Le Pape François et le père Federico Lombardi, au Vatican le 21 février 2019. Le Pape François et le père Federico Lombardi, au Vatican le 21 février 2019.  

Père Federico Lombardi: la mission de Radio Vatican au service du Pape

Extraits d'un article écrit à l'occasion du 90ème anniversaire de Radio Vatican par l'ancien directeur de la station, le père Federico Lombardi, et publié dans le nouveau numéro de la revue jésuite "La Civiltà Cattolica".

Federico Lombardi

Le 12 février 2021, cela fera exactement 90 ans que Pie XI a inauguré avec son célèbre message radio «Écoutez, ô cieux...» la nouvelle station de radio du Vatican, construite par Guglielmo Marconi, de son propre chef, et confiée aux soins du père jésuite Giuseppe Gianfranceschi qui en a été le premier directeur.

La «mission» de Radio Vatican était claire dès le début: être un instrument au service du Pape pour son ministère d'annonce de l'Évangile dans le monde et de guide de la communauté universelle de l'Église catholique. Cette mission a été préservée au fil du temps et réaffirmée à plusieurs reprises par les Papes, garantissant une identité forte de l'institution. [...]

La voix du Pape

Radio Vatican [...] est née en 1931, dans le contexte de la construction rapide du nouvel État de la Cité du Vatican [...]. La station de radio construite par Marconi était à la pointe de la technologie de l'époque, et était capable de fournir un service télégraphique et radio complètement indépendant de l'Italie. Grâce aux ondes courtes, dans un «éther» encore peu encombré d'innombrables transmissions, avec une puissance assez faible, il était possible d'être entendu même sur d'autres continents. Au début de son existence, Radio Vatican était l'instrument grâce auquel les catholiques du monde entier pouvaient pour la première fois écouter directement la voix du Pape. [...]

Les années 1930 ont été des années de pouvoir totalitaire. Les positions de Pie XI étaient courageuses et, l'Église était considérée avec confiance.

La demande d'émissions en différentes langues pour guider et soutenir les fidèles dans les pays européens a rapidement augmenté. Le père Filippo Soccorsi, nommé à la tête de la Radio en 1934 (à 34 ans!), après la mort prématurée du père Gianfranceschi, ne s'est pas seulement consacré à l'amélioration des structures techniques -comme la nouvelle antenne qui domine les jardins du Vatican, connue sous le nom de «Le doigt du Pape»- mais a rapidement saisi l'attente de faire croître la Radio également par le contenu de ses programmes.

Ainsi, en 1936, la Société de radiodiffusion du Vatican a été acceptée dans l'Union internationale de radiodiffusion avec une reconnaissance de sa nature spéciale qui l'autorisait à exercer des activités de radio sans aucune limitation géographique. En raison des moyens limités disponibles, le père Soccorsi demande la collaboration de confrères jésuites de diverses nations pour la rédaction et la présentation des textes. Les transmissions en allemand étaient évidemment particulièrement importantes.

Dans la tragédie de la guerre: pour la paix et la solidarité avec ceux qui souffrent

[...] À la veille de la guerre, en 1939, des émissions régulières en italien, français, anglais, allemand, espagnol, portugais, polonais, ukrainien et lituanien, ont permis à la station d'être un point de référence pour l'Église, en jouant son rôle de dénonciation de la violence, de soutien aux victimes et aux résistants, et d'encouragement à l'espérance. Les «messages radio» de Pie XII en temps de guerre, très attendus et écoutés avec une extrême attention dans toute l'Europe, restent célèbres. Il était la voix la plus haute, celle avec le plus d’autorité, qui s'est élevée au-dessus des parties en conflit, dans ces terribles années, pour invoquer la justice et la paix.

Mais pendant la guerre, Radio Vatican est devenue célèbre aussi pour un autre service: elle était en effet un instrument fondamental du grand engagement voulu par Pie XII avec le «Bureau d'information de la Secrétairerie d'État», créé dès 1939, pour retrouver les civils et les militaires disparus et faits prisonniers, pour informer leurs familles et, si possible, rétablir entre eux au moins le lien d'un salut, d'un souvenir. [...]

Radio Vatican a consacré des émissions spécifiques à la demande de nouvelles sur les disparus et à la diffusion de brefs messages des familles aux prisonniers, dont les noms étaient lentement épelés par la voix «métallique» des présentateurs. Ces émissions ont atteint les 70 heures de diffusion par semaine, avec des pointes de 12-13 heures par jour. Entre 1940 et 1946, un total de 1 240 728 messages ont été diffusés en 12 105 heures de temps de transmission effectif. Dans certains cas, les émissions ont été diffusées par des haut-parleurs dans les camps de prisonniers. Les témoignages de gratitude pour ce service ont été nombreux et émouvants. C'est l'une des plus belles pages de l'histoire de Radio Vatican.

