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Des migrants à la frontière sud des Etats-Unis, le 13 mai dernier. Des migrants à la frontière sud des Etats-Unis, le 13 mai dernier.  (2023 Getty Images)

Fin du "Titre 42": l'Eglise aux côtés des migrants

Après l'expiration de cette mesure qui organisait, au nom de la pandémie, le refoulement immédiat des migrants tentant d'entrer aux Etats Unis, les autorités américaines ont durci leurs règles migratoires. L’archevêque du Yucatan au Mexique et nouveau président de Caritas Amérique latine et Caraïbes, s'inquiètent pour les migrants en transit dans son pays et pour le sort des mineurs isolés.

Marie Duhamel et Renato Martinez - Cité du Vatican

Au nom de l’urgence sanitaire due à la pandémie de Covid-19, l’administration Trump avait décidé du refoulement immédiat des migrants se présentant à la frontière sud des Etats-Unis. En trois ans, la mesure nommée «Titre 42» a été utilisée à 2,8 millions de reprises, y compris à l’encontre de demandeurs d’asile. 

A l’approche de sa date d’expiration, les Républicains poussaient le gouvernement démocrate à maintenir le code de la loi fédérale pour éviter «une invasion» de migrants après plusieurs années de verrouillage, mais l’administration Biden a décidé de laisser le «Titre 42» arriver à échéance, jeudi 11 mai à 23h59.

Craignant une situation «chaotique» pendant quelques jours, le gouvernement fédéral avait ordonné le déploiement de milliers de militaires et de policiers supplémentaires le long des 3200 km de frontière séparant les Etats-Unis du Mexique, mais l’afflux migratoire redouté n’a pas eu lieu.

Des migrants espérant passer la frontière le 13 mai dernier.
Des migrants espérant passer la frontière le 13 mai dernier.

Crainte de l'Église pour les mineurs isolés

Ce lundi 15 mai, le ministre américain de la Sécurité intérieure revendiquait une baisse de 50% du nombre de migrants interceptés alors qu’ils tentaient d’entrer illégalement aux Etats-Unis. Une tendance qu’il faudra analyser dans la durée, précise-t-il, se gardant de tout triomphalisme.

10 500 migrants ont traversé illégalement la frontière le weekend dernier contre, selon des médias américains, 10 000 passages clandestins quotidiens avant la levée du «Titre 42». Les aspirants à une vie meilleure aux Etats Unis étaient passés in extremis, par peur du durcissement promis des règles liées notamment à l’octroi du droit d’asile. Au micro de Renato Martinez de la rédaction hispanophone de Radio Vatican, Mgr Gustavo Rodríguez Vega, archevêque du Yucatan au Mexique et nouveau président de Caritas Amérique latine et Caraïbes s’inquiète en particulier pour les mineurs isolés.

«Beaucoup d'entre eux ont été séparés de leurs parents et c'est terrible. Nous espérons donc que les autorités feront preuve de plus de compassion et, dans tous les cas, que le Seigneur nous aide et donne plus de moyens à ceux d'entre nous qui essaient de servir ces victimes innocentes qui font partie de l'injustice qui existe dans le monde» a réagi en marge de l’assemblée de Caritas internationalis à Rome. Mgr Gustavo Rodríguez Vega espère que ces enfants puissent être «traités d'une manière plus humaine et plus digne». Il y a quelques jours en Floride, un Hondurien de 17 ans, qui avait traversé la frontière sans sa famille, est mort dans un centre américain de prise en charge des mineurs non accompagnés.

La Caritas aux côtés des migrants campant au Mexique

La réduction du nombre de migrants à avoir passé la frontière coïncide avec la mise en place de nouvelles restrictions. Aux Etats-Unis, les demandeurs d’asile à l’exception des mineurs isolés, devront désormais prouver s’être vu refuser l’asile dans les pays précédemment traversés, ou alors, avoir obtenu un rendez-vous avec des agents de l’immigration américaine sur une application «CBP One» lancée en janvier par les autorités à Washington, en prévision de l’expiration du «Titre 42».

