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Sandra Sabattini: pour la première fois, une fiancée béatifiée

Fauchée par une voiture à l’âge de 22 ans, Sandra Sabattini laisse derrière elle un sillage de lumière et de bonté, tracé notamment par son engagement auprès des pauvres et des toxicomanes. Son fiancé de l’époque, Guido Rossi, témoigne à l’occasion de sa béatification.

Benedetta Capelli / Adelaide Patrignani - Cité du Vatican

«Sandra était plongée dans une relation limpide et intense avec Dieu. Elle vivait chaque moment avec une joie profonde. Elle a savouré l'univers entier, découvrant avec Lui toutes ses beautés. Elle vivait en tendant vers l'Infini, la Lumière, le Mystère, l'Amour». L’âme de la jeune bienheureuse, que son visage semble refléter, est ainsi décrite par son père spirituel, don Oreste Benzi (1925-2007), serviteur de Dieu. Il est fondateur de la communauté «Papa Giovanni XXIII» (Pape Jean XXIII), association œuvrant dans le domaine de la jeunesse, du handicap ou encore de la prostitution.

Le prêtre était dans l'ambulance emmenant Sandra Sabattini à l'hôpital après qu'elle ait été renversée par une voiture, le 29 avril 1984, en plein octave de Pâques. Après trois jours de coma, Sandra meurt à Bologne. Don Benzi célèbre ses funérailles et dans son homélie, il assure que Sandra avait accompli ce que le Seigneur lui avait demandé. Ce «tout est accompli» que Jésus a murmuré sur la croix, le prêtre italien le répète aussi aux parents de la jeune femme, Pino et Agnese: «Vous avez rempli votre mission, car vous l'avez remise au Seigneur, et le but de la vie est bien d'être en Dieu», déclare-t-il.

«Le monde a besoin de saints !»

Sandra, née le 19 août 1961 à Riccione, sur la côte adriatique, dans une famille catholique pratiquante, cultive dès son plus jeune âge une relation de profonde amitié avec Jésus. Elle fréquente notamment la paroisse de San Girolamo à Rimini, dirigée par son oncle don Giuseppe Bonini, le frère de sa mère. Sa foi est nourrie par la prière et l'adoration, et la pousse à agir auprès des personnes les plus démunies. En 1980, après de brillantes études, elle s'inscrit à la faculté de médecine de Bologne. Elle espère devenir médecin missionnaire en Afrique. Les feuilles de papier sur lesquelles elle note ses pensées et intuitions deviennent après sa mort son principal héritage.

«La vie vécue sans Dieu est un passe-temps, ennuyeux ou amusant, avec lequel on joue en attendant la mort», écrit-elle par exemple.

Sa rencontre avec don Oreste, alors qu’elle a 12 ans, va lui permettre peu à peu de réaliser son rêve: devenir sainte. Dans la communauté Jean XXIII, elle se consacre au service des handicapés et des toxicomanes, tout en poursuivant ses études. À l'âge de 21 ans, elle constate:

«Si j'aime vraiment, comment puis-je supporter qu'un tiers de l'humanité meure de faim ? Alors que je préserve ma sécurité ou ma stabilité économique ? En faisant cela, je serai une bonne chrétienne mais pas une sainte ! Aujourd'hui, il y a une inflation de bons chrétiens alors que le monde a besoin de saints !»

Une rencontre qui bouleverse l'existence

En 1979, Sandra rencontre Guido Rossi. Les deux jeunes se fiancent rapidement, et continuent de vivre leur engagement au sein de la Communauté Jean XXIII – dont Guido fait aussi partie. Leur amour réciproque déborde dans le service des autres, à tel point que Sandra explique que ce qu'elle vit pour Guido, elle le vit aussi pour son voisin, «ce sont deux choses qui s'interpénètrent, au même niveau, même si c’est avec quelques différences». La jeune femme est avec son fiancé et un ami, Elio, lorsque l'accident se produit à Igea Marina.

Deux jours plus tôt, le 27 avril 1984, elle avait écrit dans son journal:

«Cette vie qui évolue au rythme d'une respiration régulière qui n'est pas la mienne, égayée par une journée sereine qui n'est pas la mienne, n'est pas la mienne. Rien n'est à toi. Sandra, réalise ça !»

Guido Rossi a répondu à nos questions peu avant la béatification de Sandra, qui s’est déroulée ce dimanche 24 octobre à Rimini, lors d’une messe présidée par le cardinal Marcello Semeraro, préfet de la Congrégation pour la cause des saints, en la basilique-cathédrale Santa Colomba:

Guido, comment votre vie a-t-elle repris après la mort de Sandra?

Ma vie a été marquée par Sandra, tant par sa vie que par sa mort. Après une période qui n’a pas été sans difficultés, mais qui fut certainement belle et profonde, je me suis soudainement retrouvé avec deux maisons en ruines, celle de sa famille et la mienne, alors que tout le reste restait debout... J'ai été beaucoup aidé et le lien et l'affection de sa famille sont toujours vivants. J'ai été grandement soutenu par les prêtres et les frères de la Communauté Pape Jean XXIII.

Vous étiez à ses côtés même le jour de l'accident, dans ses derniers moments. Que s'est-il passé ensuite ? Qui est Guido aujourd'hui?

Je ne réponds aux questions que parce que je pense que Sandra est de l'Église. Je me suis marié, et le Seigneur nous a fait le cadeau de deux merveilleux enfants. J'ai ressenti une vocation pour le diaconat, à laquelle ma femme, avec une grande générosité, m’a aidé à répondre.

Comment accueillez-vous ce moment important pour l'Église et pour la Communauté Pape Jean XXIII?

Je pense aux grands dons et à la grande miséricorde du Seigneur qui ne nous laisse jamais seuls, même lorsque nous pensons marcher seuls, alors que c'est lui qui nous porte dans ses bras, comme cela était écrit sur la porte d'une église de Gubbio que j'ai visitée avec Sandra. Je pense à don Oreste et j'associe ce moment à sa grande joie lorsque la Communauté du Pape Jean XXIII avait reçu la reconnaissance pontificale. Le père Oreste aimait répéter la phrase du psaume: «C’est ta face que je cherche, Seigneur». Désormais Sandra voit Son visage.

En vivant auprès d'elle, avez-vous ressenti sa sainteté? Vous l'avez décrite comme "un don et un modèle", mais vous avez également avoué que vous étiez parfois agacé par son dévouement total aux autres...

J'ai trouvé difficile, mais pas ennuyeux, de la suivre. Mais je peux témoigner de sa recherche à m'impliquer, ou plutôt à choisir ensemble, et de sa clarté à toujours chercher non pas à faire, mais à faire la volonté du Seigneur. J'ai été frappé par sa façon joyeuse et profonde de voir la vie et par sa confiance dans le Seigneur dans ses actions.

En relisant ce qu'elle a écrit, en repensant au fil des ans à votre expérience avec elle, pensez-vous que certains aspects d'elle vous ont conditionné ou changé ? Je pense à votre relation avec Dieu et avec la foi...

Ce fut une belle expérience humaine, parce qu'elle m'a montré comment savoir rendre grâce pour les dons reçus, ce fut une expérience de foi vécue parce qu'elle a essayé de m'apprendre comment offrir ces dons avec confiance.

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25 octobre 2021, 16:56