Une employée du "National Health Service", au Royaume-Uni, brandissant un papier de remerciement à l'intention d'un donateur. Une employée du "National Health Service", au Royaume-Uni, brandissant un papier de remerciement à l'intention d'un donateur. 

Face à l’urgence sanitaire, le Pape invite à construire la civilisation de l’amour

L’annonce quotidienne des nombreux décès liés au Covid-19 crée une atmosphère anxiogène dans une grande partie du monde actuellement. Dans une méditation publiée par la revue espagnole “Vida Nueva” ce vendredi 17 avril 2020, le Pape François propose au contraire de situer ce temps de pandémie lié au coronavirus dans une dynamique de joie pascale, tournée vers l’espérance de la Resurrection, à la suite du Christ.

Cyprien Viet – Cité du Vatican

Le Pape amorce sa réflexion en revenant sur l’apparition de Jésus ressuscité à Marie-Madeleine et à l’autre Marie qui venaient de voir que le tombeau était vide. «Le Seigneur sort à leur rencontre pour transformer leur deuil en allégresse et les consoler au miliieu de la peine. C’est le Ressuscité qui veut ressusciter à une vie nouvelle ces femmes et, avec elles, l’humanité entière. Il veut déjà nous faire commencer à participer à la condition de ressuscité qui nous attend», explique François.

Le Pape reconnaît toutefois que cette invitation à la joie peut sembler décalée en ce temps de crise, et qu’elle pourrait résonner comme «une provocation» ou «une blague de mauvais goût». Beaucoup de gens ont aujourd’hui le même sentiment que les disciples sur le chemin d’Emmaüs, ils se sentent désemparés, désorientés. La pierre du sépulcre semble impossible à soulever, sa pesanteur semble bloquer toute espérance sur l’avenir. «C’est la pesanteur de l’angoisse des personnes vulnerables et âgées qui traversent la quarantaine dans la solitude la plus absolue, c’est la pesanteur des familles qui ne savent pas comment faire arriver un plat de nourriture dans leurs assiettes, c’est la pesanteur du personnel sanitaire et des services publics qui se sentent épuisés et débordés… Cette pesanteur qui semble avoir le dernier mot», s’attriste François.

Ne pas avoir peur de se remettre en mouvement

Cependant, l’Évangile donne une indication sur l’attitude à adopter, avec l’attitude bouleversante de ces femmes qui «face aux doutes, à la souffrance, à la perplexité, face à la peur de la persécution et de tout ce qui pouvait arriver, furent capables de se mettre en mouvement et de ne pas se laisser paralyser par ce qui était en train de se passer». Contrairement à beaucoup de disciples qui avaient pris la fuite, elles ont voulu continuer à assurer une présence auprès de Jésus. Comme celles qui avaient cherché à oindre le corps du Seigneur avec des parfums, nous voyons aujourd’hui beaucoup de personnes qui se mettent en mouvement pour oindre l’humanité souffrante.

«Nous avons vu l’onction apportée par des médecins, des infirmiers et des infirmières, des ambulanciers, des nettoyeurs, des soignants, des transporteurs, des forces de sécurité, des volontaires, des prêtres, des religieuses, des grands-parents, des éducateurs et tant d’autres qui ont cherché à apporter ce qu’ils avaient pour apporter un peu de soin, de calme et d’âme dans la situation», rappelle François.

Une onction pour la vie

Les femmes de l’Évangile ont compris ensuite que le Christ était ressuscité et que donc «leur onction n’était pas une onction pour la mort, mais pour la vie». Tout comme «la vie déchirée, détruite et annihilée sur la croix s’est réveillée et commence à vibrer de nouveau», rappelle Pape en citant le théologien allemand Romano Guardini, «toute la vie de service et d’amour que vous avez livré en ce temps recommencera à vibrer de nouveau». Le Pape François le répète: «Dieu n’abandonne jamais son peuple, il est toujours près de lui, spécialement quand la douleur se fait plus presente.»

François souligne donc qu'une leçon est à tirer de cette crise: le fait que «personne ne se sauve tout seul». «Les frontières tombent, les murs se désagrègent et tous les discours intégristes se dissolvent face à une présence presque imperceptible qui manifeste la fragilité dont nous sommes faits», insiste François.

«Il est urgent de discerner et de trouver le pouls de l’Esprit», car «c’est le moment juste pour encourager une nouvelle imagination du possible avec le réalisme que seul l’Évangile peut donner», sans se contenter de simples petites logiques substitutives vouées à contourner les difficultés immédiates, mais qui ne permettent pas d'affronter les conséquences profondes de la crise.

Détruire le fatalisme et les réponses superficielles

«Une urgence comme le Covid-19 est défaite avant tout par les anticorps de la solidarité», rappelle le Pape en utilisant l’expression contenue dans le document “Pandémie et fraternité universelle” publié par l’Académie pontificale pour la Vie le 30 mars dernier. «C’est une leçon qui détruira tout le fatalisme dans lequel nous étions immergés, et qui nous permettra de nous sentir de nouveaux architectes et protagonistes d’une histoire commune, et donc de répondre ensemble à tant de maux qui affligent des millions de frères à travers le monde.»

Le Pape le répète: «Si nous nous comportons comme un unique peuple, face aussi aux autres épidémies qui nous affligent, nous pourrions avoir un impact réel». Il pose une serie de questions dont dépend la renaissance de notre planète: «Réussirons-nous à agir de façon responsable face à la faim dont tant de gens souffrent, en sachant qu’il y a de la nourriture pour tous? Continuerons-nous à détourner le regard avec un silence complice face aux guerres alimentées par le désir de domination et de pouvoir? Serons-nous disposés à changer les styles de vie qui font plonger tant de gens dans la pauvreté, en promouvant et en nous encourageant à conduire une vie plus austère et humaine, qui permettre une distribution équitable des ressources?»

Il pose aussi ces questions à la communauté internationale: «Adopterons-nous les mesures nécessaires pour arrêter la dévastation de l’environnement ou continuerons-nous à nier l’évidence? La mondialisation de l’indifférence continuera à menacer ou à tenter notre chemin. Trouvons les anticorps nécessaires de la justice, de la charité et de la solidarité!», martèle-t-il.

«N’ayons pas peur de vivre l’alternative de la civilisation de l’amour, qui est une civilisation de l’espérance, contre l’angoisse et la peur, la tristesse et le découragement, la passivité et la fatigue», demande le Pape en conclusion, en rappelant que la construction de cette civilisation de l’amour, jour après jour, demande l’engagement de tous.

 

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17 avril 2020, 12:33