Les fouilles de Saint-Marc, «première paroisse de l'histoire», ouvertes à Rome

Antonella Palermo - Cité du Vatican

Vatican News a pu descendre dans les entrailles de la basilique Saint-Marc l'Évangéliste au Capitole pour découvrir l'empreinte paléochrétienne que, dans quelques semaines, le public pourra également admirer. Les travaux de restauration, initiés en janvier 2022, ont été achevés en juillet dernier. Mgr Renzo Giuliano, curé de la paroisse, expert en art ancien, est notre guide. Il nous conduit dans «la première paroisse de l'histoire», telle qu’il l’appelle.

Sur les lieux de la prédication de Marc

La basilique telle qu'elle apparaît aujourd'hui demeure un édifice attribuable à l'intervention du Pape Grégoire IV (827-844), donc datant du IXe siècle, malgré des décorations baroques dues aux restaurations des XVIIe et XVIIIe siècles et les modifications antérieures effectuées à l'époque du Souverain Pontife vénitien Paul II (1464-1470), lors de la construction du palais de Venise auquel l'église était incorporée. C’est aussi Paul II qui concéda l'église aux Vénitiens résidant à Rome.

À l'époque, elle était en si mauvais état que le Pape a voulu la reconstruire à partir des fondations, la faire décorer de mosaïques et la doter d'un riche mobilier. Une intervention qui a totalement effacé les traces monumentales préexistantes.

Construction de la basilique par le Pape Marc en 336

Le quartier où nous nous trouvons s'appelle apud palacina, l'endroit où l'on peut vérifier exactement la vie de saint Marc. Sa vie d'évangéliste a commencé ici même. À proximité, se trouvent les vestiges d'une domus romaine: c'est là que les premiers chrétiens se réunissaient et écoutaient chez eux la prédication de Pierre et de Marc, venus avec lui dans cette grande métropole. Il a ensuite été envoyé à Alexandrie, une civilisation en plein bouleversement à l'époque. C'est là qu'il sera capturé et mourra le 24 avril 68; les chrétiens recueilleront sa dépouille conservée dans un sanctuaire. Puis deux marchands vénitiens, pour le sauver de l'invasion des infidèles, le feront venir à Venise par un moyen ingénieux.

«Le Pape Marc, ancien curé de l'oratoire Saint-Marc, a fait construire sous Constantin (en 336) cette basilique, la première, précise Mgr Giuliano- conçue comme une paroisse. En fait, les fonts baptismaux ont été découverts ici: on retrouve la trace du périmètre du bassin, qui a une forme inhabituelle de croix, avec ses canaux d'écoulement et les empreintes du dallage en marbre blanc».

«En réalité, l'église commandée par le Pape Marc était l'expression de l'attention portée à la vie pastorale de la zone des fidèles qui vivaient en bordure du centre ville, formée par les Forums impériaux: une zone densément peuplée de païens et de frères juifs, qui comptait alors 45 000 habitants».

Trois campagnes de fouilles archéologiques

Ce sont les travaux d'assainissement de l'humidité effectués par les ponts et chaussées entre les années I947-I949 et aussi au début des années 1950 qui ont mis en évidence la structure titulaire paléochrétienne sous-jacente. Le sol de la nef de l'église grégorienne a été enlevé et une grande partie du corps longitudinal a été mise au jour, ainsi que les fondations du début du Moyen Âge. Malheureusement, des fouilles minutieuses et adéquates n'ont pas été effectuées à cette occasion. Il a fallu trois campagnes de fouilles, menées entre 1988 et 1990, pour esquisser une nouvelle histoire des phases de la basilique marcienne. Tout d'abord, dans la zone du sous-portique Renaissance, la structure de l'abside primitive et une chaussée jusqu'alors inconnue sur laquelle l'abside s'avance, ont été mises au jour. Le pavé de marbre s'étend sur une longueur considérable, signe de prestige. Quant à la façade, on ne peut rien dire, car elle n'a pas encore été retrouvée. «L'abside des deux églises anciennes était opposée à celle que nous voyons aujourd'hui», poursuit le père Renzo. «Le Pape Grégoire IV a en fait changé la perspective pour empêcher le Tibre, comme cela s'était produit d'autres fois, d'envahir l'église et de la rendre inutilisable».

Fouilles de Saint-Marc à Rome.

Père Piccolo: un trésor d'art, communauté de pierres vivantes

Comment faire cohabiter le contemporain avec une tradition millénaire, avec les racines des premiers évangélisateurs gravées dans les pierres anciennes? L'idée du professeur Rosalba Manes, professeur d'Écriture sainte à l'Université pontificale Grégorienne, a permis de mettre en place une célébration eucharistique dominicale à midi, en particulier pour ceux qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas se rendre dans leur paroisse d'origine. Elle est présidée par le père jésuite Gaetano Piccolo, doyen de la faculté de philosophie de l'Université pontificale Grégorienne:

«L'idée était de créer les conditions pour que cela ne soit pas seulement une attraction touristique, avec des spectateurs émerveillés mais isolés. C'est une messe qui met également en valeur tous les espaces liturgiques de l'église. L'autel, placé très haut, reste chargé de la liturgie eucharistique, tandis que le prêtre descend au niveau de l'assemblée au moment de l'homélie. Les intentions de prière universelles sont gratuites et chacun peut les exprimer depuis sa place. Parce que la connotation que nous avons voulu donner à cette messe est précisément la liberté», explique le père Gaetano, «au-delà de toute 'étiquette' et formalité». Après la messe, tout le monde est accueilli dans la sacristie où un apéritif est offert.