Un autochtone durant la messe de réconciliation à Sainte-Anne-de-Beaupré Un autochtone durant la messe de réconciliation à Sainte-Anne-de-Beaupré  Les dossiers de Radio Vatican

La réconciliation avec les autochtones du Canada se jouera au niveau local

Le bilan du voyage du Pape François au Canada apparaît globalement positif. Son pèlerinage pénitentiel auprès des peuples autochtones a permis d’entamer un long chemin de pardon et de réconciliation entre ces populations et l’Église catholique du pays. Le père jésuite Gilles Mongeau, qui connait bien ce dossier, revient sur cette semaine du Saint-Père au sein des Premières Nations, des Métis et des Inuits.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

Les intentions du Pape François avant de venir au Canada étaient limpides : effectuer un pèlerinage pénitentiel et non un voyage apostolique ou une visite à une Église en particulier ; demander pardon aux peuples autochtones pour les abus dont ils ont été victimes pendant près de deux siècles dans les pensionnats catholiques. Son message, une fois sur place, sur les lieux mêmes de la souffrance, a été «très clair» reconnait le père Gilles Mongeau, vice-provincial des jésuites du Canada.

 

Entretien avec le père Gilles Mongeau sj sur le bilan du voyage du Pape au Canada

«Le Pape a été très authentique, très présent» estime le jésuite. Si la visite en elle-même a été positive, «le contexte a été très difficile» nuance-t-il. La venue de François a révélé qu’il y a encore «des aveuglements» au sein de l’Église catholique canadienne. «Dans certaines parties de l’Église du Canada, on n’a pas encore compris l’importance de vraiment consulter les autochtones quand on essaie d’organiser quelque chose avec eux et cela provoque des difficultés et cause des blessures».

«On va avoir encore besoin de temps pour vraiment comprendre ce qu’il s’est passé, pour que ce que le Pape a fait entre vraiment dans la conscience des gens et pour que nous comprenions mieux le travail qui reste à faire», juge le père Mongeau.

Des autochtones partagés

Du côté des communautés autochtones, les paroles et les gestes du Saint-Père ont suscité des réactions «mixtes» affirme le vice-provincial. Des survivants des pensionnats présents aux rencontres à Edmonton et sa région ont certes été touchés par «l’authenticité du Pape», «sa capacité de vraiment vivre ce pèlerinage pénitentiel» et ont compris sa démarche, mais d’autres n’ont même pas voulu participer. «La présence du Pape ravivait des blessures trop vives» explique le père Mongeau. Sans compter des mouvements «plus politiques» qui ont estimé que les excuses du Saint-Père étaient trop peu.

Ce voyage apostolique représente pour l’Église catholique du Canada une occasion de bien comprendre la profondeur du scandale des pensionnats et de la politique d’assimilation forcée des autochtones. Il fut aussi l’occasion de bien comprendre que le chemin de pardon et de réconciliation n’en est qu’à ses débuts. Maintenant qu’il a été borné par le Pape en personne, c’est à l’Église canadienne d’agir.

Réconciliation au niveau local

Pour le père Mongeau, qui est impliqué depuis de nombreuses années dans ces questions, c’est au niveau local que le travail doit commencer. Il s’agit selon lui d’un «travail d’écoute et d’accueil», «de se laisser toucher par la réalité des survivants mais aussi de leurs descendants, de leur famille, de leurs petits-enfants qui eux aussi souffrent des conséquences de ces pensionnats». «Il faut poser des gestes naturels de personne à personne», «il faut une conversion profonde au niveau des communautés locales, il faut aussi accueillir la spiritualité et les traditions spirituelles autochtones», détaille-t-il.

Ce travail d’intégration des traditions autochtones est si simple affirme le père Mongeau, fort de trente ans d’expérience dans différentes régions du pays. L’utilisation de la sauge sauvage dans le rite de purification est «un geste que l’on peut accueillir si simplement dans l’acte pénitentiel» donne-t-il comme exemple. Pour cela il faut surmonter «l’aveuglement de la communauté» reconnait-il cependant. La vraie réconciliation se jouera donc à la base au sein même des catholiques canadiens.

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01 août 2022, 17:46