Marche citoyenne pour la dignité et la justice à Ndjamena (capitale), au Tchad, le 15 février 2022. (Vatican Media) Marche citoyenne pour la dignité et la justice à Ndjamena (capitale), au Tchad, le 15 février 2022. (Vatican Media) 

Au Tchad, l'armée responsable de tirs mortels sur des civils du pays

Un mois après les tirs mortels sur des habitants de la province de Ouaddaï, qui ont fait 13 morts le 24 et 25 janvier derniers, associations et famille de victimes se mobilisent pour faire la lumière sur les événements. A l'issue d'une enquête conjointe menée en février, la Convention Tchadienne pour la Défense des Droits de l'Homme (CTDDH) et Human Rights Watch accusent l'armée tchadienne d'être responsable du massacre.

Claire Riobé - Cité du Vatican

Les forces de sécurité tchadiennes ont tué au moins 13 personnes, dans un enfant de 12 ans, et blessé 80 autres à Abéché, dans la province de Ouaddai, les 24 et 25 janvier derniers. C'est ce que confirme l'enquête commune de Human Right Watch et la Convention tchadienne pour la défense des droits de l’Homme (CTDDH), publiée en ligne le 9 mars 2022.

Ces violences à Abéché ont été immédiatement condamnées par la société civile tchadienne et les partenaires internationaux du Tchad, les autorités du pays ont revanche tenté de passer l'événement sous silence. Dans les semaines qui ont suivi, elles ont rejeté l'hypothèse selon laquelle les forces de sécurité tchadiennes étaient à l'origine des tirs. 

Demande d'une enquête indépendante

Ces actions «injustifiables» de l'armée, apparement sans aucune raison, doivent à présent donner lieu à une enquête approfondie et indépendante des autorités, réclament les deux organismes de défense des droits de l'Homme. Enquête qui permettrait de «demander des comptes aux individus responsables», ce qui n'a pas été envisagé jusqu'à présent

Mahamat Ibédou est secrétaire général de la CTDDH. Au cours du mois de février, l'association a reccueilli de nombreux témoignages des membres des familles des victimes et témoins de l'événement. Aujourd'hui, «les familles attendent qu'on reconnaisse que leurs parents ont été tués, que l'Etat reconnaisse la culpabilité de ces responsables qui ont donné l'ordre (de tirer)», indique-t-il. «Et ils attendent au moins un dédommagement. Nous comptons justement accompagner ces familles afin que justice leur soit rendue.»

 

Depuis que le général Mahamat Déby a pris le pouvoir, après le décès de son père Idriss Déby le 20 avril 2021, les manifestations civiles n'ont eu de cesse d'être réprimées par le Conseil miliatire de transition, qui dirige aujourd'hui le pays. «Il est vrai que la répression des manifestations est récurrente au Tchad, mais jamais auparavant à cette échelle-ci», alerte Mahamat Ibédou.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer selon lui ces répressions. «D'abord, les autorités tchadiennes ont conscience que le système de gouvernance peut entrainer des mécontentements, et des actions citoyennes. Et ces actions sont réprimées sauvagement. Ensuite, les policiers sont analphabètes, ils reçoivent une formation très sommaire. A chaque fois qu'on les lâche (en liberté), les bavures se multiplient», déplore-t-il.

Aujourd'hui, il a espoir que le procès que HRW et la CTDDH souhaitent engager aboutisse : «Dans le passé, nous avons eu quelques résultats. Je ne vois pas ce qui nous empechera ici d'avoir gain de cause.»

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11 mars 2022, 10:02