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Des porte-containers dans le port de Hambourg, le 24 juin 2022. Des porte-containers dans le port de Hambourg, le 24 juin 2022. 

«Les marins devraient être autorisés à descendre à terre»

Alors que le dimanche de la mer se tient ce 10 juillet, le directeur du réseau Stella Maris International revient sur les conditions difficiles vécues par certains marins, qui vivent parfois plusieurs mois sans possibilité de poser le pied sur terre. Une situation inacceptable et souvent contraire à la dignité humaine.

Lydia O'Kane - Vatican News

Le père Bruno Ciceri est le directeur international du réseau Stella Maris, basé au dicastère pour la promotion du développement humain intégral à Rome. Il revient sur la situation actuelle de nombreux marins dans le monde, qu'il qualifie d'inacceptable.

Du navire à la côte

«La Covid-19 a créé une situation très difficile parce qu'à l'époque, les ports étaient fermés et les marins ne pouvaient pas venir à terre. Nos aumôniers ne pouvaient pas non plus se rendre sur les navires», explique-t-il. «À l'époque, il était compréhensible que l'autorité nationale des pays, l'autorité portuaire, et aussi les armateurs ne permettent pas aux marins de descendre à terre parce qu'ils avaient peur que les gens soient infectés, mais aujourd'hui, malgré le fait que de nombreux marins ont été vaccinés, et qu'il n'y a plus de restrictions, ils ne sont pas autorisés à venir à terre» déplore-t-il.

Le père Ciceri estime que c'est «inacceptable, car ce droit de descendre à terre est inscrit dans la convention du travail maritime de 2006». Il souligne que les marins doivent être autorisés à venir à terre «car les gens ne peuvent pas rester six ou neuf mois pour la durée de leur contrat, voire plus».

Discrimination

Le directeur international de Stella Maris souligne également que certains marins sont victimes de discrimination lorsqu'ils veulent descendre à terre. «Un Européen ou un Américain sera autorisé à venir à terre mais si vous avez un passeport différent, vous devez rester à bord». Il note que ces décisions sont prises soit par l'autorité portuaire, soit par la compagnie, soit par le capitaine du navire. Selon le père Bruno Ciceri, beaucoup de ces personnes sont vaccinées, il n'y a donc aucune raison pour qu'elles ne soient pas autorisées à débarquer. 

La santé des gens de mer

Certains marins ne sont pas autorisés à descendre à terre, beaucoup ayant des contrats de longue durée à bord des navires pendant des mois. Une situation qui peut avoir un impact important sur leur santé mentale.

«Ils vont travailler et dormir au même endroit, et ils rencontrent toujours les mêmes personnes parce que le contrat est de neuf ou dix mois», explique le père Ciceri. Cela, dit-il, peut entraîner de la fatigue et du stress psychologique «car ils sont loin de leur famille et ne peuvent pas se détendre après une journée de travail».

Le rôle des aumôniers

Compte tenu des défis auxquels les marins sont confrontés à bord de leurs navires, les aumôniers jouent un rôle essentiel en tant que point de contact et «oreille attentive» lorsqu'ils montent à bord. «Le rôle de l'aumônier est essentiel car on peut leur parler de tout, mais aussi surtout de problèmes familiaux... il peut aussi y avoir une question liée à leur contrat ou un problème de travail. Il peut aussi y avoir des actes d'intimidation à bord du navire, c'est pourquoi l'aumônier qui s'y rend est digne de confiance», explique le père Ciceri.

Défendre les droits des marins

Faisant référence à la Convention du travail maritime de 2006 (CTM), le cardinal Czerny rappelle dans son message pour le Dimanche de la mer qu'elle oblige les compagnies à fournir un logement décent et propre, une nourriture suffisante, un environnement de travail sûr, des heures de travail correctes et des congés à terre.  Mais «les fuits importants acquis depuis l'entrée en vigueur de cette convention en 2013 ont été sérieusement compromis».

«Comme partout dans le monde, nous avons de bonnes et de mauvaises entreprises» commente le père Ciceri. Certaines entreprises prennent bien soin de leur équipage en fournissant des commodités à bord, tandis que d'autres ne se soucient pas de leurs employés.

Le directeur international de Stella Maris souligne également que nombre de ces grandes compagnies maritimes réalisent d'énormes bénéfices qui, malheureusement, ne sont pas partagés avec les marins ou «utilisés pour améliorer les installations de bien-être dans les ports».

En souvenir des gens de mer

On estime que 90 % des biens que nous consommons nous sont livrés par des navires, mais le plus souvent, les personnes qui transportent ces biens passent inaperçues. «Ces marins sont considérés comme invisibles, mais ils sont là, non seulement pour faire tourner l'économie mondiale, mais aussi pour avoir un impact direct sur la vie quotidienne de chacun d'entre nous». souligne le cardinal Czerny dans son message. «Nous tenons pour acquises que les choses arrivent, mais où arrivent-elles ? Comment arrivent-elles ?» s'interroge pour sa part le père Ciceri.

Alors que les communautés chrétiennes célèbrent le Dimanche de la Mer le 10 juillet, il souligne l'importance de remercier et de prier pour tout le travail que les marins font pour fournir aux personnes les biens qui rendent leur vie plus confortable.


 

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09 juillet 2022, 11:56