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Le Pape Léon XIV Le Pape Léon XIV  (AFP or licensors)

Père Chabi: Léon XIV, homme spirituel et d’une autorité paisible

Le Pape Léon XIV est un augustin spirituellement profond et qui sait porter l’autorité de manière paisible et non écrasante, témoigne le père Chabi Kolawale. Cet augustin béninois, actuellement professeur de patristique à Rome, était encore novice quand l’actuel pontife était prieur général de l’ordre. Il estime qu’avec la spiritualité augustinienne, le Pape pourra apporter à l’Église un renouveau intérieur et un grand élan missionnaire; et ouvrira au monde des sentiers nouveaux de paix.

Stanislas Kambashi, SJ et Marie José Muando – Cité du Vatican

«Je suis fils de saint Augustin, augustin, qui disait: "avec vous je suis chrétien et pour vous évêque". En ce sens, nous pouvons tous marcher ensemble vers la patrie que Dieu nous a préparée». Dans son premier discours le jour de son élection le 8 mai dernier, Léon XIV prononçait ces mots, rappelant ceux du fondateur de son ordre, saint Augustin d’Hippone. Le pontife romain soulignait aussi son identité de religieux augustin. Pour son confrère, le père Chabi Kolawale, cette identité a toujours été remarquable dans la personne de l’actuel pape. «Le pape Léon XIV est avant tout notre confrère. Avant de devenir évêque, puis cardinal, il a été un religieux parmi nous, enraciné dans la vie communautaire augustinienne», souligne l’augustin béninois, membre de la province du Nigeria.

Ecouter le père Chabi Kolawale, OSA

«Homme de prière, humble, attentif aux autres, engagé dans la formation des jeunes»

Comme provincial de la province de Chicago et comme prieur général de l'Ordre de Saint Augustin, Robert Francis Prevost était connu de ses confrères «comme un homme de prière, humble, attentif aux autres, très engagé dans la formation des jeunes confrères», avec une profonde capacité d'écoute dans la recherche de la vérité, déclare le père Chabi. «C'est d'ailleurs l'invitation que saint Augustin nous lance dans cet esprit d'unité qui est donc au cœur de notre vocation augustinienne». Le prieur général portait aussi une grande attention aux monastères des moniales augustiniennes qui forment le deuxième ordre de Saint-Augustin. Il avait aussi à cœur le troisième ordre, celui des laïcs qui vivent la spiritualité augustinienne. «Sa simplicité et sa profondeur évangélique ont toujours frappé ceux qui l'ont côtoyé».


Une «autorité paisible»

Le père Chabi a rencontré le père Prevost pour la première fois en 2008. L’alors novice était resté frappé par la capacité d'écoute, d’accueil et la manière d’être du prieur général, une impression et un témoignage que le religieux, devenu professeur, porte encore aujourd’hui. «On voit qu'il portait une autorité paisible, donc une cette manière qui n'est pas écrasante de mettre les personnes à l'aise,… par exemple, dans les contextes de célébration solennelle, il a ce calme avec lequel il réussissait à mettre tout le monde et tout le monde à l'aise», fait remarquer l’augustin béninois. Étudiant à Rome, le père Chabi a aussi rencontré son confrère et lui a présenté le manuscrit d’un livre qu’il écrivait sur saint Augustin. La sincérité et l’intérêt «pour mon travail est resté en moi comme quelque chose que je ne peux jamais oublier», témoigne l’actuel professeur de Pères de l’Eglise à l’Institut pontifical patristique Augustinianum de Rome.

L’élection de Léon XIV, un événement historique pour les augustins

Le père Chabi témoigne que la nouvelle de l’élection de leur confrère comme successeur de Pierre a été accueillie avec «une immense émotion, une grande joie et en même temps un profond sens de gratitude et de responsabilité». «C'est un événement historique pour notre Ordre», reconnait le prêtre, vu que c’est le premier pape de l’ordre. Les augustins se sentent appelés à prier pour le pontife avec ferveur et à vivre encore plus fidèlement le charisme de saint Augustin au service de l'Eglise, spécialement en ce temps où ils seront davantage connus et parfois scrutés de près.

Le père Chabi estime aussi que c’est un moment où l’ordre a cette responsabilité de faire mieux connaitre le charisme et la spiritualité augustiniens dont un membre est devenu pape. C’est, selon lui, un appel à revenir à l'essentiel, à l'unité du cœur, à la vie fraternelle et à la recherche commune de Dieu, à approfondir «notre fidélité au Christ en serviteur humble et joyeux de l'Évangile».


