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Le père Federico Lombardi. Le père Federico Lombardi.  

Père Lombardi: le rapport de la Ciase est un pas dans la bonne direction

L'ancien porte-parole du Saint-Siège nous explique comment il a reçu les révélations du rapport de la Commission Sauvé, présenté le 5 octobre à Paris. Le père jésuite a été le modérateur du sommet exceptionnel sur la protection des mineurs au Vatican, voulu par le Pape, qui s’est tenu au Vatican en février 2019.

Entretien réalisé par Olivier Bonnel - Cité du Vatican

Alors que la journée du 5 octobre a été marquée par la remise à Paris du rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église, nous avons donné la parole au père Federico Lombardi. Ancien porte-parole du Saint-Siège, actuellement président de la Fondation Ratzinger, le jésuite italien suit depuis plusieurs années le drame des abus sexuels commis par des prêtres ou religieux. En février 2019, il avait été nommé modérateur du sommet exceptionnel sur la protection des mineurs organisé au Vatican, à la demande du Pape François, et qui avait réuni les responsables des conférences épiscopales du monde entier ainsi que les supérieurs des instituts et congrégations de religieux et religieuses.

Il nous explique comment il a reçu le rapport de la Commission Sauvé et quelles sont les dynamiques à l'œuvre aujourd'hui dans l'Église pour éradiquer le fléau des crimes sexuels commis contre des mineurs.

Entretien avec le père Federico Lombardi

Comment avez-vous accueilli ce rapport de la Ciase?

Chaque fois c’est une chose horrible… de reprendre conscience de ce qui se passe quand arrivent des abus sexuels, quelle que soit la région du monde, pour ces personnes qui souffrent terriblement de ces crimes. Naturellement, c’est accablant de penser qu’il s’agisse de la conséquence des fautes et des crimes de personnes d’Église. Je pense que le fait d’avoir confié ce travail à une commission indépendante de la part de la Conférence épiscopale des évêques de France est un pas dans la bonne direction. Il faut maintenant profiter de ce travail, malgré la grande émotion d’en voir les conclusions, mais c’est un point de départ important pour continuer un chemin qui peut s’élargir et s’approfondir avec une plus grande clarté. C’est une confrontation avec une réalité sombre pour l’Église de France et pour tous ceux qui sont engagés dans l’Église en général, avec de grandes décisions à prendre. L’attitude de l’écoute des victimes est le point de départ correct, il faut toujours écouter ou commencer à écouter si l’on ne l’a pas fait, car c’est la seule possibilité d’entendre quelle est la réalité des abus et de leurs conséquences. C’est un chemin qui ne s’achève pas.

Concernant les recommandations de la Ciase figurent notamment la réforme du droit canon et ses adéquations avec le droit pénal civil. Est-ce l’une des priorités selon vous?

Dans la réforme du droit canon du point de vue pénal, des pas très symboliques mais importants ont été fait, comme signifier que les abus sont des délits contre la dignité de la personne. On est en train de marcher dans la bonne direction, même si naturellement il y a toujours des pas à faire. Récemment on a eu une série de documents importants dans l’Eglise, le plus récent étant le Motu Proprio du Pape Vox estis lux mundi (Vous êtes la lumière du monde) avec l’obligation de la dénonciation des prêtres, religieux ou religieuses criminels. C’est une avancée très importante même si l’on est en chemin aussi de ce point de vue.

Une forte interpellation est faite aussi sur «la gouvernance» dans l’Église, avec une invitation à donner plus de place aux laïcs et aux femmes dans les structures de décision… Comment recevez-vous cette recommandation?

Je suis d’accord avec cette idée que dans l’Église il faut marcher dans le sens d’une responsabilité plus large pour les femmes et les laïcs, c’est la direction de la synodalité dans laquelle le Pape François nous emmène. Il faut voir dans la constitution de l’Église la place de l’ordre et sa spécificité dans la responsabilité pour l’administration des sacrements que l’on ne peut bien-sûr pas négliger. Je suis toujours convaincu que sur la question de l’écoute, de l’attention à la dignité de la personne, de l’importance de l’éducation, de la formation au respect de l’autre et bien-sûr de la prévention des abus sexuels, la place des femmes dans l’Église est absolument fondamentale. C’est vraiment l’un des champs dans lesquels on voir très clairement qu’il faut élargir cette présence, cette responsabilité et cette sensibilité. Cela me semble une évidence.

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06 octobre 2021, 13:49