Le Pape reconnaît le martyre de cinquante Français tués par les nazis
Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Après avoir reçu dans la matinée de ce 20 juin le cardinal Semeraro, préfet du dicastère des Causes des saints, un nouveau décret a été publié, officialisant la béatification prochaine de nombreuses figures, ou les érigeant au rang de vénérables. Plusieurs décrets concernent des martyrs de la guerre d'Espagne (1936-1939), l'un, un diacre permanent brésilien, un autre encore reconnaît les vertus héroïques d'une religieuse italienne, fille de la charité de Saint Vincent de Paul.
Un décret en particulier attire l'attention et concerne 50 Français morts sous le nazisme, entre 1944 et 1945. Parmi eux, le père Raymond Cayré, prêtre du diocèse d'Albi, qui fût déporté dans le camp de concentration de Buchenwald où il mourra à 29 ans. Sera aussi bienheureux Gerard Martin Cendrier, né en 1920 et entré chez les Franciscains. Requis pour le service du travail obligatoire (STO) en 1943, il part en Allemagne. Participant à des réunions de prières clandestines, il est arrêté par la Gestapo et envoyé lui aussi à Buchenwald.
"Une belle page de l’histoire de l’Église de France"
Le martyre en haine de la foi est aussi reconnu pour Roger Vallée, séminariste du diocèse normand de Sées, qui mourut en octobre 1944 dans le camp de Mathausen. Le dernier personnage identifié dans le décret est le jeune laïc Jean Mestre, ouvrier tourneur-fraiseur qui s'engagea au sein de la JOC, la Jeunesse Ouvrière Chrétienne. Lui aussi est enrôlé au STO. En application d'un décret pris par les nazis contre l’action catholique française parmi les travailleurs français en Allemagne, il est arrêté en mars 1944, puis envoyé au camp de Watendstdet-Hallendorf, où il mourra d'une pleurésie.
En 1993, dans son livre En haine de l'Evangile, le père Charles Molette, qui fut le postulateur des martyrs, dresse la «liste des cinquante» envoyés en Allemagne pour assister spirituellement les ouvriers du STO, on les retrouva dans des centres clandestins où se tenaient des réunions de prières et d'évangélisations, à Berlin, en Turinge ou encore à Cologne.
«Pendant la domination nazie, de nombreux prêtres, religieux et laïcs engagés dans des associations catholiques ont suivi les travailleurs français sur le territoire allemand pour leur apporter un soutien moral et spirituel» rappelle le dicastère des Causes des saints. Les 4 figures mises en avant dans le décret sont représentatifs de la diversité des charismes: prêtre diocésain, religieux, séminariste ou laïc. 46 de leurs compagnons sont égalements inscrits au registre des futurs bienheureux: plusieurs franciscains, un jésuite, des prêtres diocésains, des membres de la JOC et de nombreux scouts de France.
«Au point de départ ils étaient bien diférents par l’origine, la formation, le niveau social» écrit le père Edouard Cothenet, historien et professeur à l’Institut catholique de Paris, dans un article écrit en octobre 2024 pour la revue Prêtres Diocésains. «Mis en face de la perversion du nazisme broyeur d’hommes, ils se sont retrouvés dans la même foi au Christ Sauveur, en pleine solidarité avec leurs frères. On peut dire qu’ils ont vécu la synodalité avant l’heure, laïcs et prêtres pleinement associés. C’est une belle page de l’histoire de l’Église de France qu’il est bon de rappeler» précise-t-il.
La reconnaissance formelle de leur martyre ouvre directement la voie à leur béatification, sans qu’il n’y ait besoin de miracle.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici