Conférence de presse du synode - 21 octobre 2019 Conférence de presse du synode - 21 octobre 2019 

Briefing du synode: répartition des prêtres et existence des indigènes en ville

En Salle de Presse du synode, six intervenants se sont exprimés devant les journalistes ce 21 octobre: le cardinal Christoph Schönborn, dominicain, archevêque de Vienne et président de la Conférence épiscopale autrichienne; Mgr Domenico Pompili, évêque de Rieti (Italie); père Dario Bossi, supérieur provincial des missionnaires comboniens du Brésil, membre du REPAM et du réseau Églises et Mines (Brésil); Marcivana Rodrigues Paiva, représentante du groupe ethnique Sateré Mawé (Brésil); Paolo Ruffini, président du dicastère pour la communication; père Giacomo Costa, jésuite, secrétaire de la commission pour l’information du synode.

Alessandro Di Bussolo – Cité du Vatican

Lors de cette première conférence de presse de la troisième semaine du synode, le cardinal Christoph Schönborn a livré son regard sur les travaux en cours, soulignant que «le Pape François veut éveiller la conscience de toute l'Église sur le sort des peuples indigènes de l'Amazonie, qui vivent en étant menacés d’extinction depuis 500 ans». «La situation reste dramatique», a-t-il poursuivi, ajoutant qu’en tant que père synodal il a «beaucoup appris sur le courage des peuples indigènes. Comme héritiers des puissances coloniales, nous devons être très prudents et conscients de ce que cela signifie pour ces peuples d'être en danger d'extinction. Le Pape nous demande de prêter attention à ceux qui n'ont pas de voix, aux peuples et aux pauvres oubliés», a insisté l’archevêque de Vienne.

Le diaconat permanent et les prêtres missionnaires

Le cardinal Schönborn a également témoigné de la situation de son propre diocèse concernant le diaconat permanent: «À Vienne, nous avons 180 diacres permanents, en grande majorité mariés. Une expérience née de l'intuition de mon prédécesseur, le cardinal Konig, qui a mis en pratique une des innovations introduites par le Concile Vatican II. Aujourd'hui, nos diacres permanents servent dans les paroisses, dans les communautés, pour la Caritas et aussi dans les prisons. Le diaconat permanent peut vraiment aider la pastorale en Amazonie», a-t-il estimé.

Une autre aide pourrait aussi venir d’une répartition plus équitable du clergé, a expliqué le prélat autrichien, mentionnant la Colombie et ses «1200 prêtres aux États-Unis, au Canada et en Espagne. Si au moins certains d'entre eux pouvaient s'installer en Amazonie, ils seraient d'une grande aide», a-t-il déclaré. Pour le cardinal Schönborn, «toute l'Amérique latine et même toute l'Église catholique sont coresponsables de l'Amazonie. S'il y a besoin d'aide, l'Église doit faire des efforts pour envoyer des missionnaires, comme elle l'a déjà fait dans le passé». Elle doit aussi faire preuve d’autocritique face à la question des vocations indigènes, en s’interrogeant sur les causes de leur rareté et leur prise en considération.

Intervention d’un climatologue invité spécial

L’archevêque de Vienne a également abordé le thème de l’écologie intégrale, rappelant que «l’Amazonie est une région décisive pour le climat du monde». Il faut donc se demander «quelle est notre contribution à l'augmentation des dangers pour l'Amazonie», par des éléments aussi concrets que les téléphones portables comprenant des minéraux extraits de la forêt amazonienne. L’évêque de Rieti, Mgr Domenico Pompili, a lui aussi souligné le caractère crucial de «la» question écologique. Un thème présent dans les débats de la matinée, puisque Paolo Ruffini, préfet du dicastère pour la communication, a précisé que les pères synodaux avaient écouté l’intervention du climatologue allemand Hans J. Schellnhuber, directeur émérite du Potsdam Institute for Climate Impact Research.

