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A Pékin, le 20 mars 2018 A Pékin, le 20 mars 2018 

Dialogue avec la Chine : Merci à la politique des petits pas

Pourquoi un dialogue avec les autorités chinoises ? En Chine, les catholiques sont restés fidèles malgré les graves souffrances causées par un régime hostile à la religion. Que peut accomplir un tel dialogue ?

Sergio Centofanti et père Bernd Hagenkord, sj-Cité du Vatican 

Le dialogue est un aspect constitutif de la vie de l’Eglise. Il occupe une première place dans son mode d’agir, tant en son sein que dans sa relation au monde. Dialoguer signifie entrer en contact avec la société, avec les religions, les cultures… Déjà le Concile Vatican II invitait à faire du dialogue un style d’action pastorale, pas seulement parmi les membres de l’Eglise mais aussi envers les non chrétiens, les autorités civiles et les personnes de bonne volonté. Ainsi on lit dans la Constitution Gaudium et Spes que « tous les hommes, croyants et incroyants, doivent s’appliquer à la juste construction de ce monde, dans lequel ils vivent ensemble : ce qui, assurément, n’est possible que par un dialogue loyal et prudent. »


Le Pape Paul VI parle lui aussi de manière lumineuse dans l’Encyclique Ecclesiam Suam : « L’Eglise doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit. L'Eglise se fait parole ; l'Eglise se fait message ; l'Eglise se fait conversation » (n°67). « L’Eglise doit être prête à soutenir le dialogue avec tous les hommes de bonne volonté, qu'ils soient au-dedans ou au-dehors de son enceinte (n°97).


Le dialogue entre les personnes, les institutions, les communautés humaines permet une connaissance réciproque, qui peut aussi devenir de l’amitié. Dans tous les cas, le dialogue se nourrit surtout de confiance. La confiance réciproque est le fruit de tant de petits pas, gestes et rencontres, qui arrivent concrètement dans de multiples occasions, souvent sans prétention et avec grande discrétion. « Il y a toujours des portes qui ne sont pas fermées », affirmait le Saint-Père le 13 mai 2017.


Nous sommes arrivés à l’actuel climat de dialogue entre le Saint-Siège et la Chine, aussi, grâce à de petits et grands pas accomplis par les derniers papes, chacun d’entre eux a ouvert un chemin, a ajouté une pierre à l’édifice, a inspiré des pensées et des actes d’espérance. Pensons à l’équilibre des actions de Paul VI et aux claires indications de Benoît XVI et de saint Jean-Paul II concernant un dialogue proactif avec les autorités chinoises. Enfin, pensons à l’accélération que le Pape François, avec sa personnalité, ses gestes et son magistère, est en train de donner au processus de rapprochement et de rencontre entre les peuples, y compris celui de Chine.


Certainement, le choix ecclésial du dialogue n’est pas une fin en soi, ce n’est pas la recherche des compromis à tout prix ou une attitude de renoncement, typique de celui qui est prêt à « brader » ses propres principes pour un succès facile politique ou diplomatique, oubliant ainsi le chemin de souffrance de la communauté catholique. Pour l’Eglise, le dialogue doit être toujours animé par la recherche de la vérité et de la justice, visant à poursuivre le bien intégral de la personne, dans le respect des droits fondamentaux.

Mais, la mission de l’Eglise, même en Chine, n’est pas de changer la structure ou l’administration de l’Etat, d’aller contre le pouvoir temporel qui s’exprime dans la vie politique. En effet, si l’Eglise faisait de sa mission uniquement une bataille politique, elle trahirait sa vraie nature et deviendrait une acteur politique parmi les autres, renonçant à sa vocation transcendante propre et en réduisant son action à un horizon purement temporel.

Un dialogue sincère et honnête permet, au contraire, d’œuvrer de l’intérieur, au sein de la société, tant pour prendre soin des attentes légitimes des catholiques que pour favoriser le bien de tous. Dans un tel contexte, quand la voix de l’Eglise se fait critique, cela n’advient pas pour susciter les polémiques ou condamner de manière stérile, mais pour promouvoir une société plus juste avec un esprit constructif. Même la critique devient, ainsi un exercice concret de charité pastorale, parce qu’elle recueille le cri de souffrance de ceux qui sont les plus faibles et souvent n’ont pas la force ou le titre pour faire entendre leur propre voix.


Selon le Saint-Siège, même en Chine, un dialogue franc et respectueux, même s’il est conduit difficilement et non sans quelques risques, permettra d’instaurer un climat d’échange plus confiant, utile à la connaissance réciproque et capable de dépasser graduellement les graves incompréhensions passées et même récentes.


Aujourd’hui différents signaux laissent entendre que la Chine est toujours plus attentive au « soft power » du Saint-Siège sur la scène internationale. En Chine, l’histoire suit son cours et exige une œuvre de discernement attentif de la part de ceux qui ont des responsabilités particulières dans l’Eglise. Pour cette raison, le dialogue que le Saint-Siège a adopté depuis plus d’un quart de siècle dans ses rapports avec les autorités chinoises, prend aujourd’hui les contours d’un véritable devoir pastoral pour ceux qui veulent lire les signes des temps et reconnaitre que Dieu est présent dans l’histoire, la guide par sa providence, et œuvre concrètement aussi pour le futur des catholiques chinois.

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07 mai 2018, 11:07