Des traits de la spiritualité augustinienne qui peuvent mieux accompagner la mission du pape augustin

La pensée de saint Augustin est très vaste, fait remarquer le père Chabi, qui estime qu’«elle offre des repères précieux pour une Église en transition». Le prêtre béninois souligne d’abord l’insistance sur la grâce. «Dans un monde marqué par l’auto-suffisance, Augustin nous rappelle que tout bien vient de Dieu, et que l’Église doit vivre dans une attitude de confiance, d’humilité et de conversion permanente». Ensuite, «Augustin enseigne une ecclésiologie profondément spirituelle». Répondant à la vision rigoriste des Donatistes et à leur exigence radicale de pureté, l’évêque d’Hippone soutient que l’Église est un mélange de justes et de pécheurs, un peuple en chemin. «Cette vision réaliste et miséricordieuse peut aider le nouveau Pape à gouverner l’Église avec justice et patience, en gardant le cap sur la vérité de la foi». Enfin, Augustin est un maître du cœur, qui parle de «l’homme intérieur», car «c’est dans le cœur que commence toute réforme vraie, de

la quête de la vérité, de l’amour comme finalité ultime». «Dans un monde en quête de sens, la sagesse augustinienne peut être une boussole: recentrer l’Église sur l’essentiel, le Christ, et inviter chacun à la conversion par la rencontre personnelle avec Dieu». Cette spiritualité augustinienne pourra aider Léon XIV à apporter à l’Eglise un renouveau intérieur et un élan missionnaire.


La place de Marie dans la spiritualité augustinienne

Dans son premier discours, le nouveau Pape a invité à prier la Vierge et s’est confié à l’intercession de Marie. Le père Chabi indique que dans l’Ordre de Saint Augustin, Marie tient une place très précieuse. Elle est Mater Ecclesiae, la Mère de l’Église, «celle qui a cru avant de concevoir». Elle est aussi vénérée sous d’autres titres, dont celui de Mère du Bon Conseil, qui est au cœur de la piété augustinienne. Son sanctuaire de Genazzano est un lieu de pèlerinage majeur. Léon XIV s’y est rendu samedi 10 mai. Quelques mois avant son élection, il s’y était rendu pour prier avec ses confrères. «Ce geste discret mais éloquent montre combien Marie, sous ce titre, l’accompagne dans son discernement et sa mission». Dans leurs communautés, les augustins ont également une grande dévotion à Marie, Mère de la Consolation, et à Mater Gratiae, la Mère de la Grâce. «Ces titres expriment notre confiance en celle qui est proche de nous dans nos joies comme dans nos épreuves. Le nouveau Pape est un grand dévot de Marie, et cela s’est senti dès ses premières paroles. Nous y avons reconnu notre frère», fait savoir le père Chabi.


Quel espoir pour l’Afrique et le monde?

Le premier discours de Léon XIV a été centré sur la paix, la construction des ponts et l’ouverture. Pour l’augustin béninois, cela représente un grand espoir pour le continent africain, marqué par de nombreux défis dont des conflits, des injustices, la pauvreté; mais qui est en même temps riche d’une foi vive, d’une jeunesse pleine de courage, et d’un grand sens de la communauté. Comme Prieur Général de l’Ordre, le Pape avait «toujours montré une attention sincère et fidèle aux circonscriptions africaines», il n’avait jamais fait manquer son soutien, témoigne le père Chabi. Le prêtre béninois révèle que leur prieur «parlait souvent avec une admiration particulière de la Province augustinienne du Nigeria, à laquelle j’ai la joie d’appartenir». Le religieux est convaincu que le Pape portera dans son cœur toute l’Église africaine comme il l’a fait pour l’Ordre. Son appel à la paix, à la réconciliation, à l’ouverture mutuelle donne force et espérance à tous ceux qui œuvrent à guérir les blessures de ce continent meurtri.

Pour le père Chabi, l’élection de Léon XIV est aussi un signe fort d’espérance «pour notre temps», pour notre monde qui a soif d’authenticité, de «vérité vécue» et de proximité. Le religieux décrit son confrère, le Pape, comme «un homme de prière, de profondeur intérieure, mais aussi d’écoute attentive aux réalités humaines, culturelles, sociales… [qui] semble incarner cette belle parole de saint Augustin: "Avec vous je suis chrétien, pour vous je suis évêque"». Ceci fera de lui un pasteur proche «non par stratégie, mais par vocation». Étant un homme qui a toujours «une autorité paisible et non écrasante», il n’impose pas mais invite, non pas pour diviser, mais pour rassembler. «Dans un monde fragmenté, son style de gouvernement, fondé sur le dialogue, la vérité et la charité, peut vraiment ouvrir des chemins nouveaux», conclu le père Chabi.

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12 mai 2025, 18:51