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Le livret du message pour la Journée mondiale des Communications sociales 2019. Le livret du message pour la Journée mondiale des Communications sociales 2019.  

Communications sociales: «Un réseau n’est pas fait pour piéger, mais libérer»

« “Nous sommes membres les uns des autres” (Ép. 4,25). Des communautés de réseaux sociaux à la communauté humaine»: tel est le titre du message signé fin janvier par le Pape François, en vue de la 53e Journée mondiale des Communications sociales célébrée ce 2 juin. Le Saint-Père y évoque les liens d’union et de désunion de la communauté humaine lorsqu’elle est présente sur les communautés virtuelles.

Dans ce message annuel qui définit la vision du Saint-Siège en communication depuis Vatican II, le Pape François invite à réfléchir avant tout, anthropologiquement et philosophiquement à notre «être-en-relation» sur Internet et les réseaux sociaux, dont il estime que l'Église a toujours cherché à promouvoir l’utilisation «au service de la rencontre et de la solidarité», le désir de l'homme étant par essence «de ne pas rester dans sa solitude».

Source de connaissances et de risques

Le Pape François détaille ainsi sa vision du numérique dans ce message publié le 24 janvier dernier - en la fête de saint François de Sales, saint patron des journalistes - en vue de la Journée mondiale des Communications sociales de ce 2 juin, dont le thème est «Nous sommes membres les uns des autres» (Ép. 4,25). 

«Si le numérique représente une source de connaissances et de relations naguère impensables, les experts se multiplient pour pointer les risques de ces profondes transformations technologiques sur la recherche et le partage d’une information authentique à l’échelle du monde», écrit-il.

Les écueils de la désinformation, de la manipulation et du discrédit

«Internet représente une possibilité extraordinaire d'accès au savoir, mais il s'est avéré qu’il est aussi l'un des lieux les plus exposés à la désinformation et à la distorsion consciente et ciblée des faits et des relations humaines, qui souvent prennent la forme de discrédit», s’inquiète ainsi le Souverain pontife.

D’un côté, le Pape reconnait la part de rencontres et d’entraide née sur ces réseaux, de l’autre il dénonce sans faille «la manipulation de données personnelles à visées politiques ou économiques», de même que le cyber-harcèlement. Il souhaite donc réfléchir sur cette métaphore «du réseau» aux origines d’Internet.  

La métaphore du réseau et de la communauté

«L’image du réseau nous invite à réfléchir sur la multiplicité des parcours et des nœuds qui en assurent la solidité, en l'absence d'un centre, d'une structure hiérarchique, d'une organisation de type vertical. Le réseau fonctionne grâce à la coparticipation de tous les éléments», énonce de prime abord François.

Ainsi ramenée à la dimension anthropologique, la métaphore du réseau rappelle une autre figure riche de significations: celle de la «communauté», souligne le Pape argentin. «Une communauté est d'autant plus forte qu'elle est cohésive et solidaire, animée par la confiance si elle est basée sur l'utilisation responsable du langage».

Un agrégat d’individus

Dans le contexte actuel, il apparait évident que «la communauté des réseaux sociaux n'est pas automatiquement synonyme de communauté humaine» . «Dans le meilleur des cas, les communautés sur les réseaux réussissent à montrer cohésion et solidarité, mais elles ne restent souvent que des agrégats d’individus qui se reconnaissent autour d'intérêts ou d'arguments caractérisés par des liens faibles», renchérit-il, critiquant le principe «d’opposition» qui régit souvent les rapports entre des groupes, en ligne.   

«On se définit à partir de ce qui divise plutôt que de ce qui unit, laissant cours à la suspicion et à l'explosion de toute sorte de préjugés (ethniques, sexuels, religieux et autres)», argumente François.  

Le Web, toile d’araignée

Cette tendance alimente un individualisme effréné qui finit parfois par fomenter des spirales de haine. Et ce qui devrait être une fenêtre sur le monde devient ainsi une vitrine dans laquelle exhiber le propre narcissisme, déplore alors le Pape.

«Le réseau est une occasion pour promouvoir la rencontre avec les autres, mais il peut également renforcer notre isolement, telle une toile d’araignée susceptible de piéger», ajoute-t-il. World Wide Web ne signifiant rien de moins littéralement qu’«une grande toile d’araignée mondiale».

Les failles relationnelles

Les enfants, en particulier, se trouvent les plus exposés à l'illusion que les réseaux sociaux puisse pleinement les satisfaire au plan relationnel, jusqu'au phénomène dangereux de jeunes «ermites sociaux» qui courent le risque de se rendre complètement étranger à la société, explique le Pape.  

Une dynamique, qui révèle une faille sérieuse dans le tissu relationnel de la société, une lacération que nous ne pouvons ignorer, selon François, pour qui cette réalité virtuelle insidieuse pose des questions de caractère éthique, sociale, juridique, politique, économique, à l'Église.

La métaphore organique

Le Pape propose une voie de sortie: «Tandis que les gouvernements cherchent des voies de réglementation légale pour sauver la vision originelle d'un réseau libre, ouvert et sécurisé, nous avons tous la possibilité et la responsabilité d’en favoriser une utilisation positive».

Cette réponse positive peut être esquissée à partir d'une troisième métaphore, indique le message pour cette Journée mondiale: celle du corps et des membres, que Saint Paul utilise pour parler de la relation de réciprocité entre les personnes, fondée dans un organisme qui les unit. «Débarrassez-vous donc du mensonge, et dites la vérité, chacun à son prochain, parce que nous sommes membres les uns des autres.» (Ep 4,25).

Identité, altérité, communion

La métaphore du corps et des membres nous amène à réfléchir sur notre identité, qui est basée sur la communion et sur l'altérité, pointe-t-il. «Et comme chrétiens, nous nous reconnaissons tous membres de l’unique corps dont le Christ est la tête. Cela nous aide à ne pas voir les personnes comme des concurrents potentiels, mais à considérer même les ennemis comme des personnes».

Le Pape cite saint Basile pour appuyer son propos: «Rien n’est plus conforme à notre nature que de nous fréquenter mutuellement, d’avoir besoin les uns des autres». «La foi elle-même, en fait, est une relation, une rencontre», relève le Successeur de Pierre, ajoutant que cette image du corps des membres nous rappelle que l'utilisation des réseaux sociaux est complémentaire de la rencontre en chair et en os. «Si le réseau est utilisé comme une extension ou comme une attente d'une telle rencontre, alors il ne se trahit pas».

Un réseau qui libère

«Si le réseau est une occasion pour se rapprocher des histoires et des expériences de beauté ou de souffrance physiquement loin de moi, pour prier ensemble et ensemble chercher le bien dans la redécouverte de ce qui nous unit, alors c'est une ressource». Ainsi, selon François, nous pouvons passer du diagnostic à la thérapie: en ouvrant le chemin au dialogue, à la rencontre, au sourire, à la caresse... Ceci est le réseau que nous voulons. «Un réseau qui n’est pas fait pour piéger, mais pour libérer».

 

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24 janvier 2019, 12:00