Côte d'Ivoire: l'épiscopat salue l'amnistie de 800 prisonniers
Entretien réalisé par Timothée Dhellemmes – Cité du Vatican
C’est une décision qui a surpris tout le monde. Le 6 août 2018, à l’occasion des 58 ans de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, le président Alassane Ouattara a accordé l’amnistie à 800 personnes, dont Simone Gbagbo et plusieurs figures de l'ancien régime du président Laurent Gbagbo. L'ex-Première dame de Côte d'Ivoire purgeait une peine de 20 ans de prison depuis 2015, pour atteinte à la sûreté de l’État. D’autres étaient détenus depuis la crise post-électorale de 2010-2011. Au mois de juillet dernier, l’Union européenne avait épinglé le régime «peu démocratique» d’Alassane Ouattara. A deux ans de l’élection présidentielle qui devra décider de son successeur, le président ivoirien tente donc de montrer des signes d’ouverture.
La décision d’Alassane Ouattara de libérer ces détenus politiques intervient après de nombreux appels lancés par les responsables catholiques locaux, notamment par le président de la Conférence des évêques catholiques de Côte d’Ivoire (Cecci), Mgr Ignace Bessi Dogbo. «Le président de la République a donné ce geste fort que tout le monde attendait. Cela va décrisper l’ambiance politique pour favoriser l’élan vers la réconciliation», a-t-il déclaré. Il ajoute : «Nous avions des inquiétudes, mais ces inquiétudes se dissipent avec les derniers évènements que nous avons connus».
Appel au dialogue
Alors que la libération de Simone Gbagbo semble remobiliser les militants de l'ex président Laurent Gbagbo, actuellement détenu à la CPI, Mgr Ignace Bessi Dogbo lance un appel «au débat contradictoire».
«Tant que l’on se met autour d’une table et que l’on parle, on a des chances d’aller de l’avant et de gagner le pari de la réconciliation et de la paix», estime-t-il.
A partir du 1er octobre 2018, les évêques ivoiriens mettront en œuvre un plan stratégique sur cinq ans, en vue «d’accompagner le processus de réconciliation, pour rassembler ceux qui se sont éloignés et divisés».
Si Mgr Ignace Bessi Dogbo estime que la responsabilité des hommes politiques pour la réconciliation est grande, il insiste également sur le rôle de l’Église catholique et des responsables des autres religions. «En tant que religieux, notre rôle est d’aller vers nos frères, car la religion n’est pas faite pour diviser mais pour reconstruire, pour rapprocher les gens», estime-t-il. «Quand un évêque ou un imam prend la parole pour appeler au calme, les gens sont généralement obéissants, car il s’agit de leur guide religieux», ajoute-t-il.
Dans un pays où l’islam est la religion la plus pratiquée avec environ 40% de croyants, pour près de 35% de chrétiens, Mgr Ignace Bessi Dogbo insiste sur l’importance du dialogue interreligieux : «Ce rôle de pacificateur est d’autant plus important quand il est joué ensemble, en communion entre les différents guides religieux».
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