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Terre Sainte : les chrétiens souffrent de l'absence des pèlerins

Confinement et restrictions de déplacement liés au coronavirus obligent : ces derniers mois, la Terre Sainte a été désertée par les pèlerins. C’est sans conteste un coup dur porté aux chrétiens locaux, dont beaucoup vivent et dépendent de cette industrie du tourisme. Quand les pèlerins pourront-ils de nouveau fouler la terre de Jésus, prier dans les lieux de la rédemption et sous quelles conditions ?

Entretien réalisé par Manuella Affejee- Cité du Vatican

Qu’il s’agisse de l’artisanat, de la restauration ou de l’hôtellerie, c’est tout un écosystème économique qui se retrouve à l’arrêt avec des conséquences que l’on devine lourdes pour les familles qui en dépendent.

La situation n’est guère plus enviable pour les institutions de l’Église en Terre Sainte qui se retrouvent privées des dons et recettes générées par la venue des pèlerins. Celles-ci sont en effet nécessaires pour le financement de leurs nombreuses œuvres caritatives et pastorales. C’est le cas par exemple de la Custodie franciscaine de Terre Sainte, gardienne des Lieux saints depuis le XIVe siècle.

Nous en parlons avec le frère Stéphane Milovitch, responsable des Ressources humaines et des biens culturels de la Custodie de Terre Sainte :

Entretien réalisé avec le frère Stéphane Milovitch de la Custodie de Terre Sainte

La Custodie de Terre Sainte emploie environ 1 100 personnes, dont 60% sont dans les écoles ; 10% d’entre elles travaillent dans les « Casa Nova », lieux d’accueil pour les pèlerins, qui sont actuellement fermées. Environ 10% travaillent dans les maisons de retraite pour personnes âgées, à Nazareth en particulier ; ces maisons fonctionnent toujours et il faut trouver des fonds pour payer les employés. Il y a aussi la question du chômage technique. Tous ces problèmes concernent le monde entier mais sont aussi vécus dans les Lieux saints. Il est évident que lorsque les pèlerinages reprendront, cela permettra à l’Église de continuer ses œuvres caritatives, d’apostolat, d’éducation auprès des populations locales, et permettra également à ces dernières de vivre. Israël est un petit pays qui vit essentiellement du tourisme et des pèlerinages, donc il y a un manque à gagner important en ce moment.

Vous confirmez donc que toutes ces institutions locales qui vivent de dons subissent de plein fouet les conséquences de cette pandémie…

Oui, il y a des problèmes. Il semblerait que les pèlerins recommenceraient à venir petit à petit, peut-être à partir du mois d’octobre, mais on est bien conscient que les pèlerinages ne reprendront pas de façon régulière avant Noël.

Chaque année, il y a cette fameuse collecte du Vendredi Saint qui permet aux activités sociales et éducatives de pouvoir être financées, mais cette année, elle n’a pas eu lieu car il n’y avait pas de liturgie dans le monde ce jour-là. Cette quête a été déplacée au 14 septembre pour la fête de la Sainte Croix. Je ne sais pas comment se passeront les liturgies ou si les églises seront encore fermées. En tous cas, les sanctuaires sont des lieux qui sont gratuits, sans droits d’entrée ; donc en réalité, on vit essentiellement de la charité des gens.

Comment réussir, pour vous, à maintenir la vie dans les Lieux saints sans leurs communautés et sans les pèlerins ?

Les liturgies dans les sanctuaires ont toujours lieu et ce sont des moments où l’on porte la prière du monde entier dans le Saint-Sépulcre, à Gethsémani, etc. L’on est souvent un peu surpris de voir cette basilique du Saint Sépulcre vide mais l’Église reste très présente, même à travers ce manque de pèlerins. Car vous avez des vides qui sont parfois symboliques. (…) Nous l’avons vu lorsque le Pape a prié contre la pandémie (le 17 mars dernier, ndlr), sur une place Saint Pierre vide. Il y a des vides qui remplissent, comme le tombeau de Jésus. Et quand on se trouve dans cette basilique vide, on porte encore plus profondément toute l’Église et tout le monde.

A l’aune de cette pandémie, il est impensable que les Lieux saints drainent les foules immenses qui s’y pressaient jusqu’ici, comment envisagez-vous l’accueil pratique et adéquat des pèlerins après cette crise ?

Il est difficile de faire des plans sur la comète, car on ne sait pas encore exactement quand Israël va laisser entrer les pèlerins. J’imagine qu’il y aura des sélections en fonction de la provenance des pèlerins, du degré de contamination des différents pays… Les pèlerins vont arriver par petits groupes : il est difficile d’imaginer un évêque venant avec un groupe diocésain de 400 personnes !

On s’attend donc à des familles, de petits groupes. Nous sommes déjà prêts. Les communautés sont là, dans les sanctuaires. En ce moment, les frères font un peu de peinture, ils nettoient. Les sacristains du Saint Sépulcre sont en train de laver les colonnes.

Que faire concrètement pour vous aider ?

J’inviterais les pèlerins à revenir. (…) Nous constatons que les pèlerins qui commencent à revenir après les moments de crise – comme les intifadas par exemple-, en retirent généralement un bénéfice : ils trouvent des lieux moins denses et l’accueil y est de meilleure qualité. Ces pèlerins-là profitent des sanctuaires, ont plus de temps pour la contemplation et en perdent moins dans les habituelles files d’attente pour le tombeau ou la Grotte de la Nativité.

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19 mai 2020, 08:26