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La Libye, un pays et deux Premiers ministres

La Libye se retrouve une nouvelle fois avec deux Premiers ministres. La transition politique se trouve fragilisée, voire dans l’impasse, avec le risque de voir une confrontation armée apparaître entre les différents protagonistes de cette énième crise.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

Le 10 février, le Parlement libyen, situé à Tobrouk, a nommé Fathi Bachagha Premier ministre en remplacement d’Abdelhamid Dbeibah, à la tête du gouvernement intérimaire depuis début 2021. Le problème est que ce dernier refuse de céder le pouvoir à un gouvernement qui n’est pas issu des urnes. La Libye se retrouve donc de facto avec deux Premiers ministres, une situation que le pays a déjà connu entre 2014 et 2016, en pleine guerre civile.

 

«Le Parlement considère qu’Abdelhamid Dbeibah n’a pas respecté ses engagements: à faire évacuer les troupes étrangères, à organiser des élections en décembre dernier et à ne pas se présenter à la présidentielle», explique Moncef Djaziri, spécialiste de la Libye, enseignant chercheur à l’université de Lausanne. Dès dimanche 13 février, l’émissaire de l’ONU Stephanie Williams a rencontré les deux rivaux, les appelant à «préserver la stabilité», sans prendre toutefois position.

Constat d’échec pour l’ONU

Pour les Nations unies, cette nouvelle crise est un aveu d’impuissance. «Depuis 2011, l’ONU totalement échoué. L’organisation onusienne a été complétement incapable d’exercer une quelconque influence positive en Libye. Toutes les tentatives ont lamentablement échoué», juge le spécialiste. Le pays est encore plus divisé qu’il ne l’était, constate-t-il. «Il y a une réelle urgence à ce que les Nations unies réévaluent la manière dont elles abordent la question libyenne».

Le processus de transition va être touché par ces changements. «Il faudra se mettre d’accord sur une nouvelle loi électorale, sur le projet de constitution, sur l’organisation des élections avant ou après le référendum sur la constitution; il est à craindre que ce processus de transition ne soit freiné ou retardé et que les élections n’aient lieu que dans un an ou un an et demi», prévient Moncef Djaziri qui craint de nouveaux conflits.

La question de la stabilité semble avoir pris le pas sur celle de la transition politique, selon le chercheur. La préoccupation est plus celle de relancer l’économie et de remettre de l’ordre dans le pays que d’organiser un transfert du pouvoir à un gouvernement élu. C’est sans compter sur les milices encore puissantes et qui pourraient entraver ces aspirations.

Entretien avec Moncef Djaziri, spécialiste de la Libye à l'université de Lausanne

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15 février 2022, 13:36