Une voix pour «l'Église du silence»

Avec la fin de la guerre, Radio Vatican a accompagné avec ses émissions le climat de reconstruction morale et spirituelle des pays dévastés par le conflit, tandis que les préparatifs de la grande Année Sainte de 1950, période de vitalité renouvelée de l'Eglise, battaient leur plein.

Pendant ce temps, la plus grande partie de l'Europe orientale tombe sous l'oppression des régimes communistes et l'Église catholique devient l'objet de dures persécutions dans de nombreux pays. C'est un défi historique pour Radio Vatican, qui est pratiquement le seul moyen pour les fidèles de nourrir leur lien avec le Pape et l'Église universelle et de recevoir un soutien pour leur foi.

Malgré les ressources limitées, les programmes dans les langues des pays d'Europe orientale sont devenus plus nombreux et plus longs. À la fin des années 1940, au programme en polonais -qui, avec l'italien, l'anglais, le français, l'espagnol et l'allemand, a toujours été l'une des principales langues de transmission- se sont ajoutés ceux en tchèque, slovaque, hongrois, lituanien, letton, russe, croate, slovène, ukrainien, roumain, bulgare, biélorusse et, un peu plus tard, en albanais.

Pendant des décennies, tout au long de la période d'oppression, les émissions de Radio Vatican ont offert un rendez-vous régulier et sûr aux fidèles, religieux, prêtres, évêques privés de la liberté d'exprimer et de vivre leur foi.

Il y aurait une infinité d'histoires à raconter sur ces années. Dans certains pays et dans certaines périodes de persécution très dures, écouter Radio Vatican était absolument interdit et très risqué: cela pouvait entraîner de lourdes peines, jusqu'à l'emprisonnement et même -dans certains cas- la peine de mort. Pour certaines langues, comme le polonais ou le slovaque, les audiences étaient élevées, tandis que pour d'autres, où les catholiques étaient une minorité, les auditeurs n'étaient pas nombreux, mais le principe qui a guidé les pères de la Radio, selon l'intention du Pape, n'était pas l'immensité de l'audience, mais la situation de besoin des auditeurs.

C'est pourquoi les langues de transmission vers les pays d’Europe orientale ont toujours représenté plus de la moitié des langues de Radio Vatican. Lorsque, après de nombreuses années, les murs sont tombés, la gratitude des fidèles et des peuples a enfin pu s'exprimer sous des formes émouvantes, comme les plus de 40 000 lettres qui sont arrivées à la Section ukrainienne au cours de la première année qui a suivi la chute du régime soviétique, ou la remise d’une décoration d’honneur par l'État albanais pour le travail de Radio Vatican. [...]

Communication par la communion

En 1970, la rédaction et les studios de Radio Vatican ont déménagé au Palazzo Pio, en face du Château Saint-Ange, offrant un espace adéquat dans ce qui allait devenir le siège principal de la station pendant des décennies. En 1973, le père Roberto Tucci [...] a succédé au père Martegani à la direction générale. Nous sommes à la veille de l'Année sainte 1975 et la Radio est complètement mobilisée. Il s'agit non seulement de diffuser en direct les grandes célébrations papales, les audiences et les événements, et de fournir des informations adéquates dans toutes les langues afin que l'Église universelle se sente concernée, mais aussi de fournir un service aux pèlerins qui arrivent à Rome en provenance du monde entier. [...]

Dans la seconde partie des années 1970 arrivent le père Pasquale Borgomeo, alors directeur de programmes dynamique et créatif, et le père Félix Juan Cabasés, responsable du «Bureau éditorial central», qui deviendra plus tard le «Service de documentation». Le premier permettra d'entretenir les précieuses relations internationales de la station, en particulier avec l'Union européenne de radio-télévision (UER); le second laissera une trace durable dans l'organisation de la documentation et de la programmation éditoriale. [...]

Radio Vatican atteint ainsi sa maturité, avec une qualité professionnelle et journalistique croissante, ce qui fait d'elle, depuis Rome, le cœur battant de la communication quotidienne de l'Église universelle – une «communication par la communion», comme l'a souhaité le Concile-, mais aussi une protagoniste active dans le monde plus large de la communication catholique et laïque sur la vie de l'Église. [...]

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04 février 2021, 12:21