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Des fidèles congolais participants à la messe célébrée par le Pape François le 3 juillet 2022 dans la basilique Saint-Pierre. Des fidèles congolais participants à la messe célébrée par le Pape François le 3 juillet 2022 dans la basilique Saint-Pierre.  (Vatican Media)

En RDC, le rôle du laïc est de réveiller la conscience de la nation

En RD Congo, «les laïcs ont compris que l’Église et la Nation sont l’affaire de tous». C’est pourquoi ils sont engagés, aussi bien dans la prise en charge de l’Église que dans des actions visant l’amélioration de la situation de leur pays. Dans un entretien accordé à Radio Vatican-Vatican News, le professeur Justin Okana estime que «le rôle du laïc est de réveiller la conscience de la nation entière et de rappeler aux autorités les limites, lorsqu’ils veulent aller en dehors de la Constitution».

Entretien réalisé par Stanislas Kambashi, SJ – Cité du Vatican

Le Pape se rend en République démocratique du Congo, pays dont les laïcs sont réputés pour leur engagement, aussi bien dans la prise en charge de l’Église que pour leurs actions visant l’amélioration de la situation de leur pays. Avant 2018, leurs initiatives du Comité Laïc de Coordination (CLC), menées notamment à travers des marches, ont contribué au renouvellement de la classe politique. En RDC, les laïcs ont compris que l’Église et la Nation sont l’affaire de tous». Ils agissent ainsi comme des sentinelles, en rappelant les limites à ne pas franchir lorsque les autorités veulent aller en dehors de la Constitution. Le laïc congolais se donne pour rôle de réveiller la conscience de la Nation entière.

C’est ce que nous a expliqué Justin Okana, laïc engagé, professeur émérite de l’Université catholique du Congo, professeur ordinaire à l’Université de Kinshasa, dans la faculté des Sciences Économiques et de Gestion. Il est membre de la coordination du Comité Laïc de Coordination (CLC).

Le Pape François visitera votre pays dans quelques jours et l’Église de la RD Congo est réputée être forte et affermie aussi bien du point de vue des ecclésiastiques que des laïcs. Quelle signification accordez-vous à ce grand événement?

Le Pape François est le numéro un de l’Église catholique, le successeur de Pierre, celui sur qui le Christ a bâti son Église. Et comme on le disait du temps de Jésus, «béni soit celui qui vient au nom du Seigneur». Sa Sainteté le Pape nous apporte un message de paix afin de nous permettre d’éviter et de vivre toujours dans un cycle infernal de guerre. C’est le message du Seigneur par son envoyé qu’est le Pape François. C’est aussi un message d’espérance qu’il nous apporte pour aider le peuple congolais à se réconcilier, que tous les enfants du pays puissions être capables de nous réconcilier d’abord entre nous les congolais.

Dans l’Église de la RDC on note un sens fort de l’engagement des laïcs. Que diriez-vous à ce sujet? En quoi est-ce que cela est visible?

En République démocratique du Congo, les laïcs ont en effet compris que l’Église est l’affaire de tout le monde. C’est la famille de Dieu et tous s’engagent pour la prendre en charge parce qu’elle nous appartient et chacun doit travailler pour l’essor de son Église. Chacun doit apporter sa contribution dans la construction de cette Église, c’est à dire que chacun doit contribuer à la proclamation de la Parole de Dieu.

Certains faits rendent visible cet engagement et cette prise de conscience. Vous remarquez par exemple que lorsque les autorités politiques veulent aller en dehors de la Constitution, nous leur rappelons les limites de leur pouvoir. Et nous agissons comme des sentinelles pour notre pays.

Avant 2018, les mouvements des laïcs catholiques ont joué un rôle apprécié dans le renouvellement politique de votre pays. Est-ce que cet élan continue?

Cet élan continue bel et bien, parce que nous les laïcs, nous continuons d’observer la marche de notre pays, nous ne constituons pas une opposition, nous ne sommes pas la société civile, nous donnons nos avis sur les affaires du pays. Nous ne pouvons pas tolérer, par exemple, que les autorités puissent aller en dehors de notre Constitution. Nous agissons dans l’intérêt de notre population et nos interventions visent à le défendre. Notre souci est que l’on puisse construire au centre de l’Afrique un État de droit. Là où nous estimons que ça ne va pas, nous dénonçons et nous prodiguons de conseils. Nous aurons par exemple, bientôt, les élections. Le processus d’enrôlement a été lancé. Nous, nous sommes en train d’observer et nous allons donner notre position pour relever ce qui marche et ce qui ne marche pas pour qu’on améliore. Pour nous, ce n’est pas une rébellion, mais plutôt une pastorale d’engagement de laïcs.

Quelle place donnez-vous au laïc au sein de l’Église catholique du Congo? Quel est son rôle aujourd’hui?

Son rôle est de réveiller la conscience de la nation entière. Notre Église est représentée partout dans le pays. Ce qui nous intéresse, c’est ce dont les laïcs font du vécu de l’Évangile chaque jour; que nous puissions, chaque jour, rappeler à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu, c’est à dire rappeler aux enfants de Dieu de vivre le plein Évangile dans la société. C’est pourquoi César est obligé de donner au peuple de Dieu les moyens de vivre. Chez nous, nous nous disons que le laïc a l’obligation de rappeler aux dirigeants leurs obligations. Pour donner un exemple, on a parlé, il y a quelques jours, l’incident de l’avion de la RDC qui aurait reçu des projectiles venant du Rwanda. Nous estimons que cet incident, est en fait une malice d’une partie de la communauté internationale avec le Rwanda pour tenter d’annuler le voyage du pape chez nous, pour dire par exemple que le pape ne peut pas aller dans un pays de guerre. Mais nous pouvons conseiller à nos autorités que la RDC ne doit pas tomber dans ce piège, nous devons être prudents tout en ayant l’obligation de protéger à tout prix notre population.

En tant que laïc engagé, quel message pouvez-vous lancer aussi bien à vos compatriotes qu’au monde en ce moment où beaucoup de caméras seront braqués sur votre pays?

Nous sommes à présent concentrés, engagés dans la préparation de la visite du Saint-Père. Nous devons savoir qu’il nous apporte le message de paix et d’espérance. Avec ses mots d’encouragement, nous devons continuer à faire confiance à notre pays et à espérer un bon avenir pour notre population. Nous devons nous réconcilier pour construire notre pays et harmoniser nos relations entre nous. Nous sommes appelés à voir comment, ensemble, nous pouvons améliorer la situation du pays. Et pour ceux qui ne sont pas congolais, nous devons voir ce que nous pouvons corriger pour notre vivre-ensemble.

Quel serait votre dernier mot?

Nous souhaitons la bienvenue à Sa Sainteté. Je souhaite que tout se passe dans la paix, dans la concorde et dans l’entente nationale. Que ce voyage se fasse très bien, à la grande satisfaction de notre peuple, qu’il puisse repartir du Congo sain et sauf, qu’aucun incident ne puisse arriver et que le Seigneur nous aide.

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28 janvier 2023, 16:34