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Le 21 février 2019, des personnes transportant leurs affaires après avoir été chassées par les autorités françaises, à Calais. Le 21 février 2019, des personnes transportant leurs affaires après avoir été chassées par les autorités françaises, à Calais.  

A Calais, les conditions de vie des réfugiés pires qu’au temps de la jungle

Le démantèlement du camp de réfugiés de Calais dans le nord de France n’a pas mis fin aux rêves de Grande-Bretagne des personnes migrantes. Pour se rapprocher de leur Eldorado et en attendant la traversée, elles sont des milliers de personnes, familles, femmes, hommes et enfants, à survivre sur les restes de la jungle. Le Secours Catholique a saisi des rapporteurs des Nations unies pour alerter sur les conditions de vie effroyables de ces personnes.

Marine Henriot - Cité du Vatican

«Les conditions sont effroyables», annonce d’emblée Didier Degrémont, président de la délégation du Secours Catholique du Pas-de-Calais, dans le Nord de la France. Presque tous les matins, il assiste à un bien triste manège : poussées par les forces de l’ordre, les personnes réfugiées qui ont trouvé un abri de fortune dans le cimetière de la jungle de Calais replient leur tente, prennent leurs maigres affaires et se relocalisent souvent quelques kilomètres plus loin. Depuis le démantèlement de la célèbre "jungle" française, les conditions de vie des personnes en attente de la traversée de la Manche se sont empirées. Le 14 août, le Secours Catholique et une douzaine d’autres associations comme Médecins du Monde et l’Auberge des Migrants ont saisi sept des rapporteurs spéciaux des Nations unies relatifs aux droits humains pour les alerter sur les conditions de vie «inhumaines» des personnes migrantes dans cette région. 

A l’époque de la jungle, il y avait un minimum de structures, explique le délégué du Secours Catholique, «mais aujourd’hui nous sommes dans une configuration où l’Etat ne veut plus du tout de migrants sur le territoire calaisien et tout est mis en place pour les faire partir», les accès à l’eau sont ainsi limités, seulement une centaine de douches, et éloignées, pour des centaines de personnes, «les moyens ne sont pas mis en place».

Intimidations et violences policières 

Dans leur saisine, les associations dénoncent «les évacuations brutales», «les expulsions croissantes», «les violences physiques, les confiscations d’effets personnels et les interpellations qui en découlent». Les expulsions ont continué au plus fort de la crise sanitaire, dénonce le militant des droits de l’Homme, qui se questionne : «quelle était la légitimité d’expulser ces pauvres gens pendant la pandémie ?». 

Au-delà du manque de moyens et des violences, les associations dénoncent également un manque de dialogue avec les autorités. Selon Didier Degrémont, la politique de la gestion à Calais a pris un nouveau cap depuis l’arrivée au pouvoir du président français Emmanuel Macron en mai 2017 et «l’arrivée de Gérald Darmanin au ministère de l’Intérieur marque une fermeté particulièrement forte». Sur place, le président de la délégation du Secours Catholique du Pas-de-Calais estime se trouver face à des murs, les préfets qui doivent suivre des directives très strictes renvoient la balle au gouvernement, «nous sommes dans un empêchement total de dialogue avec les autorités préfectorales». «Les menaces policières s’exercent également sur nous», détaille Didier Degrémont, les associations sur place sont priées de quitter les lieux, remplacées par des organisations étatiques. 

La traversée, coûte que coûte 

Depuis le démantèlement du camp de Calais par les autorités françaises, le nombre de personnes tentant la traversée par le tunnel de la Manche a drastiquement chuté : plus de 12 000 en 2016, quelques centaines pour 2019. Mais le problème n’a fait que de se déplacer et les traversées de la Manche sur de légères et fragiles embarcations a lui explosé, «le marché des passeurs est florissant», soupire Didier Degrémont. Mercredi 2 septembre, une cinquantaine de personnes tentant la traversée ont été interceptées par les forces de l’ordre tandis qu’ils étaient déjà à l’eau, la même journée, une soixantaine de migrants ont été pris en charge sur la plage de Wimereux après l’échec de leur traversée. Le franchissement de cette mer est dangereux, il s’agit d’une des zones maritimes les plus fréquentées au monde, où la météo est souvent capricieuse. Mi-août, le corps sans vie d’un jeune soudanais avait été retrouvé sur une plage du nord de la France.

Entretien avec Didier Degrémont du Secours Catholique

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08 septembre 2020, 14:51