé le directeur de la commission diocésaine Justice et Paix, représente un risque pour les Congolais. Car, ils risquent de «voter en faveur des candidats alimentaires. On risque de voter pour des candidats qu'ils ne méritent pas». Pour lui, ceux qui battent les campagnes doivent le faire «sur fond d'un projet social, d'un contrat social, au lieu des promesses ou des petits cadeaux», affirmant que les honorables sont attendus plutôt pour «légiférer et contrôler» et non de «manipuler la misère et la pauvreté des gens pour distribuer des petits trucs inutiles et afin de galvaniser et manipuler les gens pour avoir les votes».

Le rôle de l’Église et formation citoyenne

Face aux dérives observées ça et là, les évêques ont attiré l’attention de leurs concitoyens, les appelant à la vigilance. «Un candidat peut être de votre tribu, de votre appartenance religieuse, mais si c'est un candidat qui aligne les membres de sa famille, si c'est un candidat qui a trempé dans des groupes armés, si c'est un candidat connu pour avoir détourné les fonds publics de l'État, il faut vraiment dépasser l'égo ombilical, l'égo tribal et penser à l'intérêt supérieur de la nation», ont appelé les pasteurs.

Par ailleurs, la commission Justice et Paix, dans l’exercice de son rôle est en train de «réunir les cadres de base et réunir toutes les couches» pour «faire une éducation civique électorale, montrer les profils du candidat qu'il faut élire et montrer les bienfaits du bien élire». Parce que, «si on élit mal, on devient complice de son malheur de demain». Poursuivant, l’abbé Nkonzi a fait savoir que la CDJP est en train de «former des observateurs» qui ont pour rôle de suivre le déroulement des votes jusqu’aux résultats afin de s’assurer si ce qui est «déposé dans les urnes, c'est ce qu'on a proclamé comme résultat». Pour lui, c'est un travail citoyen et il relève de la mission de l’Église de «former, informer et accompagner» la population, ce que fait la CDJP.

Appel aux votes responsables et aux résultats crédibles

«La population mérite les dirigeants qu'elle a choisis» a déclaré le prêtre congolais, affirmant qu’il ne «sert à rien de se lamenter demain alors qu'aujourd'hui on pouvait changer». Le directeur de la commission Justice et Paix de l’archidiocèse de Bukavu appelle les Congolais à être «conscients et savoir que notre vote peut changer les paysages sociopolitiques de notre pays». Pour lui, chacun doit être conscient que son vote «peut apaiser la situation». Par conséquent, il faut faire «un vote responsable, un vote citoyen, qui intronise la personne qu'il faut à la place qu'il faut». Pour parvenir à ce but ultime, il a exhorté les Congolais à «minimiser tous les clivages qui peuvent être tribal, clanique ou religieuses, en sachant que nous tous sommes Congolais, nous tous nous sommes responsables de ce qui nous arrive, et nous ne devons pas voter mal pour crier demain alors que nous étions responsables de ce que nous avions fait».