Mgr Bernard Munono Muyembe, official au Dicastère pour le service du développement humain intégral Mgr Bernard Munono Muyembe, official au Dicastère pour le service du développement humain intégral 

Monseigneur Munono, laureat du Prix international Jean-Paul II

Mgr Bernard Munono Muyembe est un official du Dicastère pour le service du développement humain intégral, un organe de la curie romaine créé par le pape François en 2016. Il a reçu, au cours du mois novembre 2020, le prix international Jean-Paul II, lors de la XVIe édition de l’Association socioculturelle « AGLAIA », pour son engagement et son travail. Entretien.

Jean-Pierre Bodjoko, SJ* - Cité du Vatican

Au début du mois de novembre, vous avez gagné le prix international Jean-Paul II. Quelle est la signification et le sens de ce prix ?

Il s’agit d’un prix décerné chaque année à des personnalités du monde de la culture, de la politique, des institutions, des professions, de l’art et de l’Eglise, qui se sont distinguées par leur engagement dans un de ces domaines et en harmonie avec les principes de la doctrine sociale de l’Eglise. Parmi les lauréats les plus prestigieux de ce prix figurent notamment le Pape émérite Benoit XVI, qui l’a reçu en 2007 ; le Pape François en 2018 ; certains cardinaux, des sénateurs et d’autres personnalités du monde politique et de la culture.

Pourquoi ce prix vous a-t-il été décerné ?

Le prix a été créé en 2005, peu après la mort du Saint Pape Jean-Paul II, en réponse à sa lettre aux artistes qu’il avait dédiée à ceux qui, avec un dévouement passionné, cherchent de nouvelles épiphanies de la beauté pour en faire don au monde. Donc, au départ, le prix était décerné dans le domaine de l’art, avant d’être élargi aux autres domaines. Le Pape Jean-Paul II connaissait très bien l’art, puisqu’il était lui-même poète, acteur et auteur de pièces de théâtre. Raison pour laquelle, le prix qui porte son nom est divisé en trois sections : section église catholique, section politique et institutions ainsi que section art, culture, professions, spectacle et sport.

En ce qui me concerne, la motivation contenue dans la lettre que j’ai reçue dit que « c’est pour avoir protégé et défendu la sacralité de la vie, en harmonie avec les principes chrétiens et les valeurs héritées de la doctrine sociale de l’église ainsi qu’en lien avec mon intérêt pour mon pays, la République démocratique du Congo. Certes, je me suis toujours battu pour mon pays, me suis toujours intéressé à mon pays et je continue de le faire, face aux défis qui concerne la sauvegarde de la vie et la défense de la dignité humaine dans mon pays. Mais, je ne me concentre pas uniquement sur la RDC, je me bats également pour d’autres pays d’Afrique et du monde que mon service au Saint-Siège m’a permis de découvrir.

Au-delà de ces motivations, qu’avez-vous personnellement ressenti lors de l’attribution de ce prix ?

Au départ, je n’avais pas accepté ce prix ou l’invitation à le recevoir.

Pourquoi ?

J’ai passé quatre mois avant de réponde à leur lettre, parce que je pensais que je ne le méritais pas. Les organisateurs du prix ont usé de tous leurs moyens pour me convaincre de l’accepter.

C’était une manière pour vous de démontrer que vous ne faites que remplir votre devoir ?

Je n’ai fait que mon devoir et je n’ai été qu’un serviteur inutile. Mais, quelque part, j’ai quand même réfléchi lorsque quelqu’un m’a dit que j’ai quand-même était au service du Saint-Siège, j’ai travaillé, rencontré des personnalités et des cultures, que j’ai un intérêt pour la doctrine sociale de l’Eglise et que j’ai connu le Pape Jean-Paul II. « Pourquoi ne pas accepter ce prix en sa mémoire ? », m’a-t-il demandé. Et au final, j’ai accepté le prix, non pas pour moi, mais pour l’Eglise d’Afrique et l’Eglise universelle que j’ai servi et que je suis en train de servir, à travers mon engagement au dicastère pour le service du développement humain intégral.

