Le cardinal Louis Raphaël Sako, s'exprimant devant des médias à l'occasion de la venue du Pape François en Irak, en 2021. Le cardinal Louis Raphaël Sako, s'exprimant devant des médias à l'occasion de la venue du Pape François en Irak, en 2021.  

Le cardinal Sako alerte contre les risques d’un tsunami politique en Irak

Le patriarche de l'Église chaldéenne s'inquiète de l'impasse politique qui maintient l'Irak sans gouvernement élu depuis près de 10 mois, alors que des manifestations entre mouvements rivaux se poursuivent dans la capitale, Bagdad.

Lisa Zengarini – Cité du Vatican

Alors que les tensions continuent de monter en Irak en raison de l'incapacité à former un gouvernement, après environ dix mois d'impasse post-électorale, le cardinal Louis Raphael Sako, patriarche de Babylone des Chaldéens, s'est joint au Premier ministre sortant Mustafa al-Kadhimi et à d'autres dirigeants irakiens pour appeler à un dialogue national. Il a estimé que le pays était au bord d’un «tsunami».

Manifestations rivales à Bagdad

L'Irak est sans nouveau gouvernement élu depuis les élections du 10 octobre 2021, qui ont été remportées par le Mouvement sadriste dirigé par le chiite Moqtada Al-Sadr.

L'agitation est à son comble depuis que le leader populiste a retiré tous ses législateurs du Parlement, après avoir échoué dans sa tentative de former un gouvernement excluant le Cadre de coordination chiite rival, qui rassemble des partis et des milices pour la plupart alignés sur l'Iran. Depuis lors, Moqtada Al-Sadr a exercé une pression politique par l'intermédiaire de ses partisans, empêchant ses rivaux, dont l'ancien Premier ministre Nouri al-Maliki, de former un gouvernement alternatif.

Les tensions sont montées en flèche la semaine dernière, lorsque des milliers de partisans d'Al-Sadr ont pris d'assaut la Zone Verte sécurisée de Bagdad, qui abrite des bâtiments gouvernementaux et des missions étrangères, puis ont investi le Parlement en réponse aux tentatives de ses rivaux chiites de former un gouvernement avec des candidats au poste de premier ministre auxquels il était opposé. Des groupes chiites pro-iraniens ont organisé des contre-manifestations à proximité.

Mercredi, dans une allocution télévisée depuis Najaf, al-Sadr a appelé ses partisans à poursuivre leur sit-in à l'intérieur du parlement jusqu'à ce que ses demandes, qui comprennent la dissolution du parlement et des élections anticipées, soient satisfaites.

L'inquiétude du cardinal Sako 

Alors que la confrontation se poursuit, le patriarche Sako a exhorté tous les partis politiques à mettre en place une «table de consultation nationale», prévenant que l'impasse politique actuelle aura certainement des conséquences désastreuses pour tous.

Dans un appel lancé depuis sa résidence d'été à Ankawa, dans la banlieue d'Erbil, le patriarche a fait remarquer que la situation est «effrayante», et qu'«aucun retard supplémentaire ne peut être toléré». «Les dirigeants politiques, mais aussi les autorités religieuses, doivent remédier à la situation, avant qu'un tsunami ne nous emporte tous», a-t-il déclaré.


Échec du système des quotas

Le cardinal Sako a également souligné l'urgence d'éliminer les causes structurelles profondes du chaos persistant dans le pays et, surtout, de reconnaître l'échec du système politique établi en 2003, après l'invasion menée par les États-Unis qui a renversé Saddam Hussein, et par lequel le pouvoir est distribué sur une base ethnique-sectaire.

Le système des quotas exige que le chef de l'État soit choisi parmi les représentants politiques kurdes, tandis que le président du Parlement doit être sunnite et le Premier ministre chiite.

De nombreux Irakiens attribuent à ce fonctionnement la corruption et les problèmes qui empêchent tout progrès significatif depuis des années, malgré la richesse pétrolière de l'Irak et la paix relative qui a suivi la défaite du groupe terroriste État Islamique en 2017.

Fonctionner autrement 

L'approche sectaire et le système de quotas, a ajouté le patriarche chaldéen, ont produit «corruption et injustice». Selon le cardinal Sako, il est donc nécessaire de trouver «de nouvelles approches et de nouveaux moyens» pour concevoir un système politique efficace, dans lequel les institutions sont mises au service du peuple, et non des intérêts partisans.

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05 août 2022, 11:29