Les dérives de l’extraction minière

Le prêtre combonien Dario Bossi, en mission en Amazonie depuis 15 ans, a quant à lui parlé des dommages causés par les industries minières. Les chercheurs d'or, a-t-il dénoncé, «déplacent des quintaux de terre et polluent les rivières avec du mercure et du cyanure pour l'équivalent d'un anneau d'or». Seul 10% de l'or est utilisé pour des procédés qui sont réellement utiles, comme l'utilisation en médecine. Le reste est stocké ou utilisé pour des bijoux. «Ce serait un signe très fort si l'Église pouvait éliminer l'utilisation de l'or dans ses liturgies et ses sacrements», a-t-il affirmé, en réponse à la question d’un journaliste.

«Dans notre territoire de Piquia de Baixo, a témoigné le père Bossi, il y a la plus grande mine de fer à ciel ouvert du monde, avec un processus d'exportation de 900 kilomètres qui traverse plus de 100 communautés». Ce «modèle prédateur extractif» a des conséquences dramatiques dont le prêtre combonien est largement témoin: déforestation, pollution, malformations chez les nouveaux-nés…

«L'association entre le gouvernement et les grandes entreprises est très dangereuse, a-t-il aussi dénoncé, les lois sont modifiées et les contrôles réduits». Dans ce contexte, l'Église se place aux côtés des communautés touchées, avec le réseau œcuménique Iglesias y Minería (Églises et mines) et une commission ad hoc de l'épiscopat brésilien. Le père Bossi constate également que les communautés indigènes réagissent: «Depuis dix ans, la communauté de Piquia de Baixo s'organise pour demander une réparation complète des dommages subis, et maintenant elle arrive à construire un nouveau quartier loin des zones polluées», s’est-il réjoui.

La situation des indigènes dans les villes

Marcivana Rodrigues Paiva, représentante du groupe ethnique Sateré Mawé, s’est faite le porte-parole des nombreux indigènes habitant en ville. Pour eux, «le plus grand danger est l'invisibilité: quand on est invisible, on n'a aucun droit», a-t-elle expliquée. «L'urbanisation», est un phénomène de plus en plus fréquent pour les peuples autochtones qui, arrachés à leurs terres, migrent vers les grands centres urbains. Dans la ville brésilienne de Manaus par exemple, «il y a 45 peuples autochtones, soit 35 000 habitants au total, qui parlent 16 langues différentes». «Sans territoire, nous n'avons pas droit à notre identité», a alerté Marcivana Rodrigues Paiva, avant d’appeler à «soutenir les peuples indigènes qui arrivent dans la ville» et de mentionner l’important travail de la «pastorale autochtone» qui leur est adressée.

Élaboration du Document final en cours

Par ailleurs, Paolo Ruffini a évoqué le projet du Document final du Synode, présenté le matin-même à l’assemblée synodale par le cardinal Claudio Hummes, rapporteur général du Synode. Le document comprend quatre thèmes principaux: «le chemin des peuples de l'Amazonie, la conversion intégrale à la plénitude et à la vie, la conversion pastorale, synodale et missionnaire, et enfin la conversion culturelle et écologique, puis la question de l'inculturation». Mais le cardinal Hummes «a clairement indiqué que le processus d'écoute n'est pas terminé», a précisé Paolo Ruffini.

Des statuettes volées et jetées dans le Tibre

Celui-ci s’est également exprimé sur le vol commis au petit matin à l’église Santa Maria in Traspontina, à Rome, où un individu s’est emparé des statues en bois figurant des femmes enceintes indigènes, pour aller les jeter dans le Tibre. Ces statues avaient été utilisées lors de la cérémonie dans les jardins du Vatican le 4 octobre dernier, en présence du Pape François. «Nous avons déjà répété à plusieurs reprises en cet endroit que ces statues représentaient la vie, la fertilité, la terre “mère”», a commenté le préfet du dicastère pour la communication. «C'est un geste, me semble-t-il, qui contredit l'esprit de dialogue qui devrait toujours animer tout le monde, je ne sais pas quoi dire d'autre si ce n'est que c'était un vol, et que le fait parle peut-être de lui-même», a-t-il conclu.

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21 octobre 2019, 18:00