Ce Prix international Jean-Paul II se limite juste à l’attribution de ce diplôme, où il y a également un autre volet ?

Le prix n’a pas été accompagné d’une valeur matérielle quelconque. C’est une reconnaissance, qu’eux-mêmes appellent un prix prestigieux, en mémoire de Saint Jean-Paul II. Le fait que ce soit en mémoire de ce Saint Pape, qui a donné sa vie pour les autres, est important. Donc, ce n’est pas seulement symbolique, mais en harmonie avec la pensée et la vie de Saint Jean-Paul II pour qu’on puisse, gratuitement, se mettre au service des uns et des autres, en particulier des plus faibles. La Bible dit : « vous avez reçu gratuitement, donnez aussi gratuitement ».

Etiez-vous seul à recevoir ce prix cette année ou vous étiez à plusieurs ?

Pour cette année 2020, le prix en était à sa 16ème édition et on était 10 lauréats de différentes sections du prix. Parmi les autres lauréats figuraient des hommes politiques, des professeurs d’université, des médecins, etc. Naturellement, au regard des conditions actuelles dues à la pandémie, on n’a pas organisé une cérémonie officielle et grandiose. La cérémonie s’est déroulée à l’église pour rendre grâce au Seigneur. Car, en fait, c’était pour le 100ème anniversaire de la naissance du Pape Jean-Paul II. Donc, c’était une action de grâces pour les merveilles du Seigneur dans la vie de son serviteur et aussi pour ce qu’il demande à chacun de nous d’agir comme serviteur inutile.

Un mot de la fin ?

J’encourage d’autres associations, institutions ainsi que d’autres pays, et en particulier les pays d’Afrique, à mettre en valeur les talents et surtout les talents des jeunes. Le Pape Jean-Paul II est à l’origine des journées mondiales de la jeunesse. Donc, il a mis en valeur les jeunes et il faudrait qu’il y ait des initiatives dans ce sens pour reconnaître ces talents et les récompenser dans le domaine artistique et dans d’autres domaines. J’ai été édifié, durant ce temps de coronavirus, de voir la mise en place de beaucoup d’initiatives, également de la part des Africains, pour essayer de trouver des réponses concrètes aux défis actuels. Et il existe plusieurs personnalités qui défendent la dignité humaine et les droits humains, qui sont bafoués, de différentes façons, via des conflits, des guerres, etc. Il faudrait donc encourager d’autres initiatives dans ce sens, en créant des prix pour encourager les jeunes et toutes les autres personnes. Il faut également que nous cherchions à nous donner la main, à conjuguer ensemble la tradition et la modernité, l’identité et l’altérité, ainsi que chercher la particularité et l’universalité. Chercher à tenir ensemble tous ces pôles pour un équilibre dans la création d’un monde meilleur. Il ne faut pas seulement s’intéresser à son propre pays. Voilà pourquoi j’avais dit que je m’intéresse à mon pays, mais je m’intéresse aussi aux autres pays et aux autres régions du monde. Ensemble, nous pouvons réaliser de grandes choses et de grands rêves. Le Pape François vient de mettre en place deux initiatives importantes : le lancement du pacte éducatif mondial et, récemment, « l’économie de Francesco ». Tout ça pour encourager les talents. Que l’Afrique et les autres régions du monde suivent aussi ces exemples. Que tous les peuples du monde et toutes les nations puissent se mettre ensemble pour briser les murs de la division, de la haine, de l’égoïsme, du nationalisme, du régionalisme, de l’ethnocentrisme, en suivant l’exemple du Saint Pape Jean-Paul II. C’est la façon la mieux indiquée d’honorer sa mémoire, au-delà du prix qui porte son nom.

Twitter : @JPBodjoko E-mail : jeanpierre.bodjoko@spc.va

Mgr Bernard Munono au micro de Jean-Pierre Bodjoko, SJ

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08 décembre 2020, 23:23