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Nouveau missel de la conférence épiscopale italienne. Photo d'illustration. Nouveau missel de la conférence épiscopale italienne. Photo d'illustration.  

Motu proprio: Traditionis Custodes invite à «un renouveau liturgique et eucharistique»

Le Pape François, après avoir consulté les évêques du monde entier, a décidé de reformer l’usage du missel de 1962. Il pose de nouvelles conditions à son usage avec un encadrement très précis. Mgr Olivier Leborgne, évêque d’Arras en France, livre son regard sur ce texte.

Entretien réalisé par Hélène Destombes - Cité du Vatican

Dans le motu proprio, intitulé «Traditionis Custodes», publié ce vendredi 16 juillet 2021, le Pape change «Summorum Pontificium», le décret publié en 2007 par son prédécesseur Benoît XVI, libéralisant la messe en latin, sous le nom de «rite romain extraordinaire».

François associe à ce motu proprio une lettre, adressée aux évêques, dans laquelle il détaille les motifs de sa décision notamment concernant la responsabilité de ces derniers. Le Saint-Père se dit attristé par les abus dans les célébrations liturgiques «d'un côté comme de l'autre». Il relève «une instrumentalisation du Missale Romanum de 1962, de plus en plus caractérisé par un rejet croissant non seulement de la réforme liturgique, mais aussi du Concile Vatican II»

 

Le Pape souligne ainsi avoir été contrait de révoquer la faculté accordée par ses prédécesseurs «pour défendre l'unité du Corps du Christ».

Dans un communiqué paru le lendemain du motu proprio, les évêques de France évoquent «un appel exigeant pour toute l’Église»; «Aucun ne peut s’en dispenser». La responsabilité exercée par l’évêque, dans la justice, la charité, le soin de tous et de chacun, le service de la liturgie et de l’unité de l’Église, se fera selon eux «par le dialogue», et «demandera du temps». L’épiscopat français a aussi souhaité manifesté aux fidèles célébrant habituellement selon le missel de Jean XXIII «l’estime pour leur zèle spirituel» et «leur détermination à poursuivre ensemble la mission dans la communion de l’Église».

Mgr Olivier Leborgne, évêque d’Arras, suit les questions concernant les relations avec les communautés dites traditionalistes; il évoque un texte aux enjeux importants qu’il a accueilli avec gravité.

Entretien avec Mgr Olivier Leborgne, évêque d'Arras

Je l’ai reçu avec gravité, car l’enjeu est important. D’ailleurs, la lettre du Pape aux évêques le manifeste de manière très forte, peut-être même pour nous, Français, inattendue, mais ce texte est bien pour l’Église universelle. J’ai donc accueilli ce motu proprio avec une vraie gravité pour les enjeux d’unité et de liturgie qu’il porte, et pour exercer aussi la responsabilité qui est la nôtre dans le cadre défini, et avec une vraie charité et attention pastorale à ceux qui ont l’habitude de célébrer avec les livres liturgiques de saint Jean XXIII.

L’usage du rite romain extraordinaire sera désormais très encadré. Célébrer avec le missel de 1962 devra se faire en totale communion avec l’évêque. Une responsabilité majeure est ainsi confiée aux évêques. Comment avez-vous accueilli cette décision?

Plutôt favorablement, la communion avec l’évêque est une condition fondamentale. Dans la très grande majorité des lieux en France, cela est le cas. Seuls quelques lieux sont plus tendus, mais nous allons continuer à travailler dans cette communion avec le cadre défini.

Le Pape François s’est dit attristé par une instrumentalisation du missel de 1962. Il souligne un rejet du Concile Vatican II, qui alimente une tendance à la division. A-t-elle été constatée en France?

Ce n’est pas une tendance de fond, mais nous avons remarqué telle ou telle personne ou groupe où la messe pouvait être instrumentalisée, et où le motu proprio de Benoit XVI était mal compris. La forme extraordinaire devait rester extraordinaire. Et petit à petit, on a voulu dire que la forme extraordinaire était meilleure que l’ordinaire. Nous avons donc senti un certain glissement chez quelques-uns mais l’on ne peut pas dire que cela soit une tendance de fond. Je parle bien sûr pour la France.

Dans la lettre aux évêques qui accompagne ce motu proprio, le Pape François rappelle que les concessions pour l’utilisation de l’ancien missel établies par ses prédécesseurs étaient motivées par le désir de favoriser la recomposition du schisme avec le mouvement dirigé par Mgr Lefebvre. Ce motu proprio, dans le cas de la France, est-il intimement lié au cas de la Fraternité Saint-Pie X?

Sans doute, comme progressivement Jean-Paul II et Benoit XVI ont rouvert la porte. Aujourd’hui, la majorité des fidèles et des prêtres dans ces communautés n’ont pas connu la Fraternité de Mgr Lefebvre, donc je ne sais pas si on peut ainsi le voir comme cela. Mais la visée est bien celle de l’unité, tout comme l’ont souhaité Jean-Paul II et Benoit XVI. Tout concile provoque des réactions, l’Histoire le montre, et les Papes se battent toujours pour maintenir la communion, à tout prix. Il ne faut pas oublier que Benoit XVI, en parlant de forme extraordinaire du missel, avait pris une initiative absolument pas traditionnelle. Le rite romain, le rite chaldéen, syro-malabar sont des rites qui ont un missel fort, et n’ont pas de forme extraordinaire.

Le Pape Benoit avait introduit pour le bien pour la charité cette distinction, mais certains s’en sont servis malheureusement contre ce qu’elle voulait servir. D’où la réaction du Pape François. Je pense à tous ceux qui ne comprennent pas ce motu proprio, qui le juge trop dur, qu’ils entendent cette communion et fasse confiance au Saint-Père.

Le Pape François indique avoir pris cette décision pour défendre l’unité du corps du Christ. Va-t-il y avoir tout un travail à faire dans les diocèses pour expliquer aux fidèles, aux prêtres, le sens de ce motu proprio, notamment à ceux qui souhaitent célébrer avec l’ancien missel?

Le Pape pose des conditions claires et précises, nous sortons d’un certain flou qui pouvait exister. Ce n’est pas si étonnant que cela, mais certains en ont une interprétation très moderniste: comme si finalement l’on pouvait faire ce que l’on veut. Et bien non, dans l’Église, l’on reçoit la liturgie, y compris quand on est prêtre. Quand on met en œuvre le rite romain, l’on ne se balade pas d’une forme à l’autre, on a pu en voir quelques excès.

Les diocèses sont très inégalement concernés par ce motu proprio: dans le diocèse de Versailles il y plusieurs communautés, le diocèse d’Arras où il y a un seul lieu, et pas problématique du tout d’un point de vue liturgique. 

Quand on lit la lettre du Pape aux évêques, le Saint-Père demande un renouveau eucharistique et une nouvelle attention à la liturgie pour toute l’Église, et pas seulement pour le missel extraordinaire mais pour le missel romain de Paul VI. Il y a eu des excès, et il faut que tous, se sentent concernés par ce renouveau eucharistique et liturgique. Nous devrons le travailler partout.

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17 juillet 2021, 13:35