Le village de Solhan, cible du massacre du 5 juin 2021 Le village de Solhan, cible du massacre du 5 juin 2021 

Les racines anciennes du terrorisme au Burkina Faso

Le samedi 5 juin, le Burkina Faso a subi la pire attaque terroriste depuis 2015 et le début des attentats commis par des islamistes. Entre 132 et 160 civils ont été massacrés dans l’Est du pays. Cette violence se nourrit de problèmes qui sont bien antérieurs à l’apparition au Sahel des groupes djihadistes. Analyse.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

Le Burkina Faso est encore sous le choc du massacre commis dans la nuit du vendredi 4 au samedi 5 juin dernier: le village de Solhan, dans le diocèse de Dori, a été pris pour cible par un groupe armé non identifié qui a tué selon des sources locales 160 civils, hommes, femmes et enfants. Les autorités nationales avancent le nombre de 132 victimes.

Cette semaine, le cardinal Ouedraogo, archevêque de Ouagadougou, la capitale, a appelé en ce vendredi, solennité du Sacré-Cœur de Jésus, les fidèles burkinabè à jeûner et à l’abstinence, en priant spécifiquement pour toutes les victimes des attentats et des attaques. «Offrons le Saint sacrifice eucharistique pour la réconciliation, la justice et la paix, au Burkina Faso et dans le monde» a-t-il écrit dans une note aux paroisses de son diocèse.


Qui sont ces terroristes ?

Comme souvent, cette attaque n’a pas été revendiquée et les auteurs demeurent inconnus. Mais la piste djihadiste ne fait guère de doutes au vu des témoignages recueillis, selon Tanguy Quidelleur, chercheur à l’Institut des sciences sociales du politique (ISP) de l’université Paris-Nanterre. Les terroristes auraient bien visé les VDP, les volontaires de la défense de la patrie, des supplétifs de l’armée issus des populations locales, dont l’exposition en première ligne, même si elle n’est pas expressément prévue par le gouvernement, les proposent comme cibles de choix pour les djihadistes. Les civils, dont ils sont issus et qui peuvent les aider ou les soutenir au quotidien, sont ainsi directement impliqués aux yeux des djihadistes, qui n’hésitent pas à mener des représailles à leur encontre.

Les motivations religieuses ne sont pas évidentes, souligne le chercheur qui pointe au contraire «des conflits extrêmement locaux». «C’est une région périphérique qui a longtemps été abandonnée par les services de l’État et qui s’inscrit dans une longue histoire de violence: il y a toujours eu des trafics, du banditisme – les coupeurs de route – et des conflits micro-locaux autour de l’orpaillage. Le contrôle des sites aurifères est aussi extrêmement important en terme de gouvernance locale parce que cela permet d’obtenir des ressources, d’acheter du matériel et de gagner en autonomie».

Jusqu’à présent, le Burkina Faso a évité que ces conflits aux origines souvent sociales et économiques, ne soient instrumentalisés au niveau religieux, hérissant les communautés chrétienne et musulmane l’une contre l’autre.

Entretien avec Tanguy Quidelleur, de l'ISP, université Paris-Nanterre

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11 juin 2021, 12:30