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Manifestation devant le Sénat à Paris en France contre le projet de loi bioéthique, le 19 janvier 2020. Manifestation devant le Sénat à Paris en France contre le projet de loi bioéthique, le 19 janvier 2020.  

Lois de bioéthique: une dérive eugénique et transhumaniste

Après moins d'une semaine de débats à l'Assemblée Nationale, le texte de révision des lois de bioéthique a été voté en deuxième lecture dans la nuit du 31 juillet au 1 août. Le texte devra encore passer au Sénat.

Entretien réalisé par Delphine Allaire – Cité du Vatican

Le texte a été voté au coeur de la nuit par 60 voix contre 37 et 4 abstentions, sous des applaudissements de la majorité. Il doit encore néanmoins repasser devant le Sénat, probablement début 2021. Si l'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules a été adoptée, la PMA post-mortem et le don d’ovocytes dans un couple de femmes, méthode dite ROPA de maternité partagée, ont, eux, été rejetés par les députés.  Les nombreuses questions ethiques soulevées par le texte n'ont pas pour autant été évacuées. Dans un communiqué de presse, Caroline Roux, déléguée générale adjointe d’Alliance Vita dénonce une «complète rupture éthique. La majorité présidentielle a fait prévaloir l’intérêt d’adultes au détriment des droits de l’enfant, et s’est obstinée à intensifier la manipulation du vivant, sans aucun principe de précaution», souligne t-elle.

Ce texte de loi contient en effet une multitude d’autres mesures controversées comme la manipulation prolongée de l’embryon, la création d’embryons transgéniques et chimériques ou l’autoconservation des ovocytes sans motif médical. 

Alexandra Henrion-Caude, généticienne, directrice de l’Institut de recherche Simplissima, membre du comité Ethique Ile-de-France, alerte sur les risques de dérive eugéniste et transhumaniste

Entretien avec Alexandra Henrion-Caude, généticienne

Retranscription de l'entretien:

«Une loi de bioéthique se définit comme ayant pour but d’encadrer le développement du progrès pour protéger les droits fondamentaux de la personne. Dans le cas présent, il n’y a ni encadrement d’un développement du progrès, ni protection des droits fondamentaux de la personne, quel qu’en soit l’âge ou le stade de développement. C’est une loi de rupture, de transgression par rapport à l’humanité, de transgression sociétale, qui compromet durablement la santé des individus.

Déjà, car elle autorise l’État à devenir géniteur. L’État se permet d’avoir un accès aux ovocytes, en proposant aux femmes de les conserver. Cela lui permet de faire des expériences sur l’embryon jusqu’à 14 jours.

Deuxièmement, le droit à l’enfant. Le Sénat en France avait dit qu’il fallait inscrire en préalable de cette loi la mention que nul n’avait le droit à l’enfant. Les parlementaires à l’Assemblée ont restauré la notion de droit d’une personne sur une autre, en supprimant cette phrase: «Nul n’a le droit à l’enfant».

Enfin, ce projet de loi supprime tous les liens de parenté biologique pour les remplacer par des liens d’intention.

Quels sont les dangers de cette loi relatifs à la manipulation du vivant?

Elle autorise les modification de l’espèce humaine, la création d’embryons génétiquement modifiés, mais aussi la création de nouvelles espèces, générées par le mélange homme-animal, les fameuses chimères. Elle institue enfin l’eugénisme, selon des critères numérologiques du nombre de chromosomes.

Ensuite, c’est une loi qui n’a aucune indication médicale, et se revendique comme telle. Elle n’informe pas des risques encourus sur la santé des enfants à naître. Des risques notables d’infertilité des générations futures, qui n’auront d’autres choix que de recourir aussi à la procréation médicalement assistée. L’autre aspect, c’est l’augmentation des maladies épigénétiques, jusqu’à quatre fois chez les enfants issus de PMA. On n’en informe jamais les parents.

Comment expliquez-vous cette volonté politique paradoxale de révolutionner ainsi la biologie?

Il y a un mensonge, car sur 34 points de cette loi, 30 ne concernent pas la PMA pour toutes, mais relèvent des transgressions que je vous ai énumérées: conservation des ovocytes, chimères homme-animal, modifications génétiques. La raison avancée pour laquelle cette loi doit être discutée là, en plein cœur de l’été alors que l’Hémicycle est vide, c’est car elle représente une urgence sanitaire. Mais qui dit urgence sanitaire, dit indication médicale. Or, elle n’en a pas. Cette loi revendique être un accompagnement des changements sociétaux. Ca n’est pas exact, car des homosexuelles femmes qui ont des enfants, cela a déjà eu lieu depuis des années, avec un contact physiologique, par insémination naturelle ou artificielle. C’est donc un passage en force, sans respect des débats, pour une loi qui n’est un progrès pour personne.»  

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30 juillet 2020, 11:55