Mais plusieurs problèmes se posent aux migrants. D’abord, les disponibilités sont rares, le gouvernement promet d’ailleurs d’augmenter le nombre de rendez-vous à 1000 par jour. Ensuite, l’application est défaillante. De nombreux bugs empêchent ses utilisateurs de pouvoir effectivement prendre rendez-vous. Enfin, les migrants qui souhaitent poser une demande légale ne disposent pas toujours – voire rarement- de téléphone de dernière génération et d’une connexion internet.

Aujourd’hui des millions de migrants, chiffre l’AFP, vivent dans des campements précaires au Mexique après avoir été refoulés en raison du «Titre 42». «Ils viennent de toute l'Amérique latine, de toute l'Amérique centrale, d'Afrique, d'Inde, de beaucoup d'endroits, et qu'ils passent par le Mexique pour arriver aux États-Unis. Notre gouvernement ne les arrête pas, mais il ne s'occupe pas non plus de ces milliers et milliers de migrants et lorsqu'ils arrivent à la frontière avec les États-Unis, ils ne peuvent pas passer, il n'y a pas d'option pour traverser la frontière. Ils restent donc au Mexique ou retournent dans leur pays d'origine et très peu d'entre eux parviennent à passer du côté américain. La tâche est donc énorme pour les communautés diocésaines et, bien sûr, c'est souvent Caritas qui doit intervenir pour servir ces frères et sœurs migrants» rapporte Mgr Gustavo Rodríguez Vega, sans revenir sur la dernière mesure prise cette fois par les autorités mexicaines. Le gouvernement de Manuel Lopez Obrador a décidé de ne pas accorder de documents aux migrants pour transiter dans le pays, ce qui risque de les rendre encore plus vulnérables.

Travailler à la pacification du pays

Le nouveau président de Caritas Amérique latine et Caraïbes, élu le 10 mai par ses pairs des 22 Caritas de la région avant de rejoindre Rome pour l’Assemblée générale de Caritas Internationalis, promet de travailler auprès des migrants, des réfugiés, des victimes de la traite mais aussi pour le renforcement du tissu social et la construction de la paix. «La situation d'insécurité et de violence causée par les gangs du crime organisé a détruit la paix et la sécurité dans la majeure partie du Mexique. Je pense donc que la construction de la paix est une tâche très importante. Et cela nous touche particulièrement dans l'Eglise et chez Caritas, pour tous ceux qui travaillent dans la pastorale sociale».

Mgr Gustavo Rodriguez lors de l'Assemble de Caritas Internationalis.
Mgr Gustavo Rodriguez lors de l'Assemble de Caritas Internationalis.

Le parcours de Mgr Rodriguez

Mgr Gustavo Rodríguez est né à Monterrey, au Mexique, le 7 mars 1955. Il a été ordonné prêtre le 15 août 1980 dans la basilique de l'Immaculée Conception. Entre 1980 et 1986, il a occupé divers postes de formateur et d'enseignant au séminaire de Monterrey. Le 27 juin 2001, le Pape Jean-Paul II l'a nommé évêque auxiliaire de l'archidiocèse de Monterrey, et il a été consacré le 14 août de la même année dans la basilique Notre-Dame de Guadalupe à Monterrey.

Il a été membre de la Commission épiscopale pour la pastorale sociale Caritas de 2001 à 2006, puis élu président de cette commission pour la période 2006-2009 et réélu pour la période 2009-2012. Il a été représentant suppléant de la province ecclésiastique de Monterrey au Conseil de présidence pour le triennat 2006-2009. Nommé évêque de Nuevo Laredo par Benoît XVI le 8 octobre 2008, il a pris ses fonctions le 19 novembre de la même année.  En juin 2011, il a été élu membre du Département de la justice et de la solidarité du Conseil épiscopal latino-américain (CELAM). Le 1er juin 2015, le Pape François l'a nommé archevêque du Yucatán.

 

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16 mai 2023, 18:18