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Dans les rues de Port-au-Prince, la capitale haïtienne, le 25 octobre 2022. Dans les rues de Port-au-Prince, la capitale haïtienne, le 25 octobre 2022.   Les dossiers de Radio Vatican

Mgr Dumas: le peuple haïtien ne doit pas mourir

Haïti ne semble pas voir la fin du tunnel. La crise multiple que traverse le pays ne fait que s’amplifier sous la presse de l’insécurité générale alimentée par les gangs. L’Église catholique, jusqu’alors très respectée, n’échappe pas aux violences. Mais l’espoir n’est pas éteint selon Mgr Pierre Dumas, évêque d’Anse-à-Veau et Miragôane.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

«Terrible, catastrophique»: les adjectifs utilisés par Mgr Pierre-André Dumas, l’évêque d’Anse-à-Veau et Miragôane, ne laissent aucun doute sur la gravité de la situation en Haïti. Le secrétaire général de l’ONU a lui évoqué un cauchemar devant le Conseil de sécurité qui devait évoquer la proposition d’envoyer une force armée internationale dans l’île, sans que cette perspective ne suscite un quelconque enthousiasme. Les gangs font régner la terreur, contrôlent des pans entiers du territoire, entravent la circulation des biens et des personnes, bloquent des ressources, notamment la nourriture et les carburants, accentuant la crise humanitaire générale qui accable le pays. Ce sont eux que le Conseil de sécurité vise dans une résolution adoptée le 21 octobre dans une tentative de résolution de la crise.

Face à cela, la police semble incapable de rétablir l’ordre, d’où cet appel désespéré d’un gouvernement lui-même en manque de légitimité et d’autorité. «Il y a beaucoup d’anarchie, de chaos, de violence» confirme Mgr Dumas qui ne peut que constater le désespoir de la population, contrainte de trouver de quoi se nourrir, parfois en pillant certains dépôts.

«Nous avons vraiment besoin d’être accompagnés, d’une certaine assistance, non pas d’une occupation mais d’une aide internationale pour au moins sortir de cette situation de blocage total de la population qui est presque prise en otage», estime l’évêque qui n’hésite pas à dire que «le peuple haïtien est menacé de disparition». Il plaide pour un «plan Marshall» qui n’impose pas un modèle de l’extérieur mais qui promeuve des solutions venant des Haïtiens eux-mêmes dans la perspective d’un développement humain intégral.

L'Église, pas épargnée par les violences

L’Église, institution respectée par l’ensemble de la société, n’échappe pas aux violences. Certains de ses entrepôts ou de ses structures sanitaires ou éducatives ont été prises pour cible soit par les gangs soit par des manifestants en colère. Ce qui ne l’empêche pas de poursuivre sa mission : «l’Église accompagne, est présente, est solidaire de la souffrance des gens ; elle ne peut pas faire grand-chose», concède Mgr Dumas.

Mais l’évêque refuse de se résigner et veut voir dans la mobilisation des jeunes un signe d’espérance. «Ils se sentent acteurs, protagonistes, ne veulent plus être des automates qui subissent tout, qui se plaignent», affirme-t-il. Ces jeunes veulent en finir avec «un système politique corrompu, mafieux». Et de formuler ce vœu d’un système de développement qui ne détruise pas l’être humain. «Même si nous sommes au cœur de la nuit, la lampe n’est pas encore éteinte», croit Mgr Dumas qui poursuit :  «Nous faisons notre le cri et la souffrance du peuple : ne rien faire c’est laisser sortir Haïti de l’histoire et entrer ainsi sur le chemin de la disparition».

Entretien avec Mgr Pierre-André Dumas

 

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25 octobre 2022, 18:17