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La capitale du Soudan Khartoum, sous les bombardements La capitale du Soudan Khartoum, sous les bombardements  (AFP or licensors)

Au Soudan, la population paie le prix d’un conflit longtemps prévisible

Depuis samedi 15 avril, les combats au Soudan ont plongé la population dans une insécurité et une incertitude totales. A Khartoum, les habitants sont pris dans un dilemme, entre rester cloîtrer dans les maisons au risque de voir les balles transpercer les murs; et fuir, sans aucune garantie de sécurité. Le père Emmanuel Tédrou, curé de la paroisse Saint-Etienne décrit le drame de la population qui reste enfermée dans des maisons, dans une grande peur.

Marie José Muando Buabualo – Cité du Vatican

La population de Kahartum ne connaît aucun répit depuis le début des combats qui opposent deux forces rivales. Outre la capitale, les hostilités se concentrent également au Darfour, dans l’Est du Soudan. L’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, au pouvoir depuis le coup d’état de 2021, s’oppose aux Forces de soutien rapide du général Mohamed Hamdane Daglo, dit «Hemedti», son second lors de ce putsch. Selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), entre 10.000 à 20.000 personnes ont fui pour trouver refuge au Tchad voisin; alors que certaines sources font état de plus de 300 morts. Plongée dans la peur, une partie de la population n’arrive pas à prendre le risque de fuir et reste carrément enfermée chez elle.


La population de Khartoum prise au dépourvu

La population a été prise au dépourvu, les sorties sont réduites à la recherche de la nourriture et à pied dans des lieux proches de leurs domiciles, rapporte le père blanc, Emmanuel Tédrou, curé de la paroisse Saint Etienne, l’une des 27 de Khartoum. Située dans la périphérie de la capitale soudanaise, dans un quartier qui s’appelle Al-Hajj Yousi, l’église dédiée à saint Etienne est inaccessible en raison de la présence militaire accrue. L’élément déclencheur du conflit, selon ce curé, est le refus de l’armée dirigée par le général al-Burhane de l’intégration dans l’armée des membres des forces paramilitaires dirigées par le général Mohamed Hamdane Daglo.  Les deux généraux s’étaient alliés à l’origine pour mener le coup d’État en 2021 avant de développer des tensions par la suite. Ces rivalités croissantes entre les deux forces militaires se sont soudainement transformées en un conflit généralisé, mettant en péril le bien-être de la population.


Le conflit du samedi 15 avril constitue un frein à l’apostolat

Les missionnaires d’Afrique présents dans cette paroisse participent à l’animation de l’Église au Soudan.  Leur apostolat est grand et diversifié à l’image de leur charisme de promouvoir le dialogue islamo-chrétien sur les plans culturel et l’interreligieux.

Pour ceux qui connaissent l’histoire du Soudan, cette rivalité était prévisible, indique le père Emmanuel Tredou. Il décrit Khartoum comme une ville plongée dans la peur et l’insécurité à travers ce conflit qui est, selon lui, purement militaire et dont la population civile paie le prix en victimes collatérales. La paroisse Saint Etienne n’arrive à s’occuper de sa charge pastorale que par téléphone en essayant de s’enquérir des nouvelles de ses ouailles qui, à leur tour, restent en contact avec leurs pasteurs en vue de les informer sur ce qui se passe en dehors de leur quartier. «La situation est difficile, pour la population en général, on ne peut pas se déplacer d’une zone à une autre, l’insécurité règne, nous vivons cloitrés et on a peur de sortir des maisons» a rapporté le curé de Saint Etienne de Khartoum.


En plus de l’arrêt de l’apostolat au sein de la paroisse, les affres de la guerre frappent la population de Khartoum dans son ensemble.  En plein cœur du mois de Ramadan, et spécialement à la veille de la fête musulmane de l’Aïd el-Fitr, la population est barricadée chez elle. Plus de rencontres entre familles ni des repas de rupture de jeûne ensemble. Le père Emmanuel Tédrou appelle les belligérants ainsi que les puissances régionales et internationales d’user de leur pouvoir pour ramener la paix au Soudan.

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20 avril 2023, 20:29